La Chine se sent de plus en plus menacée par les salafistes-djihadistes. L’attitude répressive adoptée depuis des années vis-à-vis des populations ouïghoures et musulmanes qui vivent dans la région autonome du Xinjiang, au nord-ouest du pays, est ouvertement reprise par Al-Qaïda et Daech pour attirer la vindicte sur Pékin. Il est vrai que, depuis la création de cette région autonome en 1955, des séparatistes ouïghours (au départ, il n’était pas question de religion) ont mené des attaques contre le régime : émeutes, assassinats, sabotages à l’explosif, etc. Le Mouvement islamique du Turkestan oriental (ETIM en anglais, ses origines sous d’autres sigles remontant aux années 1940…), aujourd’hui connu comme le Parti islamique du Turkestan (PIT), est pointé du doigt. Cette organisation reconnue comme terroriste par la majorité de la communauté internationale appelle à la création d’un Turkestan oriental qui regrouperait une partie de la Turquie, le Kazakhstan, la Kirghizie, l’Ouzbékistan, l’Afghanistan et le Xinjiang. Toutefois, la plupart des activistes ont rejoint d’autres groupes islamistes radicaux comme les talibans en Afghanistan, le Hayat Tahrir al-Cham (HTC) en Syrie et le Mouvement islamique d’Ouzbékistan (MIO) en Asie centrale. Apparu ouvertement à la fin des années 1990, le PIT a d’abord été présent en zone AfPak, avant de migrer vers la Syrie où il compterait quelque 3 000 activistes.

En mars 2019, son émir Abdul Haq al-Turkistani a appelé les musulmans à défendre la cause ouïghoure. Son appel a été repris par des dignitaires et des proches d’Al-Qaïda, ce qui n’est pas étonnant car il fut lui-même membre de ce mouvement. Début avril, Al-Qaïda a exprimé sa solidarité avec les Ouïghours, appelant les musulmans à dénoncer les atrocités commises par Pékin et à financer le PIT par tous les moyens possibles. Dès 2014, Al-Qaïda avait défini son objectif à long terme : « La Palestine et les autres terres d’islam occupées de l’Espagne au Turkestan oriental devront être récupérées. »

Al-Baghdadi s’est intéressé à cette cause dès 2014, dans le but de recruter des combattants ouïghours. Ce qu’il a réussi à faire puisque, en 2017, une vidéo montrait des combattants chinois dans l’ouest de l’Irak. Ils souhaitaient rentrer au pays pour « répandre des rivières de sang et venger les opprimés ». En février 2019, Daech demandait aux djihadistes de par le monde de tuer ou capturer des Chinois afin de provoquer la terreur au sein des expatriés. Les activistes étaient invités à « préparer une longue guerre contre la Chine ». Les récentes déclarations des deux mouvements terroristes sont destinées à pousser le djihad vers l’Asie et y recruter de nouveaux activistes.

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Texte

Alain Rodier

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