Un groupe jihadiste a lancé dans la nuit du 27 au 28 octobre une attaque contre une base des Forces de Défense et de Sécurité tchadiennes à Barkaram, une île située à l’ouest de Ngouboua dans le département de Kaya dans la région du lac Tchad causant la mort d’une quarantaine de militaires. Cette région est frontalière avec le Nigeria où sévissent deux grandes mouvances jihadites : Boko Haram et la « province de l’État Islamique en Afrique de l’Ouest » (ISWAP).
Selon des sources citées par l’AFP : « une garnison abritant plus de 200 militaires a été prise pour cible par les éléments de Boko Haram à 22 heures. Les éléments de Boko Haram ont pris le contrôle de cette garnison, récupéré les armes et brûlé des véhicules équipés d’armes lourdes avant de repartir ».
Il y aurait eu 40 tués (dont le commandant de la garnison) et une vingtaine de blessés. En réalité, les pertes pourraient être plus lourdes qu’annoncé.
Cette attaque survient quelques semaines à peine après la fin de l’opération « Lake Sanity » de la Force multinationale mixte dans la région. Cette opération ne paraît pas avoir eu l’effet escompté puisque les jihadistes ont continué de l’écumer en attaquant et en pillant les populations de la région.
Le président Mahamat Idriss Deby Itno accompagné de hauts responsables militaires et de conseillers de sécurité s’est rendu sur place dès le 28 matin et « a donné le coup d’envoi de l’opération Haskanite (un terme en langue locale qui signifie « foudre » ou « réponse éclair ») pour poursuivre et traquer les assaillants jusque dans leurs derniers retranchements ».Cette repose sur une stratégie intensive de traque des insurgés combinant des forces terrestres appuyées par une intervention aérienne afin d’exercer une pression continue sur les assaillants et de perturber toute tentative de repli ou de reconstitution de leurs forces. Selon des sources militaires, le déploiement de troupes supplémentaires dans la région sera maintenu tant que la menace terroriste persistera afin de sécuriser les populations civiles et d’éviter tout risque de représailles.
Dans le cadre de cette mission, des équipes de renseignements tactiques ont été mobilisées pour identifier les points de repli et les circuits logistiques empruntés par les terroristes.
En outre, les forces de défense tchadiennes coopèrent avec des partenaires régionaux au sein de la Force multinationale mixte (MNJTF), qui regroupe des contingents du Nigeria, du Cameroun, du Niger et du Bénin, pour renforcer les capacités de réaction et de riposte coordonnées à la menace transfrontalière que représente Boko Haram.
En outre, le président a tenu « à rassurer les populations de la zone ainsi que les forces de défense et de sécurité, de son engagement indéfectible à défendre et sécuriser l’ensemble du pays ».
Cette attaque et sa contre-offensive sont survenues alors que le chef de l’État vient de restructurer les forces armées après une série de limogeages.
Contexte
Les militaires tchadiens sont fréquemment la cible d’attaques de jihadistes dans la région du Lac Tchad, vaste étendue d’eau et de marécage parsemée d’îlots dans l’Ouest qui abrite des activistes du groupe Boko Haram ou de sa branche dissidente, la Province de l’État Islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP Islamic State West Africa Province).
L’insurrection de Boko Haram est apparue en 2009 au Nigeria – où elle a fait depuis quelque 40.000 morts et plus de deux millions de déplacés – avant de se propager dans les pays voisins.
En mars 2020, ses combattants avaient mené une offensive sanglante sur une importante base tchadienne sur la presqu’île de Bohoma, faisant une centaine morts, les plus lourdes pertes jamais enregistrées par l’armée tchadienne. En réponse, le pouvoir avait déclenché « la colère de Bohoma » une vaste opération contre les jihadistes, à l’époque menée par le maréchal Idriss Deby Itno, le père du président actuel.
En juin 2024, l’Office international pour les migrations (OIM) a enregistré plus de 220.000 déplacés dans la province du lac Tchad en raison des attaques des groupes armés.
Boko Haram aussi appelé « Jama’tu Ahlis Sunna Lidda’awati wal-Jihad » (JAS) a gagné du terrain dans la lutte qui l’oppose dans le nord-est du Nigéria à la Province de l’État Islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP). Au cours de l’année 2023, le JAS s’est emparé de la plupart des îles du lac Tchad que l’ISWAP contrôlait.
De nombreux membres de JAS se sont rendus aux autorités ou ont continué le combat au lieu de rejoindre l’ISWAP après la mort d’Abubakar Shekau, l’émir de Boko Haram en 2021.
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