Les services secrets iraniens (ministère iranien du renseignement – MOIS ou Vaja ex-Vevak, et la force Al-Qods des pasdarans dépendant de l’IRGC-IO / Iranian Republic Guard Corps-Intelligence Organisation) auraient intensifié leurs activités à l’étranger depuis le début de la guerre à Gaza.

Leur mission principale – et traditionnelle depuis la prise de pouvoir par Rouhollah Khomeini en Iran en 1979 – est d’obtenir des informations sur les dissidents et les groupes d’opposition basés à l’étranger afin de les faire taire.

Les pays nordiques ciblés par une recrudescence d’actions clandestines iraniennes.

Le 30 mai, le Service finlandais de sécurité et de renseignement (Supo) a inscrit officiellement l’Iran parmi les pays soupçonnés d’espionnage en Finlande, une désignation auparavant uniquement réservée à la Russie et à la Chine.

Un porte-parole du Supo a averti en mars 2025 que « la menace [des services de renseignement iraniens] a également augmenté dans les pays nordiques », un sentiment qui reflète les inquiétudes exprimées par les autorités suédoises.

À savoir que l’évaluation annuelle des menaces par la police suédoise fait état d’une intensification des efforts de renseignement de la République islamique. Ce rapport souligne la coopération croissante de Téhéran avec les réseaux criminels pour cibler les figures de l’opposition mais également les intérêts israéliens. Ce phénomène n’est pas nouveau, les services iraniens ayant toujours préservé les « intermédiaires » pour ne pas appara^tre en première ligne en cas d’incident(1).

Toujours en mars, le département du Trésor américain a désigné le gang criminel suédois « Foxtrot» comme « organisation criminelle transnationale » (OCT) pour avoir perpétré des attaques contre des Israéliens et des juifs en Europe, vraisemblablement sur commande de Téhéran.

Le chef de « Foxtrot », Rawa Majid, aurait été recruté par le ministère iranien du Renseignement (MOIS) pour attaquer l’ambassade d’Israël à Stockholm en janvier 2024.
D’après des médias suédois, une grenade à main aurait été lancée par-dessus la clôture.
Majid aurait quitté le pays pour rejoindre l’Iran via la Turquie.

L’organisation criminelle rivale de « Foxtrot », le gang « Rumba » dirigée par Ismail Abdo, a tiré au fusil d’assaut sur la même ambassade en mai 2024, sans doute aussi à la demande de Téhéran. Il n’y a pas eu de blessé. On ne sait pas où Abdo se trouve actuellement.

De nouveau le 1er octobre, après qu’une explosion ait été entendue à Stockholm dans le centre de la capitale, la police a rapporté avoir constaté des tirs contre l’ambassade d’Israël. Là encore, aucune victime n’est à déplorer.

Cet incident est survenu alors que deux explosions ont été signalées dans la nuit de 1er au 2 octobre à proximité de l’ambassade d’Israël au Danemark dans la banlieue de Copenhague.

Arrestation d'agents du renseignement du régime iranien au Royaume-Uni

Lors de deux opérations menées début mai 2025, la police antiterroriste britannique a arrêté sept ressortissants iraniens soupçonnés d’avoir préparé une action terroriste au Royaume-Uni. Cette action a été qualifié de « plus importante opération de lutte contre le terrorisme » depuis des années.

Le 17 mai, trois des suspects ont été inculpés avoir ciblé des journalistes basés au Royaume-Uni. Entrés illégalement dans le pays, tous trois ont obtenu un permis de séjour temporaire après avoir demandé l’asile.

Les procureurs allèguent que les hommes se sont livrés à ces agissements dans le but d’aider un service de renseignement étranger (Iran ?).

Selon « The National », les suspects appartiendraient à l’Unité 840, une branche secrète de la force Al-Qods chargée de mener des missions clandestines à l’étranger.

Bien que relativement récente, cette formation 840 aurait mené de nombreuses opérations en Europe, au Moyen-Orient et en Amérique latine, ciblant souvent des dissidents et tentant de déstabiliser des États étrangers.

Elle est dirigée par Yazdan Mir, alias Sardar Bagheri qui aurait comme adjoint Morteza Babaei. Ce dernier serait lié à Syed Faisal Nawaz Jungi, un Indien vivant en Iran, déclaré comme marchand de fruits serait en relations avec le Pakistanais Qari Mohsen Reza qui a été recruté par la Force al-Qods mais arrêté en avril 2023 alors qu’il préparait des attentats contre des cibles occidentales en Grèce.

