L’affaire débute dans la journée du 21 avril lorsque les sirènes d’alerte du village d’Abou Qrenat situé à 21 kilomètres au nord-ouest du Centre de recherche nucléaire Shimon Peres (Dimona) dans le désert du Négev ont retenti .

Dans un premier temps, des explosions auraient été entendues et une vidéo montrant l’interception d’un missile par la défense anti-aérienne israélienne aurait circulé sur le net.

Cette région est particulièrement sensible car elle accueille la centrale de Dimona dont la construction avait été lancée dans les années 1960. Elle abrite un des rares réacteurs nucléaires israélien. En 1986, Mordechai Vanunu, un ancien technicien ayant travaillé sur site a fourni des photos et des documents à la presse britannique prouvant que l’État hébreu avait développé un programme nucléaire militaire(1).

Depuis, c’est un secret de polichinelle qu’Israël est une puissance nucléaire qui peut mettre en œuvre des missiles sol-sol, air-sol et mer-sol emportant des têtes nucléaires (2).

Les autorités israéliennes ont fini par éclaircir l’affaire. Il s’agissait d’un missile sol-air SA-5 tiré depuis le sol Syrien au dessus du territoire israélien qui n’avait en aucun cas un objectif terrestre (cet armement n’est pas conçu pour cela). Il aurait « visé un appareil de l’armée de l’air israélienne » sans plus de précisions mais sans doute évoluant à la frontière syro-israélienne… En bout de course, il se serait écrasé dans le Négev.

En représailles, les Israéliens ont bombardé le soir même les défenses anti-aériennes syriennes dans la région d’al-Dumayr située à une quarantaine de kilomètres de Damas (dont la batterie d’où aurait été lancé ce missile). Le porte-parole de l’armée syrienne a déclaré : « l’ennemi israélien a mené une agression aérienne avec des missiles provenant du Golan occupé ciblant quelques objectifs dans les environ de Damas blessant quatre soldats et occasionnant quelques pertes matérielles ».

Les Israéliens bombardent depuis des années le territoire syrien visant des objectifs du Hezbollah libanais, iraniens et plus rarement syriens. Là, il s’agissait d’une « riposte à un acte hostile ».

Il n’en reste pas moins que la rumeur avait rapidement couru comme quoi c’était la centrale nucléaire Dimona qui était visée. D’ailleurs, quelques observateurs iranien ont profité de l’évènement pou affirmer que c’était un tir délibéré pour venger l’affront du sabotage de Natanz survenu le 11 avril 2021…

La leçon à tirer est qu’il convient toujours de préciser les tenants et les aboutissants avant de déclencher une riposte qui doit être proportionnée de manière à ne pas enflammer une situation déjà volatile. C’est valable sur bien d’autres théâtres où des forces opposées se livrent à des gesticulations qui peuvent être mal interprétées : manœuvres de l’OTAN aux marches de la Russie, manœuvres de forces russes autour de l’Ukraine, patrouilles navales et aériennes qui viennent se frotter en limite des frontières des uns et des autres.

1. Ramené d’Italie en Israël par le Mossad, il avait été condamné pour trahison et espionnage.
2. Les estimations tournent autour de 200 têtes opérationnelles.
3. Voir mon article : « Nucléaire iranien : sabotage à Natanz » du 14 avril 2021.

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Texte

Alain Rodier

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