La Flotte du Pacifique russe devrait recevoir cet été - sans doute le 31 juillet, le jour de la Marine - le K-329 Belgorod (Projet 09852)(1), le plus imposant submersible à propulsion nucléaire de la planète. Il déplace de 14.700 à 17.000 tonnes en surface et de 24.000 à 30.000 tonnes en plongée. Il sera armé de six systèmes océaniques polyvalents Status-6 « Poséidon » (Kanyon) à propulsion nucléaire. Ces drones sous-marins peuvent théoriquement emporter une charge atomique dont la puissance pourrait être réglées entre 2 et 100 mégatonnes (NdA : ce dernier chiffre est vraisemblablement très exagéré). Ce vecteur pouvant atteindre une vitesse de 100 km/h à une profondeur de 1.000 mètres serait très difficile à intercepter.

Le Belgorod n’est ni un SNLE (sous-marin nucléaire lanceur d’engins) ni un SNA (sous marin nucléaire d’attaque) mais un submersible aux missions spéciales. À cette fin, en plus des armes décrites ci-avant (plus des torpilles classiques) et il peut mettre des drones et un sous-marin de poche aptes à plonger à de grandes profondeurs. Mais il semble qu’aujourd’hui, ce sont ses capacités de frappes stratégiques qui sont surtout mises en avant. Il est facile d’imaginer que ses missiles Poséidon peuvent détruire un porte-aéronefs ennemi et, plus encore, créer un cataclysme destructeur sur une ville côtière. Mais sa mise en œuvre entraînerait quasi-automatiquement une réponse nucléaire.

Lancé le 23 avril 2019, le programme a connu de nombreux retards. Son équipage est de 110 sous-mariniers. Il pourrait atteindre une profondeur de 500 à 520 mètres (contre 300/350 mètres pour les sous-marins existants). Il est équipé de deux réacteurs OK-650M.02 qui lui assurent une puissance totale de 190 MW. C’est à la fois un navire destiné aux opérations spéciales, un navire espion et le vaisseau mère pour le mini sous-marin AS-12 Losharik (projet 10831) destiné à plonger à de grandes profondeurs et craint pour ses possibilités d’action contre les câbles sous-marins. Mis en service en 2003, il a été victime d’un accident le 1er juillet 2019 qui a tué quatorze officiers en mer de Barents. Depuis, ce sous-marin est en complète refonte. Le Belgorod devait être basé à Olenya Bay sur la côte de la mer de Barents situé à une centaine de kilomètres de la frontière norvégienne où il aurait pu agir sur l’espace marin arctique mais sa mission a été changée du fait de l’indisponibilité de longue durée de l’AS-12.

Le Kremlin aurait estimé que sa capacité de frappe stratégique qui allie la plate-forme de lancement constituée par le  Belgorod et le drone Status-6 Poseidon est un argument qui permet d’amplifier les avantages de la mise en œuvre sous-marine de l’arme nucléaire. Si les missiles balistiques ou de croisière peuvent être interceptés, ce n’est pas encore le cas des drones sous-marin… En effet, la furtivité du sous-marin complétée par un vecteur opéré à distance (le drone) semble être pour le moment imparable.

Au moment où la crise provoquée par la situation en Ukraine entre la Russie et l’OTAN (emmené par Washington) atteint son paroxysme, Moscou fait effort sur la zone Pacifique y affectant de plus en plus de bâtiments modernes. Déjà le 21 décembre 2021, le lanceur de missiles stratégiques Knyaz Oleg (Prince Oleg) et le sous marin nucléaire d’attaque Novosibirsk K-560 ont été livrés à la Flotte du Pacifique(2). Cette dernière compte aujourd’hui au moins quatre sous-marins stratégiques, sept d’attaque à propulsion nucléaire et treize à propulsion classique.

En réalité, le président Vladimir Poutine prépare la crise de l’avenir qui aura une toute autre dimension entre la Chine et les États-Unis. Des mesures de resserrement des liens unissant la Russie et la Chine devraient être annoncées lors de la visite que le président russe effectuera à Pékin à l’occasion des Jeux Olympiques de février.

1 – Voir « Russie : essais à la mer du ‘cuirassé’ sous-marin Belgorod K-329 (Projet 09852) » du 12 février 2021

2 – Voir « Russie : deux nouveaux sous-marins pour la Flotte du Pacifique » du 23 décembre 2021.