Alors que le monde a les yeux tournés vers les conséquences du Coronavirus et la situation prévalant en Syrie – et un peu plus secondairement en Libye -, les rebelles yéménites emmenés par les Houthis grignotent du terrain contre les forces gouvernementales soutenues par la coalition emmenée par l’Arabie saoudite.

C’est ainsi qu’ils se sont emparés à la fin février du district de Nahm situé à l’est de la capitale Sanaa obligeant les forces gouvernementales à se replier sur la province de Marib. Cette défaite serait due en partie à l’inaction de l’aviation saoudienne dans la zone et aux disputes existant entre le régime du président Abed Rabbo Mansour Hadi et le parti al-Islah qui dépend des Frères musulmans. Une fois de plus, le gouvernement du président (en exil en Arabie saoudite) Hadi est mis en difficulté. Cette conquête permet aux rebelles de sécuriser tous les accès à la capitale qu’ils tiennent depuis 2014. Cela leur permet de contrôler la chaîne montagneuse qui domine la province de Marib. La redoutable 312èmebrigade blindée et les forces houthies placées dans la région sous les ordres du major général Abdul Khaliq Badredin al-Houthi maintiennent donc sous leurs feux cette province.

Plus grave encore, les rebelles se sont emparés de al-Hazm, la capitale de la province d’el-Jawf au nord de la province de Marib et frontalière de l’Arabie saoudite.

Plus globalement, alors que des tractations se tenaient à Oman, les Émirat Arabes Unis ont retiré leurs forces du Yémen tandis que le gouvernement de Hadi concluait un accord (dit « accord de Riyad ») avec le Conseil de Transition du Sud (CTS) qui contrôle Aden.

Pour rappel, les forces militaires gouvernementales sont dirigées par le major général Sagheer bin Aziz, chef d’état major, et le brigadier général Tareq Saleh, le fils du défunt ex-président Ali Abdallah Saleh qui avait tenté de quitter la rébellion des Houthis qu’il appuyait en décembre 2017.

Si les rebelles n’ont aucun espoir de conquérir l’ensemble du pays (mais ce n’est vraisemblablement pas dans leurs projets), les forces gouvernementales, même appuyées par la coalition emmenée par Riyad, ne pourront pas non plus récupérer l’ouest du pays. Il convient de rajouter à l’équation les indépendantistes du CTS qui tiennent Aden et les activistes d’Al-Qaida dans la Péninsule Arabique (AQPA) qui ont été sévèrement étrillés ces derniers temps par des frappes US mais qui sont toujours présents au centre du pays et enfin Daech qui tente d’y préserver une wilayat locale. Ajouté au fait que Téhéran se sert de ce conflit pour affronter son adversaire saoudien par Houthis interposés, la situation est donc totalement ensablée pour de années avec une population qui vit un cauchemar humanitaire des plus terrible de la planète.

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Alain RODIER

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