Alberto Geddis Martinez alias Alpo Martinez, un ancien important boss du trafic de drogue entre New York et Washington qui avait son territoire à Harlem a été assassiné par balles vers 03 h 20 le matin du 31 octobre alors qu’il sortait d’une soirée Halloween dans son quartier natal.

Né le 8 juin 1966 à Harlem-Est et d’origine portoricaine, son passé de truand dans les années 1980 (et celui de ses complices Rich Porter[1] et Azie Faison[2]) avait inspiré le film « Paid in full » (2002) mais aussi de nombreux rappeurs américains à succès.

Il avait été arrêté le 6 novembre 1991 et condamné à 35 années d’emprisonnement pour trafic de drogue, meurtres et complot en vue de commettre des meurtres (14 chefs d’inculpation pour meurtres). Gangster ultra violent, qui avait commencé sa carrière à l’âge de 13 ans, il aurait été l’exécuteur d’une dizaine d’assassinats dont celui de son partenaire Rich Porter.

Pouvant être condamné à la peine capitale ou, si son avocat était convainquant, à la prison à vie sans espoir de liberté sur parole, il avait accepté de devenir un « collaborateur de justice » en témoignant contre les criminels de sa propre organisation. Son témoignage avait conduit un de ses proches à être condamné à cinq fois la perpétuité sans libération possible et un autre à 35 ans d’incarcération. Sa coopération efficace a fait qu’il n’a purgé que 25 ans de sa peine, sortant du pénitencier de haute sécurité «supermax Florence » (surnommé l’« Alcatraz des Rocheuses ») au Colorado en 2015. Étant placé sous le régime d’un programme de protection des témoins, il avait changé d’identité (ce qui a posé des problèmes d’identification de sa dépouille par la police au moment de son assassinat). Toutefois, vraisemblablement trop sûr de lui, il était revenu à Harlem en 2017…

C’est à la sortie de la fête qu’il a pris le volant de son SUV Dodge Ram 2017. Il a été atteint par de nombreux projectiles tirés depuis un autre véhicule. Il est toutefois parvenu à conduire son SUV sur quelques centaines de mètres avant de s’encastrer dans une voiture garée. Il est décédé lors de son arrivée à l’hôpital de Harlem.

La protection des témoins est une véritable institution dans de nombreux pays dont les États-Unis, le Canada, l’Italie et la France. Elle est très efficace au moment du procès où le collaborateur de justice est appelé à témoigner, en prison lorsqu’il purge sa peine (il est éloigné de tout ce qui pourrait constituer une danger pour sa sécurité) mais elle peut se relâcher avec le temps.
Il est proposé au témoin de changer d’identité pour lui et pour les membres de sa famille proche, et surtout, de trouver un autre lieu de résidence pour se faire oublier. Dans le cas présent, l’erreur fatale semble être venue de l’intéressé qui savait bien que de nombreuses personnes lui en voulaient à mort. Pire encore, il n’est pas impossible qu’il ait été assassiné par des personnes qui n’avaient jamais eu affaire directement à lui mais, qui par cet acte de vengeance (qu’ils qualifient généralement de respect du « code d’honneur »[3]), essayent de se faire un nom dans le monde underground new-yorkais.

1. Qu’il aurait personnellement assassiné en 1990 (ainsi qu’au moins deux membres de sa famille dont un garçon de 12 ans).
2. Il s’est retiré des affaires en 1988 et depuis il tente d’empêcher les jeunes de Harlem de rejoindre des gangs.

Publié le

Texte

Alain Rodier

Photos

DR