Les États-Unis représentés par le secrétaire d’État Mike Pompeo ont signé samedi 29 février un accord (à ne pas faussement qualifier « de paix ») avec les taliban à Doha (Qatar) en présence de représentants afghans, pakistanais et indiens. Des négociations discrètes qui avaient lieu depuis 2018 sous l’égide du Qatar ont fini par aboutir, le président Donald Trump voulant absolument tenir sa promesse de ramener les boys à la maison avant la prochaine présidentielle de novembre. En échange de ce retrait, les taliban s’engagent à ne pas attaquer les intérêts américains depuis l’Afghanistan (en rappel de ce qui s’était passé le 11 septembre 2001). En réalité, cet accord fait partie d’un processus beaucoup plus large qui, selon Washington, est une « opportunité offerte » pour amener à la table des négociations les taliban, le pouvoir en place à Kaboul (le président Ashraf Ghani) et tous les responsables politiques (dont Abdullah Abddullah qui est en conflit ouvert avec Ghani). De plus, le retrait US sera dans un premier temps partiel. Cette cérémonie a été précédée d’une semaine de « réduction de violence » (et pas un cessez-le-feu) d’une semaine qui a été globalement respecté (19 membres des forces de sécurité et quatre civils tués, ce n’est pas grand-chose en Afghanistan).

En clair, les Américains se désengagent graduellement après la plus longue guerre de leur Histoire qui vu 2448 boys tués (sur un total de 3592 Occidentaux dont 90 Français).  Il ont obtenu la promesse que les taliban veilleraient à ne pas nuire aux intérêts américains dans l’avenir comme cela avait été le cas lorsqu’ils abritaient Oussama Ben Laden (1). Mais tout reste à faire dans la réorganisation de l’Afghanistan et les acteurs nationaux et internationaux (les pays voisins) ont des intérêts divergents. Pour parvenir à ce premier résultat, toutes les parties auraient consenties d’importants compromis.

Les taliban tiennent un discours destiné à l’extérieur – affirmant qu’ils acceptent de parler au gouvernement de Kaboul alors que tous les soldats étrangers n’ont pas quitté le sol afghan – mais aussi à leurs propres troupes en proclamant leur victoire militaire. Il y a fort à parier qu’au final, c’est cette deuxième option qui l’emportera. Même le président afghan Ghani resté à Kaboul a dû être rassuré par le Secrétaire à la Défense US Mark T. Esper qui avait été dépêché à ses côtés pour lui assurer que l’armée américaine continuerait à aider son homologue afghane et que si les taliban n’honoraient pas leur parole, « les États-Unis n’hésiteraient pas à annuler l’accord ». Personne ne dit si Ghani a cru à cette promesse ou s’il s’est rappelé l’histoire du président Mohammad Najibullah Ahmadzai abandonné par les Soviétique en 1989 puis assassiné par les taliban lors de leur prise de Kaboul en 1996…

Un premier « couac » est venu de lui lorsqu’il a affirmé que la libération de 5000 prisonniers (en échange de 1000 détenus par les taliban) avant le début des négociations avec les Taliban n’était pas envisageable. Cela ne pourrait être discuté qu’au cours de ces mêmes négociations. Les taliban ont immédiatement réagi en déclarant que l’accord signé n’était pas respecté…

1. Un proverbe dit « toute promesse n’engage que celui qui la croit».

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Alain RODIER

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