L’Américaine d’origine libanaise Mariam Taha Thompson âgée de 62 ans a été condamnée à 23 ans de prison le 23 juin 2021 par un tribunal fédéral américain pour avoir livré des informations classifiées à un tiers qui les a transmises au Hezbollah, donc à l’Iran.

Le piège dans lequel elle est tombée est un classique de l’espionnage exploité durant la Guerre froide par les services secrets est-allemands, la Stasi, et son maître espion, Markus Wolf : les « Roméo ». Leur mission consistait à séduire des fonctionnaires ouest-allemandes en manque d’affection pour les recruter comme « taupes ».

Cela a d’ailleurs été la défense de la prévenue : « j’était tellement heureuse d’être aimée à mon âge (62 ans) ». Bien sûr, elle a ajouté qu’elle ne pensait pas nuire aux intérêts américains.

D’origine libanaise parlant l’arabe couramment, cette Américaine travaillait comme interprète contractuelle pour le Département de la défense US depuis une dizaine d’années. C’est dans ce cadre qu’elle bénéficiait d’une habilitation secret-défense. C’est en 2017 qu’elle a connu sa rencontre amoureuse avec un Libanais qui ne lui a pas caché ses liens – selon lui fortuits – avec le Hezbollah libanais. Avec le temps, elle a communiqué avec cet homme via des vidéos sécurisées et des applications de messagerie.

Elle aurait fourni des informations particulièrement sensibles qu’elle tirait des réseaux informatiques de la défense américaine auxquels elle avait accès.

C’est d’ailleurs ses recherches qui ont attiré l’attention des services de sécurité en janvier 2020 car elles ne correspondaient pas à ce dont elle avait besoin pour son travail. Son amant l’aurait pressé de questions suite à la mort du major général Qassem Soleimani. Elle aurait en effet recherché les sources qui auraient permis à l’armée américaines de localiser l’officier général iranien(1).

Elle aurait aussi obtenu une liste d’objectifs et le détail de méthodes employées par l’armée américaine au Proche-Orient.
Elle a été arrêtée par le FBI le 27 février 2020 sur la base américaine d’Irbil en Irak du Nord où elle était assignée auprès des forces spéciales US.

Elle a été inculpée pour espionnage un mois plus tard. Lors de son interrogatoire, il a affirmé qu’elle « haïssait » le Hezbollah mais a fini par reconnaître qu’elle pensait travailler pour le mouvement Amal, le second parti chiite libanais. Problème, le Amal est autant « aux ordres » de Téhéran que le Hezbollah.

Elle risquait une condamnation à perpétuité ; le procureur a demandé 30 ans d’emprisonnement ; elle a obtenu une certaine mansuétude du juge John Bates avec 23 ans. Âgée de 62 ans, elle ne devrait théoriquement pas recouvrer la liberté avant l’âge de 84 ans (elle a déjà effectué plus d’un an en préventive et les remises de peine sont rares dans les pénitenciers américains). Les réductions de peine lors de condamnation pour espionnage sont difficile à obtenir aux États-Unis(2).

Un autre cas célèbre d’espionnage au profit de l’Iran reste dans les mémoires :En 2019, les Américains avaient livré l’information comme quoi Monica Witt, une ancienne militaire de l’US Air Force avait fait défection en Iran en 2013 emportant avec elle de nombreuses informations classifiées. En effet, elle avait servi au sein du Bureau des Enquêtes Spéciales de l’Air Force (AFOSI) qui traite d’affaires sensibles comme son pendant maritime, le Service d’enquêtes criminelles de la marine des États-Unis NCIS popularisé par une série à succès.

1. En fait, le général Soleimani ne se cachait plus vraiment depuis le début de sa médiatisation voulue en Syrie et en Irak. Il se pensait intouchable car acteur de la diplomatie secrète régionale. De plus, il était en permanence suivi à la trace par le Mossad.
2. Jonathan Jay Pollard, qui a espionné pour le compte d’Israël aux USA a été condamné à la perpétuité en 1987 (il était emprisonné depuis 1985). L’État hébreu a toujours fait le forcing pour le faire libérer. Cela a été le cas en 2015 mais a été interdit de quitter les USA pendant cinq ans. Il a finalement rejoint Israël en 2020.