Le 8 mars 2024, l’ex-président du Honduras, Juan Orlando Hernández Alvarado, a été reconnu coupable par un tribunal fédéral de Manhattan d'avoir « participé à l'importation de cocaïne aux États-Unis et possession illégale d'armes dont des mitrailleuses. » Sa peine sera prononcée ultérieurement mais il risque une condamnation à perpétuité.

Les procureurs ont déclaré qu’il avait dirigé le Honduras comme un « narco-État » protégeant et acceptant les pots-de-vin des trafiquants de drogue.

 

Pour sa part, l’ancien président de 55 ans a nié tout acte répréhensible et plaidé non coupable dans cette affaire. Il affirme être victime d’une cabale politique orchestrée par des barons de la drogue.

Il avait obtenu deux mandats consécutifs au Honduras de 2014 à 2022 mais désormais de forts soupçons pèsent quant à la manière dont il a été élu .

Et pourtant, il s’était présenté comme le « candidat de l’ordre public » promettant de combattre la criminalité liée au trafic de drogue dans le pays.

Au lieu de cela, les juges américains l’ont accusé d’avoir collaboré avec « certains des trafiquants de stupéfiants les plus prolifiques au monde pour construire un empire corrompu et très violent basé sur le trafic illégal de tonnes de cocaïne vers les États-Unis.»

Trois mois après avoir quitté ses fonctions, il a été arrêté et extradé à New York en avril 2022 pour répondre à des accusations fédérales des États-Unis.

Hernandez était considéré autrefois comme un grand allié des États-Unis. Sous sa direction, le Honduras a reçu plus de 50 millions de dollars d’aide pour lutter contre les trafiquants ainsi que des millions de dollars supplémentaires en matière de sécurité et d’aide militaire.

En 2019, le président de l’époque, Donald Trump, a remercié Hernandez d’avoir « travaillé très étroitement avec les États-Unis ».

Hernandez avait à son tour remercié M. Trump et le peuple américain « pour le soutien qu’ils nous ont apporté dans la lutte ferme contre le trafic de drogue. »

 

Le président hondurien Juan Orlando Hernandez s’entretient avec le vice-président US de l’époque, Biden lors d’une conférence de presse au Guatemala le 2 mars 2015.

Il était défini par la presse israélienne comme « l’un des alliés les plus fiables d’Israël » en Amérique latine. Sous son mandat, le Honduras a déplacé son ambassade de Tel-Aviv à Jérusalem faisant suite à une décision analogue de Donald Trump.

Il a régulièrement soutenu l’État hébreu aux Nations Unies et dans d’autres instances internationales tout en désignant comme « organisations terroristes » le Hezbollah libanais et les groupes armés palestiniens.

 

L’attention de la DEA avait d’abord été attirée par un des frères du président, Juan Antonio « Tony » Hernández Alvarado, ancien député arrêté à l’aéroport de Miami en novembre 2018. Il avait été condamné en 2019 à la prison à vie pour avoir introduit plusieurs tonnes de cocaïne aux États-Unis, pour possession illégale d’armes et d’être lié aux meurtres de deux rivaux en 2011 et 2013.

La justice US avait alors précisé que le baron de la drogue mexicaine Joaquin « El Chapo » Guzman qui purge actuellement une peine à perpétuité (plus dix ans…) dans un pénitencier américain aux États-Unis avait donné à Tony Hernandez – le frère cadet de l’ex-président – un million de dollars.

Ce scandale avait alors touché le président Juan Orlando Hernández soupçonnés d’avoir utilisé l’argent de la drogue pour financer ses campagnes électorales.

Accusé de trafic de drogue et de corruption en 2021 par la justice américaine, elle avait demandé son extradition le 14 février 2022. Il s’était rendu à la police hondurienne qui avait émis un mandat d’arrêt à son encontre le 15 février.

Un de ses cousins avait été arrêté le 19 février alors qu’il tentait de déplacer des valises contenant de fortes sommes d’argent en liquide.

L’ex-président a été extradé vers les États-Unis où il a été incarcéré dans une prison de Brooklyn.

Le procès a révélé que qu’ Hernández était lié à des trafiquants de drogue dès 2004, bien avant qu’il ne devienne président, et qu’il avait facilité la contrebande d’environ 500 tonnes de drogue vers les États-Unis. Il aurait touché des millions de dollars en pots-de-vin pour permettre à la drogue d’être introduite clandestinement de Colombie et du Venezuela via le Honduras jusqu’aux États-Unis.

Au cours de son procès, plusieurs trafiquants de drogue ont déclaré avoir soudoyé Hernandez.

Les procureurs ont également affirmé qu’il avait utilisé l’argent de la drogue pour ensuite soudoyer des fonctionnaires pour manipuler les élections présidentielles de 2013 et 2017 du Honduras en sa faveur.

Plus largement, c’est le « clan » Hernández qui paraissait être impliqué dans des affaires illégales.

Sa sœur aînée, Hilda Hernández, plusieurs fois ministre, disparue dans un « accident » d’hélicoptère le 16 décembre 2017 semblait jouer un rôle clef dans le dispositif. C’est après sa disparition que les choses ont commencé à mal tourner attirant l’attention de la DEA.

Juan Orlando Hernandez n’est pas le premier ancien chef d’État latino-américain à être condamné pour un crime lié à la drogue aux États-Unis.

Manuel Noriega, président du Panama, a été condamné pour trafic de drogue devant un tribunal de Miami en 1992. Condamné en France à dix ans de prison, il effectuera un séjour à la prison de la Santé avant d’être renvoyé au Panama en 2011 où il décède en mai 2017.

Son homologue guatémaltèque, Alfonso Portillo, a été condamné pour blanchiment d’argent par un tribunal de New York en 2014. Il sera relâché au bout d’un an de prison.

Il risque de rejoindre l’«Administrave Maximum Facility Florence » (surnommé l’« Alcatraz des Rocheuses ») au Colorado qui héberge déjà des barons de la drogue dont les Mexicains Joaquin « El Chapo » Guzman et l’ancien ministre chef de la sécurité publique (2006-2012) du président Felipe Calderon, Genaro García Luna, des terroristes et des criminels jugés comme les plus dangereux par les autorités américaines.

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Texte

ALain Rodier