Depuis le 9 juillet, l’Afrique du Sud est confrontée à de violentes émeutes qui s’étendent progressivement dans le pays. Des dizaines de personnes ont trouvé la mort et plus d’un millier ont été arrêtées.

Les forces de sécurité débordées sont obligées de faire appel aux sociétés de sécurité privées et à l’armée pour tenir le terrain. Le prétexte qui a mis le feu aux poudres est l’incarcération le 9 juillet de l’ancien président sud-africain (2009-2018) Jacob Zuma condamné à quinze mois de prison pour outrage à la justice. Il reste sous le coup de seize chefs d’accusation (sur 18 établis) pour corruption, fraude, trafic d’influence et extorsion du temps où il était vice-président (1999-2005).

Issu de l’ethnie zouloue qui a toujours été très active politiquement, il a été une figure de la lutte anti-apartheid ayant été emprisonné durant dix ans. Il a dirigé le Congrès national africain (ANC). Durant ses deux mandats de président (2009 – 2018), il a été l’objet d’accusations de viol, de scandales de corruption et surtout, il a été rendu responsable de la dégradation économique catastrophique du pays qui a plongé les populations les plus faibles dans la misère.

Sous la pression de ses membres, il a quitté l’ANC fin 2017. Impopulaire et menacé de destitution, il a ensuite démissionné de la présidence de la République en 2018. Toutefois, ses partisans clament qu’il est la victime politique de son successeur Cyril Ramaphosa.

En réalité, on assiste à un débordement de la révolte d’un certain nombre de Sud-africains dans les couches les plus défavorisées qui reprochent aux autorités les inégalités qui persistent 27 ans après la fin de l’apartheid. De plus, les mesures anti-COVID 19 ont exacerbé depuis 2020 la sensibilité des populations soumises à de strictes restrictions économiques et sociales. Par exemple, depuis le début de l’année, le taux de chômage a atteint le niveau record de 32,6%. L’insécurité endémique qui a toujours été une constante en République sud-africaine (RSA) s’est encore accentuée ces derniers mois.

Des heurts très violents ont eu lieu avec la police (le Service de police sud-africain -SAPAS -), débutant depuis la province natale du président Zuma, le KwaZulu-Natal. Misuzulu Sinqobile kaZwelithini, le nouveau roi de la Nation zouloue depuis le printemps 2021 suite au décès de son père a condamné les violences.

Elles se sont étendues jusqu’à la capitale Johannesburg et la province de Gauteng. Le 13 juillet, la foule a pillé et parfois incendié de nombreux magasins dont certains n’ont été sauvés que grâce à l’intervention des sociétés de sécurité privées chargées de les protéger. L’armée a été déployée dans les provinces de Mpumalanga et du Cap où la police était débordée par les manifestants. Les villes de Soweto et de Durban sont aussi gravement impactées. Le 15 juillet, la police décomptait officiellement 72 individus tués (de nombreuses victimes sont mortes lors de mouvements de foules et le bilan pourrait être bien plus grave) et quelques 1.300 interpellés.

En plus des désordres qui s’étendent et de la crise sanitaire qui n’est pas jugulée, les biens alimentaires et de première nécessité (dont les médicaments) risque de venir rapidement à manquer car les chaînes d’approvisionnement sont actuellement très désorganisées.*

L’Afrique du sud qui devait intervenir au Mozambique pour participer au rétablissement de l’ordre dans le nord de ce pays durement frappé par les activistes islamiques radicaux, n’enverra pas le contingent militaire promis car toutes ses forces sont mobilisées pour assurer la stabilité intérieure.

 

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Texte

Alain Rodier

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