Pékin a annoncé le 5 avril que sa marine arrêterait et inspecterait durant trois jours tout navire croisant dans le détroit de Taïwan. En retour, la République de Chine (Taïwan) a répondu qu’elle ne coopèrerait d’aucune façon avec cette mesure.

Comme les Occidentaux font du droit de passage dans ce détroit un point fondamental, tout incident qui pourrait survenir pourrait déraper dangereusement.
Cet affaire est survenue au moment ou le président Macron accompagné de Madame Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, effectuaient une visite officielle en Chine.

La zone maritime concernée comporte les routes de navire de commerce et de pêche qui sont très denses entre la Chine et l’île (c/f image ci-après).

La zone maritime concernée comporte les routes de navire de commerce et de pêche qui sont très denses entre la Chine et l’île (c/f image ci-après).

Sont aussi incluses la voie de transports de containers qui fait la liaison en le port chinois de Pingtan et Taïwan et trois lignes de transports de passager reliant les îles Matsu à Taïwan.

Il s’agit de la réponse de Pékin à la visite aux États-Unis de la Présidente de Taiwan, Tsai Ing-wen, qui a rencontré en Californie le 5 avril le président républicain de la Chambre des Représentants, Kevin McCarthy. Elle marque l’augmentation des tentions entre Pékin et Washington.
Dans cette crise qui monte, les États-Unis espèrent entrainer avec eux leurs alliés occidentaux, japonais, australiens et sud-coréens.
Le Président français en visite officielle à Pékin a pour sa part défendu la possibilité pour l’Europe de ne pas se laisser aller dans la « logique de bloc contre bloc » qui est en train de s’instaurer progressivement entre Pékin et Washington tout en niant toute « équidistance », pour la France, entre l’allié américain et la Chine.
Mais la radicalisation de la confrontation autour du sort de l’île que le Parti Communiste Chinois qui contrôle le continent n’a pas réussi à récupérer depuis la fin de la guerre civile en 1949, se poursuit.
La Chine considère Taïwan peuplée de 23 millions d’habitants comme l’une de ses provinces qu’elle récupèrera dans l’avenir. D’ailleurs, les dirigeants chinois mettent un point d’honneur à rappeler la politique d’« une seule Chine » à laquelle ils ont adhéré. Dans ce cadre, en mars 2023 seulement 13 États sur 192 conservent des relations diplomatiques avec Taïwan mais bien davantage gardent non officielles des relations avec l’île (bureau de représentation, bureau de liaison, mission commerciale, etc. ).

La situation pouvait en rester là si la Chine avait modéré sa réaction. Mais Le ministère des Affaires étrangères chinois avait publié dès le 5 avril une déclaration musclée pour dénoncer la « provocation » américaine.
Des manœuvres navales ont débuté autour de Taiwan mais pas du niveau de ce qui s’était passé en août 2022 lors de la visite de Nancy Pelosi à Taipei. En effet, Pékin avait alors lancé des manœuvres militaires sans précédent autour de l’île.
La réponse, à ce stade n’a encore rien de comparable avec l’été 2022. Elle a mis cependant Taipei en état d’alerte.

Le ministre taïwanais de la Défense Chiu Kuo-cheng (à la droite de la présidente Tsai sur la photo ci-avant) a jugé « sensible » le moment choisi par Pékin pour déployer le Shandong, l’un des deux porte-avions chinois.

Il toutefois précisé : « quand un porte-avions [chinois] sort, il y a habituellement des décollages et des atterrissages d’appareils », et n’avoir vu « aucun décollage ou atterrissage ».

Mais les choses sérieuses ont vraiment débuté le 8 avril avec le lancement officiel de manœuvres aéronavales et des patrouilles renforcées autour de l’île.
Un porte-parole de l’armée chinoise, Shi Yi a déclaré : « ces manœuvres servent de sérieux avertissement contre la collusion entre les forces séparatistes recherchant l’indépendance de Taïwan et les forces extérieures, ainsi que leurs activités provocatrices ».
De nouveau, des exercices à tirs réels se tiendront le 10 avril autour de Pingtan, le point de Chine continentale le plus proche de Taïwan.
Song Zhongping, un analyste militaire a averti : Ces exercices qui revêtent une dimension « opérationnelle » sont destinés à démontrer que l’armée chinoise sera prête « si les provocations s’intensifient » à « régler une fois pour toutes la question de Taïwan ».
La présidente Tsai Ing-wen a dénoncé le 8 avril un « expansionnisme autoritaire » de la part de la Chine et assuré que Taïwan « continuerait à travailler avec les États-Unis et d’autres pays (…) pour défendre les valeurs de liberté et de démocratie ».
Le ministère de la Défense taïwanais a affirmé samedi à la mi-journée avoir détecté huit navires de guerre et 42 avions de chasse chinois autour de l’île. Vingt-neuf avions ont dépassé la ligne médiane qui sépare la Chine de Taïwan, a-t-il été précisé par la même source.

Évoquant Taïwan, le président Xi Jinping aurait  dit Madame Ursula von der Leyen (qui s’est montrée globalement assez cassante avec son interlocuteur (en particulier sur les « bonnes relations » entretenues par Pékin avec Moscou) : « Quiconque pense que la Chine va faire des compromis sur Taïwan se berce d’illusions ».

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Texte

Alain Rodier

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