Le 18 février, la Corée du Nord a procédé à un nouveau tir de missile balistique intercontinental Hwasongpho-15 (Hwasong 15) depuis l’aéroport international de Pyongyang.
Le « Bureau général des missiles » a dirigé l’exercice, auquel a participé la « Première compagnie des héros du drapeau rouge du Bureau général des missiles », spécialisée dans ce type d’armement ICBM. Servant d’exemple aux autres unités chargées de la défense stratégique nord-coréenne, elle a dernièrement mis en œuvre l’ICBM Hwasongpho-17 le 18 novembre 2022.
· L’exercice a été organisé sans préavis sur ordre écrit de tir d’urgence donné le 18 février à 08 H 00 (heure locale) par Kim Jong Un en tant que président de la Commission militaire centrale du Parti du travail de Corée (PTC). Le tir a eu lieu à 17 H 22 avec un angle élevé permettant de tester les performances du vecteur sans lui faire parcourir une trop grande distance. Ainsi, après avoir parcouru une distance horizontale de 989 kilomètres, le missile s’est abimé mer dans la Zone Exclusive Économique du Japon.
· Le vol a duré 1 heure, 6 minutes et 55 secondes. Tiré en chandelle, le Hwasong-15 a atteint l’altitude maximale de 5 768,5 kilomètres. Pour avoir une idée, la deuxième photo montre la trajectoire de la station spatiale internationale ISS (en vert) qui évolue à 408 kilomètres de la surface de la terre. Cela dit, le délai de quasi dix heures entre l’ordre donné et le tir effectif du missile laisse perplexe. Normalement, cela devrait être beaucoup plus rapide sous peine de destruction du lanceur…
Si la trajectoire était normale, le missile pourrait théoriquement parcourir plus de 18.000 kilomètres ce qui mettrait toute la planète à sa portée. Le circonférence du globe est d’environ 40.000 kilomètres. Mais cela dépend de nombreux facteurs dont le poids de la charge emportée.
Des missiles plus évolués de type Hwasong-17 testés le 24 mars et le 18 novembre 2022 sont montés encore plus haut (6.200 kilomètres). Il existe bien une possibilité de stationner en orbite (FOBS) durant un certain temps, ce qui étend le rayon d’action du missile balistique. Cependant, la technique n’a pas été évoquée par la Corée du Nord et rien ne prouve qu’elle la maitrise.
Selon Pyongyang, « la fiabilité du système d’arme testée de manière opérationnelle le 18 février doit être reconfirmée et vérifiée tout en faisant reconnaitre la préparation au combat de la force nucléaire de la RPDC et en prouvant la confiance et la garantie du fonctionnement correct, de la réactivité, de la fiabilité, de l’efficacité et de la capacité de combat des composants de la dissuasion nucléaire d’État ».
Le contexte
Pyongyang a déclaré via la presse : « La Commission militaire centrale de la Corée du Nord a ordonné à toutes les unités de missiles, affectées à une tâche stratégique pour faire face aux circonstances militaires prévalant dans la péninsule coréenne, de maintenir minutieusement leur état de préparation au combat renforcé […] L’exercice de lancement surprise d’ICBM, effectué dans la situation actuelle où les menaces militaires des États-Unis et de la Corée du Sud deviennent sérieuses au point de ne pas pouvoir être négligées, est une preuve réelle des efforts constants de la force nucléaire stratégique de la RPDC pour transformer sa capacité de contre-attaque nucléaire fatale sur les forces hostiles en une capacité irrésistible, ainsi qu’une garantie et une preuve claire de la fiabilité sûre de notre puissante dissuasion nucléaire physique ».
Par ailleurs, ce tir opérationnel d’ICBM Hwasong-15 intervient également peu de temps après que la Corée du Sud a de nouveau estampillé la Corée du Nord d’« ennemi » dans son document de défense biennal.
Il n’en reste pas moins que la Corée du Nord ne semble pas encore posséder toutes les capacités techniques pour maitriser la rentrée du missile soumis à d’énormes contraintes électroniques mais aussi de chaleur et de vibrations dans l’atmosphère tout en garantissant une précision correcte.
En réponse, l’armée sud-coréenne a dit le lendemain avoir organisé des manœuvres aériennes conjointes avec les États-Unis, mobilisant des avions furtifs et au moins un bombardier américain stratégique B-1B.
L’agressivité accrue de Pyongyang pourrait être le signe d’une aggravation de la situation intérieure. En effet, le pays pourrait être confronté à de graves pénuries alimentaires après plusieurs années d’isolement décidées par les pays occidentaux.
En conclusion, la Corée du Nord a fait d’énormes progrès en matière balistiques au détriment de la survie de sa population. Le régime de Kim Jung Un ne veut pas suivre l’exemple du colonel Kadhafi qui a été neutralisé par les Occidentaux avec une approbation tacite du Conseil de sécurité de l’ONU (Moscou et Pékin ont regretté après coup leur « abstention »). Sa seule survie repose sur une force nucléaire assez dissuasive pour empêcher une opération du même type. La conséquence est que Washington qui compte enrayer la politique invasive de Pékin a un adversaire supplémentaire de plus en plus performant sur zone.
DERNIÈRE MINUTE
L’état-major interarmées sud-coréen a déclaré ce lundi 20 février « La Corée du Nord a tiré un missile balistique non identifié vers (la) mer de l’Est » en référence au nom donné à la mer du Japon. Le lancement aurait eu lieu à 07 H 00 (heure locale) et l’apogée atteinte aurait été moindre que lors du tir du 18 février.
Kim Yo Jong, la sœur du dirigeant Kim Jong a affirmé a prévenu que Pyongyang continuerait à surveiller les initiatives de Washington et de Séoul pour déployer davantage de moyens stratégiques américains dans la région, promettant de prendre des « contre-mesures correspondantes » à toute menace perçue. Elle a ajouté : « la fréquence d’utilisation du Pacifique comme champ de tir dépend du type d’action des forces américaines » ».
Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres a condamné dimanche par la voix de Stéphane Dujarric, son porte-parole le premier lancement : « le secrétaire général condamne fermement le lancement, à nouveau, d’un missile balistique de portée intercontinentale par la République populaire démocratique de Corée ». Le deuxième va provoquer une réunion du Conseil de sécurité de l’ONU mardi 21 février.
1. 1. Voir : « CORÉE DU NORD : tirs rapprochés de huit missiles balistiques » du 7 juin 2022.
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