Jungi s’est récemment rendu en Inde et aurait rencontré des agents indiens afin de mettre place des actions meurtrières contre des cibles israéliennes et juives dans la pays mais aussi en Afrique et au Pakistan. Les agents indiens rencontrés seraient Syed Mohammed Mahdi et Mir Mehdi Ali.

Répression transnationale par le biais de réseaux criminels.

Le 23 mai 2025, le FBI américain a lancé un avis de recherche contre Seyed Yahya Hosseiny Panjaki, un agent des services de renseignement iraniens du ministère de l’Intérieur, pour son implication dans des complots terroristes internationaux et son ciblage de dissidents iraniens via des réseaux liés au ministère de l’Intérieur et au des Corps des Gardiens de la Révolution Islamique (CGRI).

Pandjaki aurait fondé un quartier général du « Martyr Soleimani » au ministère de l’Intérieur, en référence à la promesse du régime de venger l’élimination le 2 janvier 2020 par les États-Unis du général Qassem Soleimani, ancien commandant de la Force al-Qoqs.

Panjaki orchestrerait divers complots en étroite coordination avec le CGRI et se serait rendu avec la Force al-Qods au Liban et en Syrie afin d’harmoniser les relations entre le CGRI et le ministère de l’Intérieur.

Il serait l’officier traitant chargé de diriger son agent Naji Sharifi Zindashti, qui a fomenté des assassinats sur le sol américain en recrutant des membres canadiens des Hells Angels, un gang également utilisé par le CGRI pour commettre des attentats en Allemagne.

Opérations de renseignement de la République islamique contre Israël

Le FBI a également identifié Panjaki comme étant à la fois vice-ministre du renseignement pour les affaires israéliennes et directeur de la Sécurité intérieure au sein du ministère de l’Intérieur, un double rôle. Il dépendrait directement du Guide suprême de la Révolution Ali Khamenei.

Cela reflète la priorité stratégique accordée par Khamenei aux opérations offensives contre l’État hébreu, ce qui a permis d’accroître les ressources financières et humaines dans ce domaine.

Le 20 mai, les autorités israéliennes ont révélé l’arrestation de deux de leurs citoyens accusés d’espionnage pour le compte de l’Iran.

Les suspects ont été recrutés pour de l’argent via un groupe Telegram et sont restés en contact avec des officiers traitants iraniens tout au long de l’année 2024 via une application de messagerie cryptée et un téléphone nouvellement acquis. Ils ont mené des missions de reconnaissance et de collecte d’informations.

Une trentaine d’actes d’accusation ont été instruits en 2024 sur des soupçons de collaboration de citoyens israéliens avec l’Iran. Il s’agit de faits allant de la photographie de sites militaires à la préparation d’assassinat de hauts responsables.

Selon le surintendant de la police israélienne, Maor Goren, responsable du contre-espionnage, ce chiffre est sans précédent. « Au cours des dernières décennies, nous pouvions compter ces cas sur les doigts de deux mains », a estimé Goren.

Toutes ces activités font suite aux critiques de l’Ayatollah Khamenei qui, en 2023, s’était montré très irrité par les piètres résultats obtenus par ses services secrets, souvent par manque de coordination(2).

Pour l’instant, il ne semble pas que les services iraniens aient amélioré leurs résultats.

Non seulement ils ont perdu le contrôle de la Syrie et sont relativement affaiblis au Liban, mais ailleurs, ils n’obtiennent pas de résultats significatifs.
Leur mission essentielle reste la surveillance de la communauté iranienne expatriée et les intérêts israéliens.

Mais il convient de rester prudent : tous les experts ont en mémoire l’assassinat du dernier Premier ministre iranien Chapour Bakhtiar le 6 août 1991 à Suresnes puis les attentats contre les intérêts juifs en Argentine en 1992 et 1994.

(1) Voir : « Liens entre le crime organisé et Téhéran ? » du 31 janvier 2024.

(2) Voir : « Les services secrets iraniens dans la tourmente ? » du 4 juillet 2023.

(3) Voir sur « cf2.org » : « l’assassinat de Chapour Bakhtiar » note historique N°39 / mai 2013.