Le 27 septembre, Nikol Pashinyan, le premier ministre arménien a dénoncé une « offensive azérie » au cours de laquelle quatre hélicoptères auraient été abattus (il semble qu’il n’y en ait eu qu’un) et une dizaine de blindés détruits. En effet, les hostilités ont repris le long de la frontière du Nagorny-Karabakh (appelé Artsakh par Erevan) le dimanche 27 au matin. Le ministre de la défense azéri a déclaré pour sa part que les forces avaient lancé « une contre-offensive le long de toute la ligne de front » pour protéger les civils et contenir les forces arméniennes. Dans les faits, il semble bien que ce sont les Azéris qui ont déclenché les hostilités engageant des forces blindées et mécanisée appuyées par l’aviation. La plus haute autorité religieuse chiite azérie à appelé à reconquérir le Haut-Karabakh considéré comme une « terre d’islam ».
La ville de Stepanakert, la plus peuplée du Haut-Karabakh, et des villages aux alentours auraient été l’objet de tirs d’artillerie azérie entraînant une riposte arménienne. Les autorités parlent de plus de 25 tués dont une majorité de civils. Le Premier ministre Nikol Pachinian a déclaré : « J’exhorte tout le personnel à se présenter aux commissariats militaires » et a appelé les Arméniens à « être prêts à défendre la patrie sacrée […] Soutenons fermement notre Etat, notre armée […] et nous allons vaincre ». La mobilisation générale et l’état d’urgence ont été déclarés par l’Arménie et le Haut-Karabakh suivis par l’Azerbaïdjan qui a pris les mêmes mesures.
La Turquie s’est immédiatement rangée derrière son allié azéri, le président Erdoğan qualifiant l’Arménie de « la plus grande menace pour la paix et la stabilité dans la région » alors que la Russie et l’Iran appelaient les partis à un cessez-le-feu immédiat (comme l’ONU, l’Europe, les États-Unis, le Vatican, etc.).

Les incidents militaires entre les deux pays en conflit ouvert depuis leur création en 1991 à la suite de la chute de l’URSS se multiplient ces dernières semaines (voir mon article « début d’une nouvelle guerre » du 15 juillet sur le site raids.fr) alors que tous les observateurs avertis savent bien qu’aucun des deux protagonistes ne peut emporter une décision militaire significative. En effet, si l’Azerbaïdjan chiite est soutenu par la Turquie majoritairement sunnite version Frères musulmans (et beaucoup plus discrètement pour des raisons tactiques par Israël), l’Arménie bénéficie de l’aide de la Russie (qui joue habilement entre les deux camps) et de l’Iran (qui a peur d’un Azerbaïdjan chiite trop « attractif » pour ses propres populations azéries). Aucun de ces parrains ne tolèrerait que son poulain ne perde la partie.
L’explication vient vraisemblablement de la guerre d’influence que se livrent Moscou et Ankara en Syrie dans la région d’Idlib et, plus encore en Libye où les deux capitales défendent des camps antagonistes (Tripoli pour Ankara, le maréchal Haftar pour Moscou). Cette politique de défis par tiers interposés semble être la règle aujourd’hui au dépens des intéressés eux-mêmes qui sont totalement dépassés par ce qui peut être qualifié de nouveau « grand jeu ».

Enfin, sur le plan strictement militaire, les deux armées sont majoritairement statiques et enterrées. Cela fait plus penser à une guerre de tranchées qu’à de grands déboulés de chars. Le but est également médiatique, des films parfois pris par des drones, étant largement diffusés sur les réseaux sociaux.

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Alain RODIER

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