Le président Vladimir Poutine a menacé le 5 juin, de livrer des armes à des pays tiers susceptibles de frapper les intérêts occidentaux si l'Occident autorisait l'Ukraine à frapper la Russie avec ses missiles de longue portée.

Cela est déjà le cas pour la Biélorussie depuis des années.

De plus, des armes nucléaires seraient maintenant disponibles dans ce pays.

Or la Biélorussie est frontalière avec des pays qu’elle considère comme des « adversaires potentiels » : l’Ukraine, la Pologne et les trois pays baltes, les quatre derniers étant membres de l’OTAN.

Une grande publicité a été faite autour d’une bombe nucléaire tactique qui pourrait être emmenée sous l’avion d’attaque Su-25 Frogfoot en dotation dans l’armée de l’air biélorusse. Des exercices communs auraient d’ailleurs permis de tester la mise en œuvre de ce type de munition.

Le ministère russe de la Défense a publié une vidéo de propagande montrant deux Su-25 biélorusses dans un hangar gardé par des soldats armés. Ces appareils sont lourdement chargés, en particulier d’une paire de réservoirs de carburant extérieurs et surtout, de deux « munitions » dissimulées sous des bâches qui veulent sans doute simuler des bombes nucléaires tactiques d’entraînement.

Il est probable que ce film ait été tourné sur la base aérienne de Lida qui accueille habituellement la flotte biélorusse de Frogfoot.

Vue satellite de la base aérienne de Lida en 2022. Google Earth

Le lieutenant-général Igor Kolesnikov qui commande la 12ème Direction principale du Ministère de la défense (12ème GUMO) créée en 1947, organisme qui a la responsabilité de la conservation, de l’entretien technique, du transport, de la livraison, de la délivrance, de l’élimination en fin de vie, etc. de toutes les armes nucléaire (soviétiques puis russes) mais aussi  de tous les sites de stockage d’armes nucléaires, est venu personnellement assister au premier exercice de ce type en Biélorussie (voir photos).

Les armes dissimulées sous les ailes pourraient être des munitions nucléaires d’entraînement IAB-500 qui présentent des caractéristiques extérieures similaires à celles des bombes à gravité réelles en dotation en Russie.

On sait très peu de choses sur les armes nucléaires tactiques russes emmenées sous aéronefs mais leur conception remonte à la Guerre froide et comprennent des RN-40 et RN-41 qui ont été développées pour armer des Su-30SM, MiG-29, Su-24 et Su-27. Les Su-25 soviétiques sont également censés avoir eu une capacité nucléaire mais il n’est pas certain que cet avion ait jamais été qualifié pour cette mission.

Su-30SM armé d’une bombe à gravité

Alexandre Loukachenko, le président biélorusse avait annoncé en août 2022 que certains des avions de combat de son pays avaient été modifiés pour porter des armes nucléaires. Il est d’ailleurs étonnant que ce soient des Su-25 qui aient été modifiés alors que la Biélorussie possède des chasseurs multirôles Su-30SM beaucoup plus performants qui pourraient recevoir une capacité nucléaire si nécessaire.

Les faibles performances du Su-25 à pleine charge en font une cible relativement facile à abattre pour les armées de l’OTAN.

La raison est peut-être simple, les Russe et les Biélorusses ne croient pas vraiment à l’efficacité de cette composante maintenue uniquement comme un leurre pour surcharger les défenses aériennes de l’Alliance.

Les Biélorusses et Moscou font beaucoup plus confiance au système de missiles sol-sol Iskander-M qui est beaucoup plus souple d’emploi. La rumeur court que des missiles à tête nucléaire seraient arrivés à destination.

La structure de commandement et de contrôle en place autour de n’importe quelle arme nucléaire russe déployée en Biélorussie n’est pas claire non plus. Ces armements sont certainement placés sous le contrôle étroit de Moscou et ne seraient remis aux forces biélorusses que si nécessaire.

C’est de cette manière que procède Washington avec les armes nucléaires de l’OTAN stockées en Europe.

Il n’en reste pas moins que cette nouvelle menace a encouragé la Pologne voisine à demander que des armes nucléaires de l’OTAN soient installées sur son sol…

Enfin, ne pas oublier non plus que Poutine a laissé entendre cette année que le seuil de base pour l’emploi des armes nucléaires tactiques par la Russie pourrait être considérablement plus bas qu’on ne le pense…

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Texte

Alain Rodier