Genaro Garcia Luna, ingénieur en mécanique de formation a été directeur de l'Agence fédérale d’investigation mexicaine de 2001 à 2006 sous le mandat du président Vicente Fox.

Il a ensuite été nommé secrétaire de la Sécurité du Mexique de 2006 à 2012 sous la présidence de Felipe Calderón pour lequel il a lancé la « guerre contre la drogue » qui se poursuit aujourd’hui. Cette dernière aurait fait plus de 250.000 morts auxquels il convient d’ajouter les 90.000 « disparus » et environ deux millions de déplacés. En conclusion, les forces de sécurité ne sont jamais parvenues à endiguer les cartels de la drogue car ces derniers sont très puissants financièrement et corrompent une grande partie de la société.

Plus haut responsable politique mexicain à être jugé par la justice fédérale américaine,
Garcia Luna, avait été arrêté à Dallas le 9 décembre 2019, accusé d’avoir usé de ses fonctions pour couvrir le Cartel de Sinaloa. Très tôt, il avait été mis en case dans de nombreuses affaires au Mexique ne parvenant pas à expliquer son enrichissement personnel très rapide. Mais, il est tout de même resté en fonction jusqu’au 30 novembre 2012 alors qu’Enrique Peňa Nieto était élu nouveau président du Mexique (2012-2018). Ayant perdu le soutien politique avec la fin de la présidence de Calderón, il quitte le Mexique pour s’installer à Miami. Il est recruté par la société de surveillance électronique américaine SecureAlert, Inc. (Utah). Il va jusqu’à demander sa naturalisation américaine en 2018.

Après un procès d’un mois et plusieurs jours de délibération, Garcia Luna a été reconnu coupable le 21 février 2023 de corruption et de trafic de cocaïne entre le Mexique et les États-Unis. Il encoure la réclusion à perpétuité. S’il n’y a pas d’appel, la peine devrait être prononcée fin juin.
Les 12 jurés du tribunal de Brooklyn l’ont jugé coupable des cinq chefs d’accusation dont celui d’avoir touché des millions de dollars pour protéger le cartel de Sinaloa et d’être impliqué dans un trafic d’au moins 53 tonnes de cocaïne du Mexique vers les États-Unis de 2001 à 2012.
Le porte-parole de la présidence mexicaine, Jesus Ramirez, a déclaré : « la justice a été rendue ».
Le parquet fédéral de Brooklyn considère qu’il est désormais un « criminel condamné ». Le procureur fédéral Breon Peace a déclaré dans un communiqué : « Garcia Luna, qui fut un temps porté au pinacle pour faire appliquer la loi au Mexique, va maintenant vivre le reste de ses jours comme un traître à son pays et aux forces de l’ordre dévouées qui risquent leur vie pour démanteler les cartels de la drogue ».
Durant le procès, l’accusation avait fait défiler à la barre 26 témoins à charge, parmi lesquels neuf accusés ou condamnés pour trafic de drogue, extradés vers les États-Unis pour y être jugés. Ils ont accepté de collaborer avec la justice en échange de peines allégées, ce qui est un grands classique aux États-Unis mais aussi dans de nombreux pays européens comme l’Italie.
C’est le même tribunal de Brooklyn qui a condamné en 2019 à la prison à vie l’ancien chef du cartel de Sinaloa, Joaquin « El Chapo » Guzman.

Son avocat Cesar de Castro, qui a plaidé tout le procès sur « l’absence de preuve (qui) n’est pas une preuve », a promis que son client « continuerait le combat (…) pour laver son nom ».

À la fin 2020, le gouvernement mexicain d’Andres Manuel Lopez Obrador a déposé une plainte contre l’ancien ministre pour un détournement présumé de plus de 200 millions de dollars du trésor public vers des entreprises appartenant à des proches. Selon Mexico : « durant les années 2013, 2017 et 2018, il y a des transferts pour un total de 2,6 milliards de pesos (139 millions de dollars) et pour 77 millions de dollars lors d’autres transferts vers une entreprise (basée au Panama) qui envoyait des fonds vers d’autres entités en Israël, en Lettonie, au Panama, en Chine, aux États-Unis, à La Barbade, à Curaçao ».

Une autre affaire du même type avait défrayé la chronique en 2020 avec l’arrestation aux États-Unis du général de division Salvador Cienfuegos Zepeda (72 ans) dans le cadre de l’opération de la Drug enforcement administration (DEA) baptisée « El Padrino » (le parrain). Toutefois, le gouvernement mexicain avait fait part de sa colère car il n’avait pas été informé à l’avance de cette opération. Le Mexique avait considéré qu’il s’agissait d’une atteinte à sa souveraineté. Les États-Unis avaient alors abandonné les poursuites et avaient extradé le général vers le Mexique.

Voir : « Les États-Unis cèdent à la pression du Mexique » du 20 novembre 2020.

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Texte

Alain Rodier

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