Une enquête baptisée « bratva » (confrérie, nom donné à de nombreuses organisations criminelles de l’ex-URSS) débutée il y a deux ans a abouti à l’arrestation à La Roche-sur-Yon du « vory v zakone » (bandit dans la loi) géorgien Kakhaber Alishbaya alias « Kakha Zugdidsky » (58 ans) qui contrôlait de nombreux groupes criminels géorgiens en Europe occidentale. Il avait été intronisé à Moscou en 1993 et il se serait installé en France au début des années 2000. 25 autres personnes d’origine géorgienne résidant en France ont aussi été interpellées.
Elles sont accusées d’une série de vols et de cambriolages, mais aussi d’extorsions de fonds et de contrebande de cigarettes. Ils ont été interpellés à La Roche-sur-Yon (Vendée), Bordeaux (Gironde), dans les Deux-Sèvres et dans les Pays de Loire par les policiers de l’Office Central de Lutte contre la Criminalité organisée (OCLCO).
Les perquisitions ont permis de saisir 20.000 euros en liquide, un fusil à canon scié, plusieurs véhicules, une centaine de cartouches de cigarettes de contrebande, des vêtements de luxe, une vingtaine de grands crus de Bordeaux, du matériel de cambriolage… Les voleurs ciblaient des maisons d’habitation et des entreprises. Le butin était revendu dans des épiceries tenues par des Géorgiens (comme les cigarettes de contrebande). Deux garagistes des Deux-Sèvres ont aussi été placés en garde à vue.
Les « bandits dans la loi » sont structurés de manière paramilitaire. Les responsables couronnés « vory » par leurs pairs ont sous leur autorité les « smotryachi », des chefs régionaux qui dirigent des « chestiorki », les « pions » (dans le jeu d’échecs), ces hommes de base chargés de récolter le butin à coups de vols et de cambriolages. Depuis le milieu des années 2000, ils sillonnent l’Europe de l’Ouest, avec une certaine préférence pour la France, la Grèce, l’Espagne et l’Italie. Les « chestiorki » organisent de véritables raids de prédation s’attaquant aux particuliers comme aux commerces des centres-ville et les supermarchés des périphéries. Ils dérobent tout ce qui leur tombe sous la main, outillages de jardin, vélos, les bouteilles d’alcool, etc.
Seulement, les « pions » se font de plus en plus arrêter comme en témoignent leurs casiers judiciaires bien fournis. Le système est fondé sur une délinquance de petit niveau qui leur permet de rester sous les radars, mais qui au final rapporte beaucoup. En prison, ils comptent sur la solidarité des « frères »: l' »obschak », la caisse commune alimentée par un prélèvement de 20 % sur le produit des vols. Recueilli dans toutes les villes où les « vory v zakone » sont implantés, ce considérable trésor de guerre remonte jusqu’aux patrons de la confrérie.
Face aux forces de l’ordre, les bandits dans la loi s’expriment seulement en géorgien et n’hésitent pas à menacer les interprètes qui sont alors convoqués. Ils nient tout et gardent la loi du silence. Ceux qui crachent au bassinet risquent gros et ils le savent. Les faits divers regorgent de cas de « traîtres » ayant été littéralement découpés en rondelles pour punition de leurs bavardages.
Et pourtant, il y a longtemps que les criminels géorgiens sont ciblés en France. Ainsi, Kakhaber Sushanashvili, un célèbre vory v zakone purge une peine à perpétuité depuis 2010. Mais il est probable qu’il continue à avoir de l’influence sur ses réseaux depuis sa cellule.
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