Dans la nuit du 4 au 5 juin vers deux heures du matin, des terroristes armés ont effectué un raid meurtrier à Solhan, petite localité située à une quinzaine de kilomètres de Sebba, le chef-lieu de la province du Yagha au Burkina Faso non loin de la frontière malienne.

Le bilan serait de 160 tués, hommes, femmes et enfants. Les attaquants ont d’abord ciblé le poste de Volontaires pour la défense de la Patrie (VDP), des supplétifs de l’armée chargés de protéger les villages (1), puis ils sont entrés dans les maisons massacrant toutes les personnes qu’ils y trouvaient. Ils ont incendié une partie des habitations et le marché de Solhan. Ce massacre qui est le plus lourd qu’ait connu le pays depuis 2015 a entraîné un deuil national de trois jours. La région avait déjà connu de nombreuses attaques ces dernières années. Le 14 mai, le ministre de la Défense, Chériff Sy et des membres des forces armées s’étaient rendus à Sebba. Il avait alors déclaré que la situation était « revenue à la normale » après de nombreuses opérations militaires.

Ce massacre fait suite à celui du 4 juin au soir qui a vu la mort de 14 civils dans le village de Tadaryat situé dans la même région. Une semaine auparavant, deux autres attaques avaient eu lieu dans la même zone faisant quatre victimes dont deux miliciens des VDP.

Les 17 et 18 mai, quinze villageois et un militaire avaient été tués au cours de deux assauts contre un village et une patrouille dans le Nord-Est du pays.

Les forces de sécurité ont du mal à s’opposer à ces violences jihadistes qui ont fait depuis 2015 plus de 1.400 morts et déplacé 1,2 million de personnes fuyant les régions peu sûres. Ces attaques se déroulent dans la « zone des trois frontières » entre Burkina Faso, le Mali et le Niger (137 personnes ont été tuées dans ce pays en mars), terrain de chasse de groupes jihadistes présumés liés à Al-Qaida et à Daech. Les terroristes neutralisent aisément les miliciens des VDP les attaquant toujours par surprise, en surnombre et étant nettement mieux armés et plus motivés. Ils massacrent ensuite les civils que les VDP étaient sensés protéger. Ce sont des représailles destinées à terroriser la population de manière à ce que les civils n’aient plus aucune confiance en leurs forces de sécurité et se soumettent ainsi à leur diktat.

Les actions offensives menées par des groupes jihadistes ne se contentent plus de la zone sahélienne mais s’étendent désormais vers le Golfe de Guinée inquiétant au plus haut point les autorités du Bénin, du Togo et de Côte d’Ivoire, pays qui craignent d’être touchés dans un proche avenir.

Le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian doit se rendre cette semaine au Burkina Faso pour assurer le gouvernement du soutien de la France. Mais il est possible que les Groupes armés terroristes (GAT) profitent de la crise politico-militaire qui a actuellement lieu entre Paris et Bamako pour déclencher de nouvelles opérations offensives partout où ils le peuvent. La situation est propice à un déchaînement de violences…

Et au Nigeria…

Le 3 juin, 66 nigérians ont été tués dans des attaques par des hommes armés se déplaçant à moto de huit villages situés dans l’État de Kebbi au nord-ouest du Nigeria. Ces « bandits » comme les désignent les autorités ont leur repaire dans la forêt de Rugu qui jouxte les États de Zamfara, Katsina, Kaduna et Niger. Ce sont eux qui seraient les responsables d’enlèvements de masse d’écoliers. Aucun lien n’est encore fait par les autorités avec les jihadistes de Boko Haram ou de la Wilayat de l’Afrique de l’Ouest (ISWA)…

1 – Formés en 2019, les miliciens ne reçoivent qu’une instruction militaire que de deux semaines et sont très mal équipés.

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Texte

Alain Rodier

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