En juillet 2025, une information diplomatique circulait autour d'un mémorandum secret qui aurait été signé par l'Arménie (dénie par cette dernière), l'Azerbaïdjan et les États-Unis concernant la location du corridor de Zangezur long de 43 kilomètres entre l'Azerbaïdjan et son enclave de Nakhitchevan, qui traverse l'Arménie dans la région de Syunik.

Dans ce document, une société de gestion américaine pourrait obtenir une licence pour exploiter cette route durant les cent prochaines années. Et pour la sécuriser, les États-Unis, aux côtés de la Turquie, auraient prévu de déployer mille hommes armés appartenant à une société militaire privée. Mais ce corridor se trouve à la frontière nord de l’Iran. Si ce projet se réalise, l’Iran dépendrait alors quasi exclusivement de l’Azerbaïdjan pour son commerce à la fois avec le Caucase du Sud, mais aussi avec la Russie et l’Europe. Pour Téhéran, le coup serait très dur, tant pour sa position géopolitique, avec une influence turque plus grande et une présence directe des États-Unis, qu’économiquement. En effet, le contournement de l’itinéraire iranien via l’Arménie pourrait réduire le rôle de l’Iran dans l’initiative chinoise « Belt and Road », affaiblissant ainsi sa valeur en tant que partenaire de Pékin.

De plus, les options dont dispose l’Iran pour s’opposer à ce projet sont très limitées. Après la série de revers au Proche-Orient (Liban et Syrie) et la « guerre des 12 jours » avec Israël, Téhéran a perdu de son influence dans cette région. D’autant qu’auparavant, l’Iran se contentait de s’en remettre à Moscou sur sa frontière du nord. L’ouverture du corridor de Zangezur serait un événement stratégique majeur. Elle permettrait à la Turquie d’accéder à la côte de la mer Caspienne, relançant ainsi le projet visant à réunir tous les États turcophones sous l’égide d’Ankara.

Pour Washington, c’est une opportunité géopolitique extraordinaire en exploitant le vide politique dans la région, qui coïncide d’ailleurs avec la hausse des tensions sans précédent entre l’Azerbaïdjan et la Russie. Pour certains, les États-Unis se préparent à une future guerre avec l’Iran en utilisant l’Arménie et l’Azerbaïdjan comme base arrière. Pour d’autres, une remise à plat des alliances dans cette région.

Ainsi, d’un simple projet logistique régional, le corridor de Zangezur est devenu un élément clé du paysage géopolitique du Caucase du Sud.

Bonne lecture
Eric Micheletti

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