L’étendue des réseaux tissés par les services secrets chinois pour permettre à Pékin de rattraper son retard scientifique reste pour l’heure une inconnue. Fin 2018, les entreprises et universités françaises avaient été sensibilisées par les services dans ce domaine. Il faut reconnaître qu’ils ont été directement impactés par des affaires toujours en cours.
De son côté, Washington a ouvert plus de 180 enquêtes concernant des Chinois travaillant au sein de laboratoires de recherches médicales soupçonnés recueillir des informations pour le compte de Pékin. Des dizaines de cas vont donner lieu à des poursuites judiciaires et une douzaine de scientifiques chinois ont déjà été licenciés. Le directeur du FBI, Christopher Wray, a déclaré lors d’une audition au Sénat en juillet 2019 que la Chine tentait de « forcer le passage vers le haut de l’échelle économique à nos dépens. » Le Sénat US a publié en novembre 2019 un rapport en intitulé « Menaces pesant sur la recherche américaine : plans chinois de recrutement de talents. » Ce document démontre que les autorités américaines n’ont pas réussi à empêcher les activités d’espionnage chinoises. Pékin aurait recruté de nombreux chercheurs basés aux États-Unis dans les secteurs public et privé pour obtenir des renseignements en échange de compensations financières ou autres.
Selon le Sénat, les agences fédérales doivent désormais élaborer une stratégie globale de lutte contre les transferts illégaux de propriété intellectuelle. Il préconise aussi une plus grande coopération entre les organismes fédéraux chargés de l’application des lois, les services de renseignements et la recherche américaine pour s’assurer que ses acteurs sont bien sensibilisés. Enfin, le rapport estime que les autorités fédérales doivent être en mesure d’identifier les entités implantées aux États-Unis qui servent de réseaux de recrutement.
Au moment même de l’annonce d’une trêve dans la guerre commerciale que se livrent Washington et Pékin (le 13 décembre 2019), les États-Unis ont expulsé deux diplomates chinois qui auraient tenté de pénétrer en septembre dans une « installation sensible » près de Norfolk. C’est une première depuis 30 ans ! Le contentieux avec la Chine est profond : accusation d’espionnage visant la société de téléphonie Huawei, situation à Hong Kong, problème de la minorité musulmane ouïgour, contrôle des voies de navigation du Pacifique Sud, etc. À l’évidence, aujourd’hui l’adversaire numéro un des États-Unis est bien la Chine.

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Alain RODIER

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