Ce fait est intéressant car l’Iran n’ayant pas d’ambassade active à Sanaa (capitale du Yémen tenue par les rebelles Houthis), la présence de ces « personnels militaires » est donc secrète et illégale au regard du droit international. C’est donc une reconnaissance officielle d’un soutien – au moins technique – apporté aux rebelles yéménites par des membres de l’armée iranienne…
Selon le même journal, les inquiétudes des responsables iraniens concernant les menaces américaines dominent toutes les réunions qu’ils tiennent avec leurs interlocuteurs étrangers.
Téhéran est en train de revoir complètement sa stratégie régionale en réponse aux efforts de l’administration Trump destinés à limiter son influence au Moyen-Orient et d’éventuellement lancer des frappes contre ses sites nucléaires et balistiques.
Ainsi, le 18 mars, Téhéran avait déjà exhorté les Houthis à « apaiser les tensions » en mer Rouge. Des responsables iraniens ont précisé que cette demande avait été transmise au représentant des Houthis à Téhéran et que l’Iran avait aussi demandé à Oman de transmettre le même message. À noter que les Houthis ne semblent pas avoir écouté le message – de là à douter de la réelle influence exercée à Téhéran sur ses alliés -.
La campagne américaine contre les Houthis
Depuis le 15 mars, les États-Unis ont lancé une vaste campagne militaire contre les Houthis au Yémen avec des attaques presque quotidiennes.
Des responsables américains ont déclaré que la première vague, qui visait des radars, des systèmes de défense aérienne et des systèmes de missiles et de drones, constituait une réponse aux attaques menées par les rebelles yéménites contre des navires commerciaux et des bâtiments de guerre en mer Rouge et dans le golfe d’Aden.
Le conseiller à la sécurité nationale, Mike Waltz, a déclaré que la première vague d’attaques avait également ciblé « le chef de l’unité des missiles [des Houthis] » qui a été éliminé. Pour le moment, aucune communication n’est venue confirmer cette assertion.
Cette vaste campagne de bombardements faisait suite à l’annonce par le président Donald Trump, le 22 janvier, de la reclassification des Houthis comme « organisation terroriste étrangère » (FTO).
Escalade des tensions entre Washington et Téhéran
Peu après le lancement de la nouvelle stratégie de « pression maximale » menée par Washington contre Téhéran, le président Trump a adressé une lettre au Guide suprême de la République islamique, Ali Khamenei. Cette dernière menace l’Iran d’une action militaire si le régime ne met pas fin à ses programmes nucléaire et de missiles, ainsi qu’à sa doctrine régionale de financement et de fourniture d’armes aux groupes « terroristes. »

Les États-Unis ont également renforcé leur présence militaire dans la région(1), en déployant deux groupes aéronavals pour sécuriser le détroit d’Ormuz, un goulot d’étranglement maritime crucial pour le commerce mondial.
De plus, les États-Unis ont déployé au moins six bombardiers B-2 sur leur base de Diego Garcia, située à portée de frappe de l’Iran et du Yémen.
Face aux tensions accrues, l’Iran se prépare à une éventuelle confrontation avec les États-Unis en étendant sa présence militaire dans le golfe Persique, renforçant sa présence sur les îles contestées de la Grande Tumb, de la Petite Tumb et d’Abou Moussa avec des systèmes de missiles avancés et des unités d’infanterie.

La composante maritime du Corps des gardiens de la révolution islamique (pasdarans) a armé ses navires de missiles de croisière, tandis que des exercices militaires de grande envergure dans la région ont testé les capacités défensives de l’Iran.
Téhéran a également dévoilé de nouveaux drones longue portée et des moyens navals, cherchant à renforcer sa dissuasion contre Israël et les États-Unis. En réalité, il y a bien longtemps que les analystes occidentaux ne croient plus à la réalité de l’efficacité des « armes miracle » présentées par l’Iran. Le but de ces présentations officielles est essentiellement la propagande intérieure.
Trump a poussé l'Iran à adopter une posture défensive.
La position rigoureuse de Donald Trump face aux ambitions régionales de la République islamique d’Iran après son arrivée au pouvoir a contraint Téhéran à adopter une posture défensive abandonnant pour le moment ses objectifs de « croissant islamique. »
Le fait que les milices chiites irakiennes soutenues par l’Iran s’abstiennent de toute provocation envers Israël et les États-Unis depuis décembre 2024 a été le premier signe de la nouvelle approche iranienne.

Plus récemment, le général Ismael Qaani(2), le commandant de la Force Al-Qods du Corps des gardiens de la révolution islamique s’est rendu à de nombreuses reprises en Irak pour ordonner aux milices pro-iraniennes de cesser leurs attaques contre des cibles américaines et israéliennes.
Notamment le 19 mars, Qaani a effectué une visite secrète et inopinée à Bagdad pour des entretiens de haut niveau avec des personnalités de l’état-major de coordination, des commandants des Forces de mobilisation populaire et l’ambassadeur d’Iran en Irak afin de les rassurer sur le soutien de Téhéran dans un contexte d’incertitudes entourant la politique iranienne de Washington.
Il convient aussi de ne pas sous-estimer les actions israéliennes qui visent les réseaux logistiques iraniens et du Hezbollah au Liban et en Syrie sans discontinuer. Si les États-Unis décident de frapper directement l’Iran, l’État hébreu participera vraisemblablement à la manœuvre. Le problème est que personne ne peut prédire quels en seront les résultats puis les conséquences.
1. Voir : « Renforcement américain à Diego Garcia et au Proche-Orient » du 26 mars 2025.
2. Voir : « Iran. Évolution de la force al-Qods depuis la mort de son chef, Qassem Soleimani » du 2 juin 2020.