Heureusement, la menace terroriste islamique très active durant le ramadan(1) n’a pas été suivie d’actions spectaculaires en Occident(2), les violences ont rudement frappé des théâtres d’opération habituels des jihadistes avec l’ouverture d’un nouveau front jusque-là épargné, le Togo. Toutefois, une vidéo en français a été diffusée par l’« agence de presse » Furat montrant un activiste islamique entouré de deux complices lourdement armés faisant allégeance au nouveau calife Abou al-Hassan al-Hachimi al-Qourachi et menaçant directement « les mécréants, les Occidentaux, les juifs et les hypocrates (sic) ».

Cette vidéo non datée mais récente puisqu’elle cite le nouveau calife de Daech Abou al-Hassan al-Hachimi al-Qourachi (sa nomination a été annoncée le 10 mars 2022) est inquiétante à plusieurs titres.
. Le locuteur s’exprime avec un phrasé communément employé dans les banlieues françaises.
. Le texte reprend les éléments de langage habituels des salafistes-jihadistes généralement dictés par les comités religieux des salafistes-jihadistes.
. La bannière au premier plan est celle de l’ « État Islamique ».
. Les deux complices sont armés de fusils d’assaut courts de type AKS et au moins l’un d’une arme de poing à grande capacité.
Cette vidéo peut très bien avoir été tournée en Europe (comme ailleurs) mais ne fait partie que d’un document plus long (en anglais) où la Province d’Afrique de l’Ouest de l’État Islamique (IS-WAP) est citée.

Si l’Occident a eu la chance de ne pas être touché par le terrorisme d’origine islamique, ce n’est pas le cas du Togo et c’est une « première » (bien que les actions décrites ci-après ont eu lieu après la fin du ramadan qui avait été fixée au 1er mai).

Ainsi, le 11 mai, au moins huit militaires ont trouvé la mort et 13 autres ont été blessés lors d’une attaque dans le nord du Togo. Lomé indique que c’est un poste de sécurité avancé dans la préfecture de Kpendjal, près de la frontière du Burkina Faso, qui a été attaqué. C’est la première fois qu’une attaque d’une telle envergure frappe le Togo. Cela confirme la volonté de Daech de progresser vers le sud avec comme objectif d’atteindre le golfe de Guinée.

Le même jour, l’attaque contre une station de pompage dans le Sinaï a tué onze militaires égyptiens et en a blessé cinq autres. Elle a été revendiquée par le groupe État Islamique…
Le 14 mai, Daech a de nouveau réclamé une action menée contre les « milices mossadiques apostates [milices tribales que les jihadistes accusent de travailler pour le Mossad] » dans le village d’al-Moukat’a au Sinaï (deux morts, trois blessés) qui l’a opposé aux milices locales.

Au Burkina Faso, une quarantaine de supplétifs de l’armée et des civils ont trouvé la mort le 14 mai lors de trois attaques menées par des jihadistes dans le nord et l’Est du pays. L’attaque la plus violente a visé les Volontaires pour la défense de la patrie (VDP, supplétifs de l’armée) de la commune de Guessel dans la région Nord tuant « une vingtaine de personnes, dont huit VDP ». Cinq autres supplétifs et un civil ont été tués à Markoye dans la même zone. Selon une source gouvernementale : « un convoi de civils escorté par des supplétifs de l’armée a été visé par une attaque à Namouyouri […] une quinzaine de civils ont été tués » (dans la province de la Kompienga au Sud-Est du pays). Trois supplétifs auraient aussi été tués et une dizaine de personnes blessées lors de cette même action. Dans la nuit qui a suivi, une autre attaque simultanée contre les postes de gendarmerie et de police de Faramana près de la frontière malienne a fait deux blessés parmi les forces de l’ordre.
Le Burkina Faso est la victime d’attaques terroristes de groupes affiliés à Al-Qaida et à Daech depuis 2015. Elles ont causé la mort de 2 000 personnes et en ont déplacé un peu moins de deux millions.
Après la prise du pouvoir par le lieutenant-colonel Paul-Henti Sandaogo Damiba le 24 janvier (qui a renversé le président Roch Marc Christian Kaboré), les violences ont repris l’obligeant de faire de la lutte anti-terroriste sa priorité.

Le 12 mai au Pakistan, la mégapole de Karachi a été de nouveau été touchée par un attentat. Il aurait fait au moins un mort et douze blessés. Une moto piégée a explosé vers 23 heures dans un quartier très fréquenté, deux semaines seulement après un attentat suicide qui
avait fait quatre morts dans même ville.

Pour mémoire, le nouveau porte-parole de l’État islamique, Abou-Omar al-Muhajjir, avait appelé à une nouvelle « offensive globale » en riposte à la mort de son calife Abou Ibrahim al-Qurayshi en ces termes(3) : « Combattez-les tous et Allah vous répondra et il les punira par vos mains » en parlant des « États infidèles ». Il avait aussi demandé aux partisans de Daech de reprendre des attaques en Europe, en profitant de « l’opportunité donnée » des « croisés qui se combattent les uns les autres » – en référence à l’invasion russe de l’Ukraine.

1. Voir : « Risque de campagne terroriste durant le Ramadan » du 4 avril 2022.
2. Les États-Unis ont été frappés par des tueries de masse devenue « habituelles » dont certaines étaient à connotation raciste.
3. Voir : « Menaces de Daech sur l’Europe ? » du 20 avril 2022.

Publié le

Texte

Alain Rodier

Photos

DR