La Corée du Nord a déclaré le 24 mars avoir testé un drone nucléaire sous-marin capable de déclencher un « tsunami radioactif ».
Cette annonce mirobolante aurait eu lieu lors de manœuvres militaires nord-coréennes lancées en réponse aux exercices américano-sud-coréens qui se déroulent sans discontinuer depuis quelques semaines.

Le projet nord-coréen s’inspire à l’évidence du « missile nucléaire sous-marin » russe (propulsion et charge) Poséidon qui est donné pour se déplacer à une vitesse de croisière située entre 100 et 185 kilomètres/heure (selon le renseignement US, plutôt autour de 100 kilomètres/heure). Il serait capable d’atteindre des cibles situées à 10.000 kilomètres du vecteur (les sous-marins « Projet 09852 » Belgorod et « Project 09851 » Khabarovsk) et pouvant évoluer jusqu’à une profondeur de 1.000 mètres. À noter que la puissance de la tête pourrait être portée à 100 mégatonnes. La bombe nucléaire la plus puissante jamais testée l’a été par les Soviétiques le 30 octobre 1961 avec la AN602 « Tsar Bomba » qui a développé une puissance de 50 à 58 mégatonnes.

Kim Jong Un voudrait démontrer que son industrie militaire est capable de faire la même chose. L’agence de presse nord-coréenne KCNA a précisé que : « ce drone d’attaque nucléaire sous-marin peut être déployé sur toute côte et port ou remorqué par un navire de surface » ce qui le différencie du Poséidon russe lancé depuis sous-marins.
Selon la même source, l’objectif de cette arme navale est de « s’infiltrer furtivement dans les eaux opérationnelles et de produire un tsunami radioactif à grande échelle […] pour détruire les groupes d’attaquants navals et les principaux ports opérationnels de l’ennemi ».
Kim Jong Un aurait personnellement supervisé les essais des images publiées par le quotidien officiel Rodong Sinmun le montrant avec ce qui paraît être une explosion sous-marine.

L’agence KCNA a précisé que l’exercice du « drone d’attaque nucléaire sous-marin [a été mené] dans le but de mettre en garde l’ennemi contre une véritable crise nucléaire ».

Mais il est très probable que, comme à de nombreuses autres occasions, il ne s’agit que d’une manœuvre psychologique d’intoxication.

L’effort balistique et nucléaire nord-coréen
En réalité, Pyongyang faits surtout effort dans le domaine des missiles qui pourront emporter des charges nucléaires.
D’ailleurs, Kim Jong Un ne cache pas son jeu déclarant à qui veut l’entendre que les capacités nucléaires nord-coréennes se « renforçaient à un rythme plus rapide ». En effet, la Corée du Nord multiplie les essais(1) ayant lancé le 22 mars des missiles de croisière stratégiques « équipés d’une ogive d’essai simulant une ogive nucléaire ».

Déjà, le 16 mars, Pyongyang avait procédé au tir d’essai de son missile le plus puissant, le Hwasong-17. C’était le deuxième test de missile balistique intercontinental (ICBM) de l’année.

Après 2022, une année record d’essais de missiles, Séoul et Washington ont renforcé leur coopération en matière de défense et ont mené une série d’exercices militaires conjoints dont le dernier « Freedom Shield » s’est tenu du 13 au 23 mars 2023.
La Corée du Nord considère tous ces exercices comme les répétitions d’une invasion de son territoire. Elle a prévenu qu’elle y répondrait de manière « massive ».

Les États-Unis ont pour leur part réaffirmé leur engagement « sans faille » à défendre la Corée du Sud en utilisant « toute la gamme de ses capacités militaires, y compris nucléaires ».
La population sud-coréenne est de plus en plus inquiète vis-à-vis des engagements US en matière de « dissuasion élargie » qui devraient permettre de prévenir toute attaque contre des pays alliés avec d’importants moyens militaires américains – incluant l’arme nucléaire -…

La situation va se compliquer progressivement dans les années à venir pour Washington dans le Pacifique. En effet, les USA n’ont pas un ennemi potentiel (la Chine) mais trois : la Chine certes, la Corée du Nord dont l’objectif premier est de pouvoir écraser son voisin du sud (avec si besoin est des armes nucléaires tactiques) tout en tenant les États-Unis à distance (avec des armes nucléaires stratégiques) et la Russie qui renforce peu à peu la Flotte du Pacifique avec de nouveaux sous-marin tactiques et stratégiques.

Historiquement (mais quel responsable politique s’intéresse vraiment à l’Histoire ?), ces trois pays ont été des alliés lors de la guerre de Corée (1950-1953). Même si fondamentalement ces trois pays n’ont rien pour s’entendre, avoir un ennemi commun les rapproche obligatoirement.

1. Voir : « Nouveau tir de missiles nord-coréen » du 20 février 2023.

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alain rodier

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