Le responsable de la logistique du mouvement irakien Kataeb Hezbollah, Wissam Mohammed Saber Al-Saedi alias Haj Abou Baqir, a été neutralisé par une frappe américaine à Bagdad le 7 février 2024. Son adjoint Arkan Al-Ala et le conducteur du véhicule ont également été tués dans l’explosion.

Le Kataeb Hezbollah est soupçonné avoir perpétré l’attaque d’un drone suicide qui a tué trois militaires américains sur la base Tower 22 en Jordanie le 21 janvier.

La cérémonie funèbre qui a accompagné l’enterrement d’Haj Abou Baqir a réuni une foule inhabituelle qui a démontré l’importance de la victime.

Le chef d’état-major des Forces de mobilisation populaire (Hachd al-Chaabi, PMF), Abou Fadak Al-Muhammadawi alias « Al-Khal »(en civil au centre de la photo), le chef de la sécurité des Hachd, Hussein Falih Aziz alias Abou Zainab al-Lami (en uniforme à droite sur la photo), le conseiller à la sécurité nationale Qasim Mohammad Jalal al-Araji Hussaini (photo ci-après) ainsi que des parlementaires irakiens proches des Hachd étaient  présents.

Mais malgré les slogans hostiles habituels annonçant la venue prochaine de la « vengeance », les différentes déclarations n’indiquaient pas pour l’instant une quelconque escalade.

Si les États-Unis ne vont pas plus loin dans la réplique à l’attaque de la Tower 22 (1), les différents responsables des PMF considéreront vraisemblablement que les « règles du jeu » sont « équitables. »

Par contre, ils continueront à chercher les moyens permettant d’atteindre leur principal objectif : expulser les troupes américaines d’Irak.

Pour l’instant, les dirigeants des Hachd ont condamné les violations américaines de la souveraineté irakienne tout en encourageant le gouvernement à soumettre une lettre au Conseil de sécurité de l’ONU demandant le retrait immédiat de la coalition internationale.

Le gouvernement irakien souhaite pour sa part passer d’une situation de  partenariat avec la coalition multinationale à des accords de sécurité bilatéraux. À noter que les populations irakiennes kurdes et sunnites ne souhaitent pas dans leur majorité le départ des forces américaines qui contrebalancent l’influence de Téhéran via les Hachd.

En réalité, Bagdad est coincé entre le marteau et l’enclume l’Iran et les États-Unis et seule une désescalade pourrait permettre une transition en bon ordre.

Selon plusieurs responsables de la défense américaine, des préparatifs sont actuellement en cours pour un retrait total ou partiel des forces américaines et de la coalition de Syrie et d’Irak en raison de la pression continue et de l’escalade exercées par des groupes soutenus par l’Iran.

Le retrait complet peut prendre jusqu’à 90 jours, mais cela dépend de sa taille, de sa portée et de son urgence.

Enfin, une commission militaire conjointe américano-irakienne s’est à nouveau réunie le 11 février pour poursuivre les discussions portant sur la fin de la mission de la coalition internationale contre Daech en Irak. Le porte-parole irakien a déclaré que les pourparlers se poursuivront tant que « rien ne les perturbera. »

Globalement, depuis la mort du major général Qassem Soleimani, le chef de la force Al-Qods iranienne le 3 janvier 2020 à Bagdad, Washington tente autant que possible d’éviter de tuer des Iraniens de manière à ne pas envenimer la situation.

Ce sont des commandants irakiens qui ont été tués et ils correspondent à un modèle comparable au précédent assassinat ciblé effectué par les États-Unis le 4  janvier d’un membre du Harakat Hezbollah Al-Nujuba, Mushtaq Taleb al-Saidi alias Abou Taqwa commandant la 12ème brigade des PMF (2).

Pour Téhéran, ce ne sont pas des personnes qui représentent une quelconque « valeur stratégique. » En réalité, le guide suprême de la Révolution iranienne, Ali Khamenei, se battra jusqu’au « dernier Irakien. »

Pour résumer, les « Perses » iraniens n’ont historiquement aucune affinité avec les « Arabes » irakiens. La guerre de 1980-88 n’a fait qu’approfondir ce sentiment que l’on pourrait qualifier de xénophobie. Les Irakiens qui soutiennent la politique de Téhéran sont donc des « collaborateurs interchangeables », sans plus…

Les Iraniens sachant jusqu’où ils peuvent aller ne souhaitent pas s’engager trop directement. C’est vraisemblablement ce qui avait coûté la vie au général Soleimani qui était devenu trop visible et trop impliqué personnellement. Et pourtant, ils jouent un rôle fondamental en coulisses via leurs proxies.

Parallèlement, Israël « fait le boulot » en Syrie et au Liban. Ainsi, un responsable militaire du Hezbollah libanais a été gravement blessé lors d’une frappe israélienne qui a visé le 8 février sa voiture dans la ville de Nabatiyé au Sud-Liban.

Le 2 janvier, le numéro deux du Hamas, Saleh al-Arouri (3) et six autres membres du mouvement palestinien avaient été tués dans des frappes de drones, attribuées à Israël, dans la banlieue sud de Beyrouth, fief du Hezbollah (3).

 

 

1. Voir : « FRAPPES ÉTATSUNIENNE AU PROCHE-ORIENT » du 7 février 2024.

2. Voir : « OPÉRATION HOMO AMÉRICAINE CONTRE UN MILICIEN IRAKIEN » du 8 janvier 2024.

3. Voir « ACTIONS VIOLENTES AU LIBAN ET EN IRAN » du 4 janvier 2024.

Publié le

Texte

Alain Rodier