À la fin septembre 2020, le secrétaire d’État américain Mike Pompeo a prévenu le président irakien Barhan Salih et son Premier ministre, Moustafa al-Kazimi, que Washington envisageait de fermer son ambassade de Bagdad dans les deux/trois mois à venir si les opérations hostiles menées par les Forces de mobilisation populaire (FMP) Hachd al-Chabi se poursuivaient. Il est vrai que depuis la fin 2019, l’ambassade américaine est l’objet d’agressions répétées, ce qui avait été à la base de l’élimination physique du major général Qassem Soleimani le 3 janvier. En tant que chef de la force Al-Qods chargée des opérations extérieures des pasdarans, il était considéré par les États-Unis comme le chef d’orchestre de ces manifestations destinées à terme à pousser les forces américaines hors d’Irak. Bien loin de calmer les velléités bellicistes des milices liées à Téhéran, cette opération homo – surtout aggravée par la mort de leur chef opérationnel al Mouhandis tué par hasard (ce n’est pas lui qui était visé bien que considéré comme un « terroriste international » par le Département d’État) en même temps que Soleimani – a encouragé leur poursuite au point de rendre la vie extrêmement difficile au sein de l’enceinte sécurisée de l’ambassade US pourtant incluse dans la « zone verte » ultra-protégée de la capitale irakienne. Il y a longtemps que les personnels « non essentiels » et les familles des diplomates américains ont quitté le pays pour des raisons de sécurité.
L’ambassadeur Matthew Tueller un vieux routier de la diplomatie américaine ayant été en poste au Koweït puis au Yémen, aurait aussi été exfiltré vers le consulat général US de Tikrit, la capitale du Kurdistan irakien qui devrait récupérer à terme les missions de l’ambassade américaine en Irak. Cette zone est considérée comme plus sûre car protégée par les forces kurdes du Parti Démocratique du Kurdistan (PDK) du clan Barzani inféodé à Washington depuis 1992.
Ce n’est d’ailleurs pas une surprise puisque les travaux considérables d’agrandissement de cette infrastructure – non nécessaires pour un simple consulat général – ont été entrepris dès 2017. Cela démontre que la diplomatie américaine ne réagit pas au coup par coup mais sait prévoir l’évolution de la situation avec un temps d’avance. Même si Trump est battu lors de l’élection présidentielle du 3 novembre, le retrait d’Irak semble inéluctable même s’il est retardé par la nouvelle administration qui ne peut ignorer le désir populaire de rapatrier les boys. À plus court terme, la fermeture de l’ambassade américaine à Bagdad devrait provoquer celle d’autres pays occidentaux qui se replieraient aussi sur Tikrit.

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Alain RODIER

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