Les plus hautes autorités russe, président Vladimir Poutine en tête, ont affirmé que l’Ukraine était en train de préparer une « bombe sale » pour ensuite mener une opération sous « faux pavillon » ; Cela permettrait à Moscou de justifier ensuite une escalade militaire - mais sans définir quelle tournure cette dernière prendrait -. Même s’il est peu probable, l’emploi d’armes nucléaires tactiques par Moscou n’est pas à exclure.

Une bombe sale est une charge explosive classique qui doit disséminer dans son environnement immédiat des projectiles radioactifs qui peuvent provenir de différentes sources : déchets de centrales nucléaires, de centres radiologiques laboratoires médicaux, etc. Dans les faits, une bombe sale n’est pas plus vulnérante qu’une arme classique ayant la même charge d’explosifs mais elle peut contaminer une zone géographique (limitée) et surtout, créer une grande panique dans les populations qui sont traumatisée par le mot « nucléaire ».

Sur le plan technique, Moscou avance que l’Ukraine serait en train de construire sur le site de Ioujmach connu du temps de l’URSS sous le sobriquet de « Rocket city » (appelé maintenant Pivdenmash) une copie du missile Iskander-M sur lequel serait installée une tête explosive entourée de déchets radioactifs.

L’Ukraine n’ayant pas de système d’arme Iskander, le missile qui servirait de modèle à la copie serait un Tochka-U de l’ère soviétique qui lui est en dotation en Russie et en Ukraine.

Il devrait être tiré ou explosé au sol dans la région d’exclusion de Tchernobyl (qui est repassée sous contrôle ukrainien après 35 jours d’occupation russe). Kiev prétendrait ensuite qu’il a été intercepté par sa défense anti-aérienne. Les déchets estampillés « Russie » seraient ensuite présentés comme « preuves » de l’agression russe. Un retour à la fiole d’anthrax présentée à l’ONU par le secrétaire d’État américain Colin Powell qui a justifié l’invasion de l’Irak (mais sans mandat onusien).

À noter que, depuis le début du conflit, les deux partis se renvoient des accusations de « chantage » à la menace atomique, particulièrement à propos de la sécurité des centrales nucléaires qu’ils contrôlent.

Les accusations de bombe sale prodiguées par Moscou ont été réitérées devant la Communauté des États indépendants (Commonwealth of Independent States – CIS -) après que Poutine ait affirmé que l’Ukraine avait « effectivement perdu sa souveraineté » et est « directement contrôlé les États-Unis qui l’utilise pour donner des coups de bélier contre la Russie, contre son union avec la République biélorusse, contre l’Organisation du traité de sécurité collective – CSTO – (Collective Security Treaty Organization) et contre le CIS en général. »

Pour mémoire, le CIS est une organisation politique, économique et sécuritaire qui regroupe la Russie, l’Armenie, l’Azerbaïdjan, la Biélorussie, le Kazakhstan, le Kyrgyzstan, la Moldavie, le Tadjikistan et l’Ouzbékistan. The CSTO est une alliance militaire distincte avec comme membres la Russie, l’Arménie, la Biélorussie, le Kazakhstan, le Kyrgyzstan et le Tadjikistan.

Les responsables américains, britanniques, français et turcs ont qualifié les assertions russes concernant la « bombe sale » de complètement infondées.

En plus, Poutine a affirmé devant le CIS que les Américains profitaient de la situation en Ukraine pour mener des « expérimentations biologiques » dans le pays mais d’ignorait superbement la volonté de Kiev d’acquérir l’arme nucléaire. Ces deux assertions semblent toutes deux être fausses.

La grande question est pourquoi cette intox ? Le ministre de la défense russe, Sergueï Choïgou, qui ne communiquait plus vers l’extérieur depuis des mois a soudain appelé ses homologues américain, britannique, français, chinois, indien (on se demande bien pourquoi ce dernier)… Poutine répète l’information en boucle. Il y a évidement un objectif qui, au minimum est de détourner l’attention internationale de l’impasse actuelle dans laquelle se trouve l’armée russe sans parler de ses échecs successifs. Mais il semble alors que c’est une grosse manœuvre pour un objectif bien minime.

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Texte

Alain Rodier

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