Le Président Vladimir Poutine a annoncé que les premiers missiles stratégiques Sarmat seraient déployés avant la fin de l’année.

Les forces stratégiques de missiles russes avaient procédé à la mi-avril au premier essai du RS-28 Sarmat (RS-SS-X-29), un missile balistique intercontinental (18.000 kilomètres de portée) de trois étages à carburant liquide dont le programme a débuté en 2011.

Ce missile pourrait emporter différentes têtes nucléaires (jusqu’à 15 ogives mirvées(1) de 400 kilotonnes chacune mais aussi des leurres ) ou le « planeur » hypersonique (hypersonic boost-glide vehicle -HGV-) « Avangard ». Cette arme nouvelle qui pourrait évoluer à plus de Mach 20 (25.000 kilomètre/heure) tout en ayant une trajectoire (qui peut être modifiée ) plus basse que des MIRV est théoriquement non interceptable. Elle équipe certains SS-19 Stiletto (UR-100N) qui doivent être retirés du service dans l’avenir. 40 missiles SS-19 seraient toujours en alerte opérationnelle sur le site de Tatischevo. L’Avanguard peut emporter une charge classique(2) ou nucléaire (dont la puissance peut dépasser les deux mégatonnes).

Le Sarmat va remplacer progressivement les ICBM RS-20 (RS-SS-18 Satan) dont la première version a été déployée en 1967. Les Occidentaux estiment que la Russie possède encore 40 silos opérationnels pour SS-18 dont les derniers sont entrés en service en 1988. Le programme a pris des années de retards en raison de problèmes techniques et humains dans les bureaux d’études. Initialement, le Sarmat devait être déployé à partir de 2018.

C’est la 62ème Division de missiles d’Uzhur qui devrait commencer à en être armée. Le 302ème régiment de missiles (la Division en compte quatre) devrait en être équipé le premier.
À cette fin, d’importants travaux d’infrastructures ont été lancés en 2021. Cela dit, comme le Sarmat est un peu plus court et a le même diamètre que le SS-18, le réaménagement des silos ne devrait pas être trop complexe à réaliser.

Selon l’association Arms Control, la Russie possèderait 6.255 têtes nucléaires dont plus de 3.000 en réserve et les États-Unis 5.500. Les progrès technologiques sont importants dans les deux camps, l’objectif étant de parvenir à percer les défenses adverses qui, elles aussi ont été considérablement améliorées. C’est le principe ancestral du « glaive et de la cuirasse ».

Mais personne ne se fait d’illusions : en cas de guerre totale (la « haute intensité » sera alors largement dépassée), des dizaines de millions de morts seront à décompter dans les deux camps dans la mesure où il y aura encore quelqu’un pour le faire. C’est théoriquement pour cette raison que la guerre nucléaire totale ne devrait pas avoir lieu. Cette politique de dissuasion perdure depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Elle a permis d’empêcher le déclenchement d’un conflit majeur jusqu’au 24 février 2022. Il faut espérer qu’elle va continuer à jouer.

1. Tiré de l’anglais : Multiple Independently targeted Reentry Vehicle.
2. Cela permet de ne pas franchir seuil nucléaire. Sa précision et la possibilité de guidage en font la menace numéro un des porte-avions. Son poids et sa vitesse font que le pouvoir destructeur de cette arme est équivalent à une charge de 17,5 tonnes de TNT.

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Alain Rodier

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