Un attentat à la bombe a eu lieu durant la prière du vendredi le 26 décembre à la mosquée chiite « Imam Ali bin Abi talib » fréquentée par les alaouites à Homs en Syrie. Il a fait au moins huit morts et 18 blessés dont certains très gravement. Des explosifs auraient été dissimulés dans des aspirateurs de la mosquée et leur mise en œuvre déclenchée à distance.

Cette action terroriste a été revendiquée par le groupe « Saraya Ansar al-Sunnah », une organisation jihadiste syrienne issue d’une scission avec le Hayat Tahrir Al-Sham (HTS) intervenue officiellement le 1er février 2025.

Depuis sa création, ce groupe a revendiqué de nombreuses opérations violentes dirigées contre des lieux de culte. Il s’agit notamment de la même organisation qui avait revendiqué l’attaque contre l’église grecque orthodoxe Mar Elias à Damas le dimanche 22 juin 2025(1). Elle avait coûté la vie à 25 fidèles chrétiens rassemblés pour l’office et 62 autres avaient été blessés.

Le leader de ce mouvement, Abou Aïcha al-Chami, avait quitté le HTS après l’avoir jugé trop indulgent envers les musulmans chiites et les alaouites (aussi appelés « noseïris » ou « nusayris ») qui pratiquent un islam chiite duodécimain proche du chisme. Depuis, ce groupe s’en prend aux alaouites, aux chiites, aux chrétiens et aux anciens membres des services de sécurité et fonctionnaires ayant servi le régime de Bachar el-Assad.
Il semble que cette formation d’idéologie salafiste-jihadiste est décentralisée en de multiples cellules autonomes qui, toutes, rejettent le « laxisme » du gouvernement de transition d’Ahmed al-Charaa.
L’Institute for study of war (ISW) déclare quant-à lui : « on ignore si le groupe mène lui-même ces attaques ou s’il s’agit de fausses déclarations concernant des incidents sécuritaires. »
Il revendique également sa présence au Liban, en particulier à Tripoli dans le nord du pays menaçant de « frapper les apostats parmi les noseïris (alaouites), les râfidhites (chiites) et les Druzes. »

Cette organisation serait sortie de la clandestinité pour de se démarquer publiquement du régime d’Ahmed al-Charaa qualifié de « tyran indigne de confiance. »
Mais, pour le moment, il ne juge pas nécessaire d’affronter directement les forces de sécurité du régime de transition bien qu’il les désigne comme « apostates. »

En dehors de ses ennemis précédemment évoqués, cette organisation s’en prend aussi aux Forces démocratiques syrienne (FDS) majoritairement composée de kurdes qui tiennent le nord-est de la Syrie avec le soutien des Américains.

Lors des affrontements qui ont opposé la communauté druze à des tribus bédouines puis aux forces de sécurité dans le sud de la Syrie(2), l’organisation a déclaré qu’elle étendrait ses attaques sectaires aux druzes de Souweyda (dont une partie est soutenue par Israël.)

Son objectif déclaré est d’établir un État islamique respectant la charia en Syrie qui exclura les alaouites, les druzes, les chrétiens et les chiites.
Il nie toute coopération avec le groupe État islamique (EI) mais a déclaré que cela « pourrait avoir lieu à l’avenir et sera annoncée le cas échéant. »
Il est fort possible que des groupuscules salafistes-jihadistes agissant dans leur zone d’implantation, particulièrement au centre de la Syrie dans la Badiya, se revendiquent de l’une ou l’autre de ces organisations quand ce n’est pas des deux…

Plus globalement, le régime d’Ahmed al-Charaa ne peut compter que sur les forces résiduelles du HTS – nombre d’activistes lui reprochant son rapprochement avec les Occidentaux – et sur les forces soutenues par la Turquie au nord de la Syrie.
Par contre, ses adversaires, bien qu’éclatés, sont nombreux :

  • les salafistes-jihadistes qui ont fait défection dont le « Saraya Ansar al-Sunnah »;
  • le groupe État islamique toujours présent et qui se renforce en raison de l’arrivée de transfuges ;
  • une partie de la communauté druze soutenue par Israël, pays qui persiste à vouloir contrôler le sud-est du pays pour y chasser le Hezbollah et les Iraniens qui peuvent encore y être – tout en s’opposant à l’avancée turque vers le sud – ;
  • les Iraniens qui ne pardonneront jamais d’avoir été évincés de Syrie par le HTS et qui se battent dans l’ombre pour maintenir en position de force le Hezbollah au Liban ;
  • les FDS qui veulent créer leur propre entité indépendante au « Rojava » à l’est de l’Euphrate pour faire un jour la jonction avec le Kurdistan irakien, ce qui est inacceptable pour Ankara.
  • Et bien sûr se pose la question de le reconstruction du pays et de la remise en place d’une organisation qui permette aux Syriens tout simplement de vivre quand ce n’est pas de survivre…

    Il faut lui souhaiter d’avoir une bonne protection rapprochée car ses ennemis mortels, parfois ses anciens fidèles, ne souhaitent que lui faire payer ses positions politiques.

    (1) Voir : « Attentat antichrétiens à Damas » du 26 juin 2025.

    (2) Voir : « Situation chaotique au sud de la Syrie » du 18 juillet 2025.