Des photos prises à des points de contrôle aux environs de l’aéroport de Kaboul ont interpellé des observateurs. À savoir des membres de ce qui semble être des forces spéciales en raison de leur équipements modernes et surtout, de facture américaine. En fait, ce sont des talibans qui ont vraisemblablement récupéré treillis, gilets pare-balles et armements dans les dépôts des forces gouvernementales afghanes.
Comme la propagande fonctionne à plein en Afghanistan, les taliban ayant parfaitement compris qu’ils devaient présenter une image plus policée et plus moderne à la presse qui influence nombre de dirigeants, cet affichage n’est certainement pas anodin. Sur le plan politique, c’est déjà fait avec les discours qui se veulent apaisants du mollah Abdul Ghani Baradar, le principal porte-parole des taliban. En ce qui concerne la modernité, autant commencer par les forces combattantes et, en particulier avec les forces spéciales qui ont une grande importance dans l’esprit du public.
L’unité mise en avant est le groupe Badri 313 dont la mission est d’assurer la « sécurité » de l’aéroport international de Kaboul (qui est à l’arrêt, les évacuations se font par son homologue militaire). Ses membres portent des tenues et des armes flambantes neuves, bien sûr d’origine américaine. Cela change des kalachnikovs de tous types généralement en service.
Cette unité est connue pour avoir été à l’origine dans le passé de quelques succès militaires mais aussi pour avoir mené des opérations kamikazes complexes.
Dans le passé, le réseau Haqqani qui est intimement lié aux taliban et à Al-Qaida, a souvent fait état de ses forces spéciales dépendant de son « armée Badri ». Une de leurs opérations les plus connue a eu lieu le 28 novembre 2018 contre la société de sécurité britannique G4S à Kaboul. Elle a fait cinq tués et 32 blessés. Les membres du commando s’étaient spécialement préparés, ce coup de main nécessitant d’avoir des renseignements précis, une approche discrète, une discipline de feux coordonnée puis une extraction rapide. Après qu’un kamikaze ait fait exploser son véhicule, un assaut meurtrier a été mené avec comme objectif de tuer le maximum d’employés de cette société chargée en particulier de la protection de l’ambassade de Grande Bretagne.
Ensuite, le réseau Haqqani a mis en avant ses forces spéciales « Armée de Badr 1 » en novembre quand il a attaqué l’hôtel Intercontinental à Kaboul le 18 juin 2011 (au 10 civils tués plus 6 membres du commando). Une vidéo montrait déjà leur entraînement particulier.
En 2015, une seconde vidéo de l’« Armée de Badr » a célébré un commando qui avait exécuté une opération complexe contre l’état-major du Directorat de la sécurité nationale afghane – NDS – (26 morts) à Ghazni le 4 septembre 2014.
Les taliban ont toujours eu des forces spéciales qui ont porté plusieurs noms : l’« Unité rouge », l’« Unité du sang ».
Le nom de Badri 313 fait référence à la bataille de Badr (16 octobre 623 AJC) dans laquelle le prophète Mahomet a conduit ses troupes à la victoire lors d’une attaque de caravane.
En juin 2020 (trois mois après la signature de l’accord de Doha entre les Américains et les taliban), un film encore plus complet intitulé les « Forces victorieuses » où apparaissaient les deux adjoints du mollah Haibatullah Akhundzada, Sirajuddin Haqqani et le mollah Yakoob (le fils du mollah Omar) qui félicitent les moudjahiddines depuis le camp militaire de Al Fateh connu pour servir de base aux forces spéciales des taliban. Les combattants filmés portent le bandeau rouge de « l’Unité de sang ».
Enfin, en avril 2021, de nombreuses photos étaient publiées montrant des centaines de moudjahiddines ayant fini leur instruction au sein des camps militaires de Khalid bin Waleed, Al-Fateh et Hazrat Abu Bakr Siddique de l’Émirat Islamique d’Afghanistan.
À noter qu’Al-Qaida a aussi mis en avant une Brigade 313 en Afghanistan et au Pakistan qui faisait partie de « l’Armée de l’Ombre ».
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