Durant le mois de mai en Libye, les troupes de l’Armée nationale libyenne (ANL) du maréchal Khalifa Haftar ont subi une série de revers et perdu du terrain face aux forces du Gouvernement d’union nationale (GNA), spécialement dans la ville de Tarhouna à moins de 70 km au sud-est de Tripoli.

C’est un sacré retournement de situation, car moins de deux mois auparavant, l’ANL était aux portes de la capitale libyenne et menaçait de renverser le gouvernement provisoire reconnu par l’ONU. Mais c’était compter sans l’arrivée conséquente de mercenaires syriens pro-Ankara, de conseillers de l’armée turque, et sans l’aide massive du Qatar, entre autres 1. Le vent du désert tournant, le maréchal Haftar s’est dit favorable à un cessez-le-feu.

Mais il a vite été rejeté par le GNA, qui a rappelé que, lorsque l’ANL menaçait Tripoli, cette dernière avait refusé tout cessez-le-feu… D’autant que Fayez el-Sarraj, chef du GNA, obtenait une aide militaire supplémentaire du président turc Recep Tayyip Erdogan.

Actuellement, les unités de l’ANL tentent de protéger la ville de Syrte, verrou stratégique commandant les zones pétrolifères majeures en Libye. Depuis des mois, des experts annonçaient ce recul de l’ANL, car elle était bloquée devant Tripoli par manque d’effectifs, ses unités étaient éparpillées dans tout le pays et ses axes de ravitaillement étaient trop longs. Mais, fin mai, l’Égypte du président Abdel Fattah al-Sissi entrait dans la danse et laissait fuiter, en juin, des photos de colonnes de véhicules porte-chars transportant des M1A2, qui se dirigeaient vers la frontière libyenne. Une façon d’affirmer qu’il est hors de question pour la Turquie de s’implanter en Libye, « une présence étrangère dans ce pays relevant de la sécurité intérieure de l’Égypte ».

De là à y voir une intervention militaire égyptienne en Libye si les forces du GNA s’approchent trop près de Benghazi, il n’y a qu’un pas. Le tout sous le regard inquiet de l’Europe, en particulier de la France qui ne tient pas à voir un gouvernement pro-turc de l’autre côté de la Méditerranée faire du chantage aux migrants (comme Erdogan l’a fait à plusieurs reprises avec l’Europe). Sans oublier qu’elle n’entend pas renoncer à sa part dans les concessions pétrolières futures. Pour cette raison, Paris joue la carte égyptienne. Mais est-ce réellement le bon cheval ?

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