Si l’attention de tous les medias est focalisée fort justement sur l’invasion de l’Ukraine, l’actualité continue à être riche en évènements dramatiques. Il est même possible que certains utilisent cette attention concentrée sur l’invasion russe et ses conséquences pour se lancer dans des actions qui, autrement, auraient défrayé la chronique et attiré de vastes protestations.
Ukraine : La situation militaire en Ukraine a peu évolué depuis vendredi 11 mars, les forces russes continuant à grignoter du terrain vers les objectifs qui leur ont été assignés.
Par contre, le fait notable est le tir le 13 mars d’une trentaine de missiles contre des installations militaires situés dans l’Oblast (province) de Lviv à l’extrême ouest du pays. La base militaire de Yavoriv située à une quinzaine de kilomètres de la frontière polonaise appelée le « Centre international pour la préservation de la Paix et la Sécurité » (International Center for Peacekeeping and Security – ICPS -) a été touchée par huit missiles. Le village voisin de Staritchi a aussi été impacté.
Moscou avait prévenu que les convois d’armes approvisionnant les forces ukrainiennes constituaient des cibles « légitimes ». Il est possible que cette immense base militaire et le village de Staritchi servaient à stocker un certain nombre d’armes et de munitions envoyées par les pays de l’OTAN via la Pologne ou/et la Slovaquie voisines.
Selon Moscou, ces objectifs servaient également à accueillir des « mercenaires » étrangers. 180 d’entre eux auraient péri lors de l’attaque (aucune preuve n’a été apportée pour prouver ce bilan).
Jusqu’au début du conflit le 24 février, l’ICPS accueillait des instructeurs étrangers dans le cadre de l’accord de partenariat conclu entre l’OTAN et Kiev. Les derniers sur place étaient des membres de la Garde Nationale de Floride.
Selon le commandement militaire de Lviv, les frappes auraient causé la mort de 135 personnes et en aurait blessé 134 autres.
L’aéroport international d’Ivano-Frankivk située à l’est de Lviv (mais aussi utilisé par l’aviation militaire ukrainienne et employé jusqu’à récemment par des forces US et de l’OTAN -) a également été frappé. Les Russes devaient avoir des informations sur des livraisons d’armes transitant par cette plateforme aéroportuaire.
Si les opérations militaires terrestres sont concentrées dans l’Est de l’Ukraine, la Russie n’hésite plus à frapper dans la profondeur. Mais, pour le moment, elle met en oeuvre que des missiles, ce qui tendrait à prouver que la supériorité aérienne russe n’est pas assurée sur l’ensemble du pays.
Kurdistan irakien : Selon Washington, l’Iran aurait tiré douze missiles balistiques dans la nuit du 12 au 13 mars sur Irbil, la capitale du Kurdistan irakien. Le nouveau consulat général américain encore en construction aurait été visé. Heureusement, un seul blessé serait à déplorer.
Pour Téhéran, les sites ciblés accueillaient des « bases sionistes » à partir desquelles Israël conduirait des actions contre l’Iran. Si cette assertion ne semble pas être totalement dénuée de fondements, il est aussi vrai qu’en même temps, l’Iran a voulu faire part de son mécontentement face à la stagnation des négociations en cours sur le JCPOA (le nucléaire iranien). Le seul problème, c’est que pour une fois, ce n’est pas Washington qui est responsable mais Moscou.
De leur côté, les Gardiens de la révolution islamique (pasdarans) ont revendiqué l’attaque en affirmant que c’était une réponse aux raids aériens menés par Israël en Syrie et plus particulièrement, pour venger la mort le 7 mars de deux officiers supérieurs iraniens tués dans la région de Damas.
À un autre moment, ce tir direct de l’Iran sur le territoire irakien et contre des intérêts américains (le consulat général où devrait migrer l’ambassade car Bagdad est considérée comme trop dangereuse) aurait attiré de très vives protestations. Là, en dehors de quelques déclarations de l’ambassadeur US et du Premier ministre irakien, rien…
Arabie saoudite : Un plus grand silence est encore de mise avec ce qui vient de se passer en Arabie saoudite. Le 11 mars, Riyad a exécuté 81 détenus dont sept Yéménites et un Syrien. Les charges invoquées sont l’appartenance à des « organisations terroristes étrangères ». Il s’agit de la plus grande exécution de masse commise au Royaume dans l’histoire moderne. Ces exécutions viennent s’ajouter aux onze ayant déjà eu lieu depuis le début de l’année, ce qui fait un total de 92.
Selon le ministère de l’intérieur saoudien, « ces individus étaient impliqués dans de nombreux crimes dont le meurtre d’hommes innocents, de femmes et d’enfants […]. Parmi eux, il y aurait des criminels qui avaient fait allégeance à Daech, à Al-Qaida et des Houthis ».
En 2021, Riyad avait procédé à 67 exécutions et en 2020 à 27.
La dernière exécution de masse date de janvier 2016 lorsque 47 condamnés (dont la plus haute autorité chiite au Royaume) avaient été décapités. Déjà à l’époque, un appel à candidature à la fonction de bourreau avait dû être lancée car le nombre d’exécuteurs était insuffisant pour mener à bien la tâche…
Daech a un nouveau Calife : Le 10 mars, l’organisation « État islamique » (Daech) a confirmé la mort le 3 février d’Abou Ibrahim al-Hachimi al-Qourachi, son calife tué lors d’un raid américain en Syrie(1).
Abou Hassan al-Hachimi al-Qourachi a été désigné pour lui succéder. Ce serait un Irakien proche de l’ancien leader Abou Bakr al-Baghdadi mais il est peu connu dans la sphère jihadiste. Il aurait été membre du groupe Ansar al-islam, le premier mouvement jihadiste en Irak fondé par des Kurdes avant l’invasion américaine de 2003. En 2013, une grande majorité des activistes de ce groupe avait rejoint Daech. L’État Islamique a indiqué qu’il ne dévoilerait pas l’image et le vrai nom du nouveau leader pour des raisons de sécurité. Il faut dire que les deux précédents califes avaient été identifiés, localisés et neutralisés par les Américains. Il y a de quoi se méfier…
Selon la tradition, de nombreux groupes jihadistes présents de par le monde ont fait allégeance au nouveau leader.
Soit dit en passant, les jihadistes de Daech sont de plus en plus actifs au Sahel et au Nigeria. Si l’Ukraine accapare notre attention, il n’en reste pas moins que le situation se détériore progressivement sur zone.
En ce qui concerne le Mali, le ministre de la Défense, le colonel Sadio Camara, et le chef d’état-major de l’armée de l’air, le colonel Alou Boï Diarra, se sont rendus à Moscou la semaine dernière en pleine invasion russe de l’Ukraine. Selon un officiel qui a requis l’anonymat, cette visite devait permettre de faire le point sur les équipements livrés au cours des derniers mois par la Russie aux forces maliennes et éventuellement à évoquer la livraison de matériel supplémentaire.
Il y a bien d’autres faits intéressants (dont les neuf tirs de missiles nord-coréens depuis le début de l’année, un record !) mais un silence poli est actuellement de mise.
1. Voir : « SYRIE : l’émir de Daech neutralisé » du 4 février 2022
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