À peine des forces américaines ont-elles commencé à entamer leur retrait d’Afghanistan que les taliban ont lancé une première grande offensive.

Ils avaient prévenu qu’ils exigeaient le départ de toutes les forces étrangères (Américains et OTAN) pour le 1e mai sous peine que la (très relative) trêve décrétée le 29 février 2020 lors des négociations s’étant tenues à Doha au Qatar(1) serait rompue. Le président Joe Biden arrivé à la Maison-Blanche en janvier 2021 s’est engagé à ce que tous les militaires US aient quitté le sol afghan pour le 11 septembre (20e anniversaire des attentats d’Al-Qaida aux États-Unis menés depuis l’Afghanistan où les taliban étaient au pouvoir). Washington a précisé que deux à six pour cent du retrait était achevé au début du mois de mai. Par mesure de protection, de nombreuses forces américaines ont été déployées en et autour d’Afghanistan afin que le repli se fasse en bon ordre et sans trop de casse. Même deux B-52 sont arrivés au Qatar et, pour une fois, cela ne semble rien à avoir avec l’Iran !
Un regain de violence en Afghanistan avait déjà été constaté au cours des deux dernières semaines depuis les annonces du président démocrate. Très récemment, une voiture piégée a explosé dans la province de Logar tuant près de 30 personnes le 30 avril. Le 2 mai, au moins sept soldats afghans ont trouvé la mort lorsque les taliban ont déclenché des explosifs bourrés dans une sape que le groupe avait creusé sous un poste de l’armée dans le sud-ouest de la province de Farah.

Alors que le 1er mai, une unité de Marines venait de passer le flambeau aux forces afghanes dans le camp « New Antonik » situé dans la province d’Helmand (sud-ouest de l’Afghanistan), ces dernières ont eu à faire face dès le 3 mai à une offensive de grande ampleur dans cette même province et en particulier dans les faubourgs de la province régionale, Lashkar Gah. Attaullah Afghan, le gouverneur provincial d’Helmand a déclaré que les insurgés avaient lancé cette offensive depuis de multiples directions attaquant différents postes de contrôle situés autour de la ville. Certains seraient même tombés. L’aviation gouvernementale serait intervenue et des commandos d’élite ont été dépêchés sur place mais des centaines d’habitants ont été contraints de fuir leurs maisons.
Le ministère afghan de la Défense a précisé que depuis 24 heures, ses forces de sécurité avaient également été attaquées dans au moins six autres provinces, dont le sud-est de Ghazni et le sud de Kandahar.

Ce que craignaient tous les observateurs a débuté. Les taliban passent à l’offensive alors même que les forces américaines et de l’OTAN sont encore présentes dans le pays. Ils prennent un risque car le président Biden pourrait changer d’avis suivant les conseils de ses généraux. Leur objectif est de démoraliser les forces de sécurité afghanes de manière à ce qu’elles se disloquent peu à peu (le taux de désertion est déjà très élevé, particulièrement dans la police). La rumeur dit que les dirigeants politiques auraient déjà leurs positions de repli assurées dans des émirats du Golfe persique. Pour mémoire, il avait fallu deux ans pour les insurgés afghans pour prendre Kaboul après le départ des Soviétiques en 1989.

1. Voir mon article du 3 mars 2020 sur raids.fr : « les Américains ont finalisé un accord avec les taliban le 29 février ».

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Texte

Alain Rodier

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