Les drones aériens et navals d’attaque révolutionnent l’Art de la guerre. Avec des armes relativement bon marché et sans risque pour les servants, ils représentent « la menace » la plus destructrice pour des armements sophistiqués très coûteux pour leur part : véhicules terrestres, aéronefs au sol, navires de surface, etc. La leçon avait commencée à être donnée en Syrie puis en Libye par des drones de fabrication turque. Elle s’est poursuivie lors du conflit arméno-azéri toujours par des drones turcs mais aussi de facture israélienne. Enfin, leur présence est aujourd’hui omniprésente dans les guerres d’Ukraine, de la bande de Gaza et au nord d’Israël.

Mais pour que leur emploi soit particulièrement efficace, il est préférable de les utiliser en meute pour saturer les défenses adverses.

Et là se pose le problème de la production en masse de ces armes.

La Russie utilise depuis octobre 2022 des drones iraniens Shahed-131 et 136 dans son « opération spéciale » déclenchée contre l’Ukraine. Une grande partie de ces munitions a d’abord été exporté d’Iran mais cela s’est révélé insuffisant.

Photographies montrant l’emplacement des composants du Shahed-131. (Janes)

Aujourd’hui, la Russie a développé sa propre ligne de production de drones sur une base de modèle iranien baptisés Geran-2 (géranium).

Ces drones comportent des stabilisateurs verticaux qui s’étendent au-dessus et au dessous des extrémités de l’aile et sont globalement plus grands que le Shahed-131 similaire (sur lequel les stabilisateurs ne s’étendent pas sous les extrémités.)

Les deux types (131 et 136) provenant des usines iraniennes ont été utilisés par la Russie dans sa guerre en Ukraine, mais l’effort de production de Moscou semble, pour l’instant, se concentrer sur un dérivé du modèle Shahed-136, qui a une portée de plus de 1.600 kilomètres.

Deux couleurs différentes de cellules de drones ont été vues, certaines en gris clair et d’autres dans un ton gris foncé.

Cette dernière couleur est considérée comme destinée pour les opérations de nuit.

Cependant, les « Shahed de nuit » russes pourraient utiliser un revêtement destiné à diminuer leur signature radar.

La production russe ferait appel à une structure composite différente de l’iranienne qui aide probablement à la production de masse tout en améliorant encore la discrétion de l’engin.

Pour répondre à ses besoins, Moscou a mis en place une usine d’assemblage de drones à proximité de la vile de Yelabuga au Tatarstan en 2023. Cette dernière utilisait initialement exclusivement des composants iraniens.

Alabuga qui abrite cette unité de production est une zone économique spéciale de 20 km2 située à dix kilomètres de Yelabuga, a commencé par assembler des drones dont les différentes pièces étaient fournies par l’Iran à partir d’avril 2023. Au cours de la seconde moitié de 2023, Alabuga a établi des chaines de production pour les composants internes sur place.

Au début 2024, le complexe d’Alabuga était à même de fabriquer des composants majeurs supplémentaires, y compris des pièces internes telles que des modules de navigation, des systèmes anti-brouillage, les moteurs, etc. .

À ce stade, la production mensuelle de drones a été portée à 226 unités par mois. L’objectif est d’atteindre 6.000 drones produits en septembre 2025.

Ci-après la chronologie de la production prévue à Alabuga et le nombre total de drones fournis à l’armée russe depuis le début de 2023.

Nombre cumulé de drones Shahed-136/Geran-2 prévus en vertu du contrat signé avec le ministère russe de la Défense. Cette entreprise est une société par actions avec 66% pour la Russie et 34% pour la république du Tatarstan.

 

Au début 2024 la Russie aurait commencé à utiliser des drones à turboréacteur Shahed-238. Ce dérivé du Shahed-136 a une vitesse beaucoup plus élevée (500 km/h contre 180 km/h) qui le rend plus difficile à contrer.

Toutefois, les gaz d’échappement lui donnent une plus grande signature infrarouge qui peut permettre son interception par des missiles à tête chercheuse IR.

Le groupe motopropulseur différent augmente aussi considérablement le coût par rapport au Shahed-136 mais il est toujours moins cher que les missiles de croisière traditionnels et que les missiles sol-air (SAM) qui seraient tirés contre lui.

Enfin, sa portée pourrait être réduite.

Bien qu’il ne soit pas clair si l’épave récupérée et présentée par Kiev était vraiment un Shahed-238 ou un dérivé de celui-ci, il est possible qu’une production russe d’un drone Shahed à réaction soit à l’ordre du jour.

Les forces russes en Ukraine semblent maintenant utiliser des drones tueurs contrôlés via une ligne de fibre optique filaire. Cette configuration offre une méthode de contrôle qui est à l’abri de la guerre électronique mais qui impose également certaines limitations à la manière dont le système peut être utilisé.

Une vue du drone avec la ligne de contrôle apparente de la fibre optique récupéré en Ukraine.

La bobine de ligne à fibre optique ferait 10,813 kilomètres de câble. Une extrémité de la ligne était liée à la section de contrôle principale du drone.

 

Il convient de ne pas oublier les munitions rodeuses Lancet 1 & 3 (charge utile de 1 & 3 kilos, portée de 40 et 70 kilomètres.)

La défense anti-drones

 

Parmi les mesures que l’Ukraine a déjà prises pour faire face à la menace représentée par les Shahed figurent les équipes de chasse aux drones équipées de projecteurs et de mitrailleuses lourdes. Les équipes de ce type sont spécialement formées et équipées pour faire face aux « petites » menaces aériennes à basse altitude qui peuvent être en nombre important.

 

Des exemples de solutions plus avancées incluent le système de contre-drone VAMPIRE (Vehicle Agnostic Modular Palletized ISR Rocket Equipment) fourni par les États-Unis, qui utilise des roquettes de 70 mm à guidage laser.

 

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Texte

ALain Rodier