Ces deux dernières années, la conflictualité au Maghreb s’est accentuée. L’Algérie et le Maroc, sur fond de rivalité exacerbée par la question du Sahara occidental et la guerre à Gaza, se sont lancés dans une course aux armements inédite pour ce continent.

Alger a considérablement augmenté son effort en matière de défense, avec un budget militaire multiplié quasiment par deux en 2023 s’expliquant en grande partie par une forte augmentation des recettes issues des exportations de gaz vers les pays d’Europe. En proportion du PIB, le Maroc consacre environ 3,4 % à sa défense, contre près de 9 % pour l’Algérie. Cette dernière (1) se place parmi les cinq pays au monde qui investissent le plus lourdement, proportionnellement à leur économie.

Les stratégies militaires de deux « poids lourds » du Maghreb s’opposent radicalement. Si Rabat investit dans la modernisation qualitative de ses équipements (2), le renseignement de haute technologie et une volonté de souveraineté industrielle, l’Algérie a choisi une doctrine de défense de type dissuasion conventionnelle. Le Maroc dispose d’une véritable doctrine opérationnelle fondée sur l’expérience et la projection et mène régulièrement des manœuvres conjointes avec les États-Unis, la France, le Royaume-Uni et l’Espagne. Rabat mise aussi sur les transferts technologiques avec Israël, la Turquie, le Brésil, les États-Unis et maintenant la Corée du Sud (avec peut-être l’achat de chars K2 Black Panther, de systèmes de défense aérienne Cheongung-II et de sous-marin KSS-III).

Cette interopérabilité marocaine est un atout majeur que l’Algérie, enfermée dans une posture de repli, ne possède pas. En effet, l’Algérie demeure prisonnière de la doctrine soviétique : supériorité numérique, artillerie lourde et dépendance à l’industrie militaire russe. En 2026, Alger devrait réceptionner une trentaine de nouveaux avions de combat (Su-57, Su-35 et Su-34), mais sa très importante flotte aérienne s’accompagne d’une usure accélérée du matériel et de coûts de maintenance énormes.

Face à une armée algérienne plus nombreuse et dotée de plus d’armement, le Maroc compense cet écart par la qualité et la technologie. D’ailleurs, une simulation de guerre entre les deux pays réalisée par des experts européens assure une nette supériorité du Maroc et une défaite de son voisin en cas d’attaque de ce dernier.

(1) Le gouvernement algérien aurait activé l’exécution de crédits d’une valeur de plus de 26 milliards de dollars, devenant l’un des États africains qui dépensent le plus en matière de défense.

(2) Récemment, le royaume chérifien a acquis des hélicoptères d’attaque AH-64E Apache, des F-16 Viper, de CAESAr (camion équipé d’un système d’artillerie) et une flotte de drones.

Bonne lecture
Eric Micheletti

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