Un kamikaze afghan a perpétré un attentat suicide le 30 janvier 2023 à Peshawar dans la mosquée située à l'intérieur d'un complexe qui comprend le siège de la police provinciale et un département de lutte contre le terrorisme.

Cent morts et 221 blessés ont été relevés mais le bilan pourrait encore s’alourdir. Selon le ministre de l’Intérieur, Ranah Sanaullah, l’attentat a tué 97 policiers et trois civils.

Cette action a suivi une alerte déclenchée le 21 janvier par les services de renseignement pakistanais faisant état d’une menace du Tehreek-e-Taliban Pakistan (TTP) pesant sur Peshawar et la région Kyber Pakhtunkhwa.
En effet, les attaques menées par des insurgés contre des patrouilles, des barrages ou des postes de police se sont multipliées dans la région de Peshawar située à une cinquantaine de kilomètres de la frontière avec l’Afghanistan ainsi que dans les anciennes zones tribales aux alentours.
Elles sont principalement conduites par les talibans pakistanais du Tehreek-e-Taliban Pakistan (TTP) dont l’émir depuis 2018 est le mollah Noor Wali Mehsud alias Abou Mansoor Asim

Après sa création en 2007, il s’était attaqué aux représentants du pouvoir et aux populations dans le nord-ouest du pays avant d’être chassé des zones tribales par une série d’opérations militaires d’envergure lancée par l’armée en 2014. . Cette année là, une faction du TTP s’en était pris à une école militaire à Peshawar tuant 154 personnes – majoritairement des enfants -.

Mais, profitant de l’arrivée des taliban (dont il se dit « proche, partageant les valeurs communes ») au pouvoir à Kaboul en août 2021, le TTP est revenu en force ces derniers mois au Pakistan. En décembre 2021, il a rompu un bref cessez-le-feu conclu en août de la même année avec le gouvernement d’Islamabad. Toutefois, il souhaitait se montrer moins sanguinaire et affirme ne plus cibler que les forces de sécurité et en aucun cas les lieux de culte. En conséquence, le TTP a immédiatement nié être responsable de l’attentat du 30 janvier.

Cela dit, peu après l’explosion, Omar Mukaram Khorasani, l’émir du Jamaat-ul-Ahrar (JuA), un groupe associé depuis 2020 au TTP a revendiqué l’attentat en affirmant qu’il avait eu lieu pour venger son prédécesseur, Omar Khalid Khorasani, tué en Afghanistan en 2022. Il a attribué cette mort aux services pakistanais (ISI).

Un porte-parole du TTP a pris ces distances avec cette déclaration en répétant que son mouvement ne visait plus les mosquées, les écoles coraniques et les endroits religieux. Il a ajouté que les responsables de ces actes pouvaient faire face à des actions punitives du TTP.

La possibilité d’un coup d’éclat de la wilayat (province) Khorasan de l’État Islamique (Daech) créée en janvier 2015 n’est pas à exclure mais ses activistes concentrent pour l’instant leurs opérations contre le pouvoir taliban de Kaboul(1).

Suite à cet attentat, Muhammad Ijaz Khan, le chef de la police de Peshawar a déclaré : « nous sommes sur la ligne de front [dans ce combat contre les mouvements islamistes armés] et c’est pourquoi nous avons été visés ».
Islamabad reproche à Kaboul de ne rien faire pour limiter les mouvements du TTP en Afghanistan. De nombreux incidents frontaliers ont lieu depuis la fin 2021 et cette attaque pourrait encore détériorer les relations entre les deux pays.

1. Voir : « AFGHANISTAN : la violence perdure » du 26 avril 2022.

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Texte

Alain Rodier

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