Le 5 juillet, le directeur du MI5, Ken McCallum (à gauche) et son homologue du FBI Christopher Wray (droite), sont apparus pour la première fois ensemble en public au QG des services de contre-espionnage à Thames House à Londres. L’assistance était composée de personnalités venant du monde des affaires et d’universitaires.

Wray a déclaré que la Chine constituait pour les États-Unis « la menace la plus importante à long terme pour l’économie et le sécurité nationale » et qu’elle avait interférée lors de récentes élections politiques (la présidentielle).

McCallum a pour sa part déclaré que son service avait plus que doublé ses activités contre les menées de la Chine lors de ces trois dernières années et que cela devrait encore doubler dans l’avenir. Il a ajouté que comparé à 2018, le MI5 a diligenté sept fois plus d’enquêtes sur le Parti Communiste chinois (PCC).

Pour Wray, si Pékin s’empare par la force de Taïwan, cela « représentera la pire des crises économiques que le monde n’ait jamais connu ». Il a aussi confirmé que le gouvernement chinois tente de voler la technologie occidentale en utilisant tous les moyens possibles(1).

Ils ont averti du fait que la Chine tirait toutes sortes de leçons de l’invasion de l’Ukraine par la Russie et surtout des sanctions qui s’en sont ensuivies. La Chine tente de se protéger de mesures coercitives qui seraient prises si Taïwan était envahi. Cela sera encore plus difficile qu’aujourd’hui pour l’économie occidentale car les énormes investissements faits en Chine depuis des dizaines d’années serviront d’« otages ». Pire encore, les chaines de distribution de nombreux produits nécessaires à la bonne marche de l’économie mondiale seront brusquement interrompues.

Le chef du MI5 a dit que la nouvelle législation adoptée en Grande Bretagne aiderait grandement à faire face à la menace actuelle d’espionnage mais qu’il convenait aussi que le pays devienne une « cible dure » en s’assurant que toutes les tranches de la société soient mieux informées des risques existants. Depuis l’établissement d’une nouvelle législation sur l’attribution des visas, une cinquantaine d’étudiants chinois liés au ministère de la défense auraient quitté le pays.

Les deux responsables ont appelé le monde des affaires à rester vigilant et à signaler d’éventuelles menaces(2). Ils ont terminé en déclarant que « la Chine a trop longtemps été la seconde priorité [ après la Russie et l’Iran…] elle ne vole désormais plus sous les radars » mais tout en maintenant l’effort important contre les menaces clandestines russes et iraniennes ».

Pékin, par la voix de son ambassade à Londres, a rejeté ces accusations, les estimant « dépourvues de tout fondement ».

Ce ne sont pas tellement les informations fournies – bien connues depuis des dizaines d’années – qui interpellent mais le fait que les deux plus importants responsables du contre-espionnage anglo-saxon se soient livrés à ce show. Il semble entrer dans le cadre de la politique de Washington – suivie par Londres – de désigner publiquement l’« ennemi prioritaire de demain ». Il est aisé d’en déduire que l’hostilité de par et d’autre va s’intensifier progressivement et vraisemblablement conduire à une catastrophe comme celle que l’on connait déjà en Europe.

1. Cette évidence fait sourire tous les spécialistes de la chose. L’agressivité des services de renseignement chinois – particulièrement dans le domaine économique – date de bien avant la fin du XXè siècle.
2. Ce message était déjà diffusé dans les années 1980 !

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Texte

Alain Rodier

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