Moscou a annoncé le 24 septembre le remplacement de son responsable militaire chargé de la logistique au moment du début de la campagne de mobilisation : « Le général d'armée Dmitri Boulgakov (67 ans, à droite sur la photo) a été relevé de ses fonctions de vice-ministre de la Défense de la Fédération de Russie en raison de son transfert vers un autre poste » a déclaré le ministère de la Défense dans un communiqué, sans donner de plus de précisions.

Il est remplacé par le colonel général Mikhaïl Mizintsev (60 ans, à gauche sur la photo) qui dirigeait jusque-là le Centre de contrôle de la défense nationale. Il sera désormais vice-ministre de la Défense « responsable du ravitaillement matériel et technique des forces armées ».

Mikhaïl Mizintsev a occupé de nombreux postes à responsabilité au sein de l’état-major au cours de sa longue carrière militaire. Il est visé par des sanctions occidentales pour son rôle opérationnel lors du siège de Marioupol, une ville portuaire du sud-est de l’Ukraine conquise en mai par les forces russes au prix d’importantes destructions. La propagande ukrainienne le surnomme : le « boucher de Marioupol ». Il a servi en Syrie où il aurait participé à la fin de la bataille d’Alep en 2016 au cours de laquelle 26.000 syriens auraient été tués.

Ce changement au sein de l’état-major intervient alors que le président Poutine a fait décréter la « mobilisation partielle » qui concernerait 300.000 Russes afin de renforcer l’« opération spéciale » en Ukraine.
Cette mobilisation est délicate à réaliser car il convient de convoquer des réservistes aux quatre coins de la Russie, de les acheminer vers des centres d’entraînement où ils doivent être équipés, puis de les intégrer dans des unités se trouvant au front.

Or l’intervention militaire en Ukraine a mis en lumière d’énormes difficultés logistiques, les observateurs mettant en avant ces carences comme l’une des raisons expliquant les difficultés rencontrées par les troupes russes dès le début de l’offensive (la seconde serait imputée aux services de renseignements russes qui ont été déficients).
D’ailleurs, la Russie aurait été obligée d’acheter des drones en Iran(1) et des munitions en Corée du Nord(2).

Des vidéos circulent montrant des réservistes qui viennent de toucher de vieux fusils AK-47 tellement rouillés qu’ils sont irrécupérables…

Afin de faciliter la mobilisation, Poutine a signé le 24 septembre des amendements prévoyant jusqu’à 10 ans de prison pour les militaires qui refusent de combattre en période de mobilisation mais aussi pour ceux qui se rendent à l’ennemi. Cette deuxième mesure n’est pas faite pour encourager les réservistes à rejoindre les bureaux de mobilisation.

Il a également signé une loi qui facilite l’accès à la nationalité russe pour les étrangers s’engageant dans l’armée. Selon cette loi, les étrangers qui rejoignent l’armée pour une durée d’au moins un an pourront demander la nationalité, sans avoir à justifier des cinq ans de résidence sur le territoire russe comme cela est demandé.

Cette mesure semble s’adresser en premier lieu aux immigrés issus des ex-républiques soviétiques d’Asie centrale, Cela vient contrebalancer l’interdiction émise par les gouvernants de ces pays indépendants à leurs citoyens de servir dans une armée étrangère (la peine encourue est alors de dix ans de prison). La solde mensuelle promise de l’équivalent de 900 $ est aussi attractive pour ces immigrés qui font les métiers les plus pénibles et les moins bien payés.

Enfin, fort mécontent de la manière dont ses généraux mènent l’« opération spéciale », il interviendrait maintenant directement dans la conduite des opérations.

1. Voir « Des drone iraniens pour la Russie? » du 12 juillet 2022.
2. Voir : « Corée du Nord – Russie. Achat de munitions. » du 8 septembre 2022

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Texte

Alain Rodier

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