Le brigadier général des pasdarans Ali Akbar Ahmadian (à droite sur la photo ci-dessus) a remplacé le 22 mai Ali Shamkhani au poste de secrétaire du Conseil suprême de la sécurité nationale (SNSC) qui joue un rôle clé dans l'élaboration des politiques de sécurité étrangère et nationale de l'Iran.

Il a également été nommé comme l’un des deux représentants au SNSC du guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei.

L’autre représentant de Khamenei est Saeed Jalili qui fut secrétaire du SNSC entre 2007 et 2013 – le seul à ce poste à ne pas être un pasdaran -. Ce dernier a toujours défendu position plus dure vis-à-vis de l’Occident et il  s’est opposé à l’accord nucléaire de 2015 – le Plan d’action global conjoint, JCPOA -.

Le prédécesseur d’Ahmadian, le contre-amiral Iranien de souche arabe Shamkhani (photo ci-dessus) est le seul à avoir reçu la médaille de l’Ordre d’Abdulaziz – la plus haute distinction décernée par l’Arabie saoudite -. En effet, il a été récompensé pour avoir mené les négociations qui ont conduit en mars à un accord entre Téhéran et Riyad qui rétablit les relations diplomatiques entre les deux pays après sept ans d’interruption. Les négociations ont eu lieu sous la supervision de la Chine (photo ci-dessous).

Shamkhani a également présidé des négociations indirectes avec l’administration du président Joe Biden depuis 2021 visant à rétablir le JCPOA. L’ancien président américain Donald Trump avait unilatéralement quitté l’accord en 2018 puis imposé de nouvelles sanctions  à l’Iran.

Mais la position de Shamkhani avait été fragilisée en interne après l’arrestation, le jugement et la pendaison d’Alireza Akbari, l’un de ses anciens proches collaborateurs(1). Il a été exécuté pour espionnage au profit des services de renseignement britanniques. Il semble qu’il ait bien communiqué des informations sensibles, en particulier sur les activités réelles du site nucléaire de Fordo.

Un élément va dans ce sens. Akbari bien que passant pour un « dur » du régime iranien, s’est expatrié puis a obtenu la nationalité britannique. Sa Gracieuse Majesté n’accorde ce privilège que pour des services effectivement rendus. Cela ne retire rien à l’horreur de la peine de mort pratiquée couramment en Iran.

Shamkhani a été désigné au Conseil de discernement de l’intérêt supérieur du régime – l’organe d’arbitrage iranien – et comme conseiller politique du Guide suprême de la Révolution. Ces postes sont surtout honorifiques car de nombreuses anciennes personnalités ont été nommées  dans ces « voies de garage » comme l’ancien président Mahmoud Ahmadinejad.

Le pédigrée d’Ali Akbar Ahmadian et de son prédécesseur Ali Shamkhani sont parallèles.

Les deux hommes sont des piliers de l’establishment depuis la révolution islamique de 1979, des vétérans de la guerre Iran-Irak et ont ensuite gravi les échelons militaires.

Tout deux ont d’abord fait carrière au sein de la force navale du Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI), Ahmadian étant l’adjoint de Shamkhani avant de prendre le commandement de la marine du CGRI à la fin des années 1990, lorsque son prédécesseur a été nommé ministre de la Défense sous la présidence de Mohammed Khatami. Il est devenu en 2000 chef d’état-major interarmées du CGRI. Finalement, il a dirigé le Centre d’études stratégiques (SSC) du CGRI qui lui a permis d’étendre son réseau parmi les hauts fonctionnaires.

Shamkhani s’est tourné vers la politique et est connu pour gérer avec succès les relations avec les camps conservateurs, pragmatiques et réformistes. Il a été nommé secrétaire du SNSC par l’ancien président modéré Hassan Rohani en 2013.  Mais, selon Sina Azodi, membre non-résident du groupe de réflexion du Conseil de l’Atlantique, Shamkhani est un « vestige des époques Khatami et Rouhani. » Son remplacement signale l’influence toujours croissante de « la pensée conservatrice dans l’organigramme de sécurité iranien ».

Ahmadian quant à lui, est décrit par les médias iraniens comme un « stratège militaire de premier plan » mais n’a pas d’expérience dans le domaine politique.

Mais, globalement les pasdarans ne sont pas favorables au JCPOA.

Se pose aussi la question de la succession de Khamenei. Le CGRI jouera certainement un rôle important à ce moment là.

La nomination d’Ali Akbar Ahmadian change t’elle quelque-chose ?

Khamenei a déclaré devant des hauts responsables du ministère des Affaires étrangères et les ambassadeurs iraniens en poste à l’étranger qu’il souhaitait mettre l’accent sur une politique étrangère fondée sur la dignité, la sagesse et l’opportunité et a vanté les mérites de la « flexibilité » qui « ne renie pas les principes ».

Les commentaires de Khamenei peuvent être attribués aux tentatives actuelles de Téhéran d’améliorer ses relations dans la région, en particulier avec ses voisins arabes.

La nomination d’Ali Akbar Ahmadian ne devrait pas faire dérailler ce processus car la politique étrangère est définie par le Khamenei. Le SNSC et le ministère des Affaires étrangères ne font que mettre en œuvre ses directives.

 

1 – Voir : « IRAN : pendaison d’un ‘espion’ travaillant pour les Britanniques » du 16 janvier 2023.

Publié le

Texte

Alain Rodier