Depuis le mois de juin, rien ne va plus entre la France et la Turquie.

Les relations ont commencé à se détériorer, du moins officiellement, quand le ministère des Armées a révélé que le 17 juin la frégate Courbet participant à une mission de l’OTAN en Méditerranée avait fait l’objet de trois « illuminations radar » de la part d’un bâtiment de guerre turc – « un acte extrêmement agressif qui ne peut être l’acte d’un allié vis-à-vis d’un navire de l’OTAN » – alors que le navire de la Royale cherchait à identifier un cargo suspecté de transporter des armements vers la Libye. Et la Présidence française d’appuyer cette révélation en dénonçant l’interventionnisme « inacceptable » d’Ankara dans le conflit libyen 1. Depuis, le ton n’a cessé de monter entre les deux capitales.

Tout s’est accéléré début août après que la Grèce eut signé avec l’Égypte un accord définissant leurs zones économiques exclusives (ZEE) respectives en Méditerranée. La Turquie a immédiatement réagi en lançant une nouvelle campagne de prospection au sud de Chypre, et cela en violation du droit international maritime. De son côté, la Grèce a accusé la Turquie de « menacer la paix » quand cette dernière déploya, autour du navire de prospection, une frégate type Meko, quatre avisos A69 et un sous-marin.

Visiblement, Ankara joue des muscles. D’autant que cette affaire concerne deux pays membres de l’UE ; selon les experts, il n’est pas certain que ces derniers se contentent de paroles. Ces pays peuvent compter sur la France (il y a d’ailleurs un accord de partenariat entre Paris et Athènes). Fort de ce soutien français, le gouvernement grec « n’acceptera aucun chantage et défendra sa souveraineté et ses droits », a déclaré le ministre d’État grec Georgios Gerapetritis. Avant d’ajouter : « La majorité de la flotte est prête à être déployée où ce sera nécessaire ».

La France a décidé, le 13 août, de renforcer temporairement sa présence dans cette zone avec la mise en place en Crète de deux Rafale M de la 4e escadre de chasse, de la frégate La Fayette et du porte-hélicoptères amphibie (PHA) Tonnerre pour assurer « la libre circulation […] en Méditerranée et le respect du droit international ».

Le tout sur fond d’attaques virulentes du président Erdoğan accusant le président Macron de « colonialisme » au Liban. Un conflit ouvert semble peu probable, car la Turquie reste membre de l’OTAN et elle a des devoirs auprès de ses alliés otaniens. Cependant, la Grèce et la République de Chypre pourraient être tentées de porter les premiers coups, avec l’espoir d’entraîner la France dans un conflit de basse intensité.

Mais sommes-nous prêts à une guerre aéronavale contre la Turquie ?
Sachant qu’il ne faudra attendre aucune aide, ni des pays européens ni des États-Unis.

1. La Turquie, avec le Qatar, soutient militairement le gouvernement d’accord national (GNA) face aux forces du maréchal Haftar, lui-même soutenu par
l’Arabie Saoudite, les Émirats arabes unis, la Russie, l’Égypte et la France.

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