À la demande de Washington, les forces de sécurité honduriennes ont arrêté le 14 février l’ancien président de la république Juan Orlando Hernandez (né en 1968). Ce dernier qui a dirigé le pays de 2014 et 2021 est recherché par la par la court fédérale de New York pour son implication dans le trafic de drogue et une série d’autres crimes. Il aurait utilisé de sa position pour faciliter l’introduction de drogue aux État-Unis et son bureau aurait reçu des valises de billets en récompense pour ses services. Tony Hernandez, son plus jeune frère purge déjà depuis l’année dernière une peine de prison à perpétuité dans un pénitencier américain.

Orlando Hernandez a été placé en résidence surveillée à son domicile de Tegucigalpa et la demande d’extradition vers les USA devrait être examinée par les autorités dans les plus brefs délais. L’ancien président clame son innocence et se dit prêt à se défendre lui-même devant la justice nord-américaine.

Sous son mandat, de nombreux scandales de corruption ont amené à des manifestations de masse. Élu en 2014, il avait bénéficié d’un amendement à la constitution qui lui avait permis de se représenter et de se faire réélire en 2017. Des observateurs avaient alors noté de nombreuses malversations. Il ne s’est pas présenté pour une troisième élection en 2021, la candidate de centre-gauche Iris Xiomara Castro Sarmiento, épouse de l’ancien président Manuel Zelaya (qui avait été démis par un putsch militaire le 28 juin 2009) battant le représentant du Parti national d’Hernandez.

Le Parti national avait remporté toutes les élections qui avaient suivi le coup d’État militaire de 2009 qui avait démis Zelaya. Ironiquement, les militaires avaient alors justifié leur intervention pour empêcher Zelaya de se briguer un deuxième mandat.

Le Honduras a toujours été un narco-État qui permettait aux cartels latino-américains de faire transiter de la drogue venant majoritairement de Colombie et du Pérou vers leurs premiers clients, les États-Unis.

Sur un autre plan, Washington s’est souvent servi de ce petit pays comme plate-forme pour lutter contre l’extension du marxisme-léninisme en Amérique centrale et particulièrement au Salvador et au Nicaragua voisins. C’est là que sont nées les « Contras » qui ont défrayé la chronique dans les années 1980. Autant dire que la marge de manœuvre des gouvernants de ce pays est étroite entre les cartels et la CIA.

70% de la population vit sous le seuil de la pauvreté – ce qui explique en partie les migrations de populations honduriennes vers les USA -. Pour ajouter à ce triste portrait, ce pays connaissait en 2021 le deuxième de taux d’homicides le plus élevé de la planète (56,52 pour 100.000 habitants) juste derrière son voisin salvadorien (82,84 pour 100.000 habitants). Il semble que la corruption qui est généralisée du plus haut niveau de l’État jusqu’aux fonctionnaires de base, militaires et policiers compris, va perdurer… comme ailleurs en Amérique latine. La devise « Plata o Plomo » (de l’argent ou du plomb) pratiquée par les « sicarios » (les tueurs des cartels et des gangs(1)) ne laisse pas beaucoup de choix, sauf celui de l’exil.

1. Complètement décérébrés lors de leur formation depuis leur plus jeune âge, ils sont capables de toutes les horreurs destinées à impressionner les populations. L’un d’entre eux vient de diffuser sur le net un film où on voit manger le cœur de la victime qu’il vient juste d’assassiner.

Publié le

Texte

Alain Rodier

Photos

DR