Selon des déclarations officielles et médiatique iraniennes, l’armée israélienne a tué le 25 décembre dans la journée le brigadier général du Corps des Gardiens de la Révolution Islamique de la République d’Iran (CGRI – pasdarans) Razi Moussavi. Il aurait été ciblé par trois missiles dans le quartier de Sayyida Zeinab, au sud de Damas, la capitale syrienne.

Israël commente rarement ses opérations en Syrie mais dit vouloir empêcher l’Iran de s’implanter à ses portes. Interrogée le même jour à propos de la mort de Razi Moussavi, l’armée israélienne a dit ne « pas commenter les informations des médias étrangers ».

L’ambassadeur d’Iran en Syrie avait rencontré Moussavi peu de temps avant la frappe. Il a assuré que Moussavi était un « diplomate second conseiller » auprès de l’ambassade d’Iran en Syrie. Il est tout à fait vraisemblable que l’officier était détenteur d’un passeport diplomatique accrédité en Syrie. Cela pouvait lui faciliter la vie au jour le jour dans le pays mais ne lui garantissait aucune protection personnelle.

L’importance de cette opération est presque du même niveau que l’assassinat par un drone américain à Bagdad le 3 janvier 2020 du major général Qassem Soleimani, le chef de la force Al-Qods (les opérations extérieures des pasdarans) et celui du chef militaire du Hezbollah, Imad Mughniyeh tué le 12 février 2008 dans le gouvernorat de Damas par le Mossad. Son véhicule avait explosé. L’important pour les Israéliens et les Américains est de contenir les velléités des Iraniens au Proche-Orient en général et en Syrie en particulier en leur démontrant qu’ils ne sont pas « chez eux ».

Cette action intervient au moment où les attaques contre des navires ayant des rapports avec l’État hébreu se multiplient de la Mer rouge jusqu’aux côtes indiennes. Les Houthis revendiquent ces attaques mais pour Israël, c’est Téhéran qui est à la manœuvre en fournissant les composants et la technologie pour fabriquer les armes utilisées (drones et missiles) et les renseignements nécessaires au ciblage précis de cibles ayant, de près ou de loin, des liens avec Israël.

Le général Moussavi était un officier chevronné avec des décennies d’expérience acquise au Liban et en Syrie. Selon le media iranien « Amwaj.media », il était chargé de la coordination entre la force Al-Qods et le gouvernement syrien. Il facilitait l’arrivée des unités (afghane, pakistanaise, irakienne encadrées par des pasdarans) en Syrie et coordonnait les livraisons d’armes aux forces gouvernementales et au Hezbollah libanais aussi engagé sur zone.

Des sources laissent entendre qu’il s’occupait également de la livraison de missiles balistiques sol-sol au Hezbollah pour qu’il les stocke au Liban en vue d’un furtur affrontement avec Israël.

Connu comme ayant été un proche collaborateur du général Soleimani, Mousavi a longtemps agi comme l’ancien représentant du chef de la Force Al-Qods en Syrie. Il a notamment travaillé en étroite collaboration avec le général Javad Ghaffari, le précédent chef des opérations des pasdarans en Syrie qui a été expulsé en novembre 2021 qui, selon les Israéliens, était « accusé d’une violation majeure de la souveraineté syrienne » après avoir attaqué les forces américaines et déployé des armes iraniennes dans des endroits non approuvés »…. Après le retour de Ghaffari en Iran où il a été nommé chef adjoint de l’Organisation du renseignement du CGRI pour les opérations spéciales, l’influence de Moussavi a encore cru.

Après la mort de Soleimani en Irak en janvier, son successeur, le brigadier général Esmail Qaani, l’a nommé chef d’état-major d’Al-Qods en Syrie.

Son importance découlerait de son réseau de relations entretenues avec les différentes parties, factions et mouvements affiliés à la Force Al-Qods dans la région.

Il y a le côté symbolique du lieu de la frappe. Le quartier Sayyida Zeinab abrite la mosquée où se trouve le tombeau de Zeinab, petite-fille du prophète Mahomet, fille d’Ali et de Fatima. Ce sanctuaire chiite le plus important en Syrie est également apparu comme un nœud vital de la Force Al-Qods à la suite de la révolution de 2011. Les combattants étrangers dirigés par l’Iran qui ont combattu les opposants de Bachar el-Assad ont été qualifiées de « défenseurs du sanctuaire ». Moussavi était donc chargé de coordonner ces derniers. Ainsi, les Israéliens ont choisi de frapper en plein jour au cœur de l’influence iranienne et chiite en Syrie.

Cette élimination intervient dans le contexte de la guerre qui a été déclenchée le 7 octobre après l’action terroriste du Hamas (et d’autres groupes) depuis la bande de Gaza.

La République islamique, qui soutient le Hamas financièrement et militairement, a salué les attaques meurtrières contre le sud d’Israël comme un « succès » mais a nié toute implication directe.

L’« axe de la Résistance » dirigé par l’Iran se retrouve pour l’instant dans une confrontation de faible intensité avec l’État hébreu.

À savoir que le Hezbollah libanais a développé de nombreux incidents le long de la frontière israélienne sans toutefois se lancer dans une frappe massive contre l’État hébreu.

En Irak et en Syrie, les forces américaines ont été harcelées par une centaine d’attaques de drones et de roquettes mais sans faire de victime américaine.

Quant à l’Iran et à l’État hébreu, ils se sont abstenus de s’attaquer l’un l’autre directement.

Mais au début décembre, les pasdarans ont annoncé que deux de ses officiers avaient été tués dans une attaque israélienne en Syrie.

Toujours en décembre, le groupe de hackers israélien « Predatory Sparrow » a revendiqué une cyberattaque qui a perturbé les opérations dans la plupart des stations-service iraniennes. Le groupe a déclaré qu’il avait agi « en réponse à l’agression de la République islamique et de ses mandataires dans la région », avertissant le Guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, que « jouer avec le feu a un prix ».

Dans ce contexte, la mer Rouge est apparue comme une zone d’affrontement inattendue. Le mouvement Ansarullah soutenu par l’Iran au Yémen – mieux connu sous le nom de Houthis – a effectivement déclaré la guerre à l’État hébreu, frappant les navires liés aux Israéliens. Les États-Unis ont mis en place la task force internationale « Prosperity Guardian » pour maintenir la zone ouverte à toutes les navires mais la menace paraît s’étendre.

Ainsi, cinq jours après la cyberattaque contre les stations-service iraniennes, le « Chem Pluto » un pétrolier géré par le Japon, opérant aux Pays-Bas, battant pavillon libérien transportant du pétrole brut saoudien vers l’Inde mais lié à Israël a été touché par un drone à 370 km au large des côtes indiennes. Cette zone est connue pour être à portée des armes iraniennes.  Pour la première fois depuis octobre. Les États-Unis ont accusé la République islamique pour l’attaque ce que Téhéran a fermement nié.

Dans ce jeu complexe et géographiquement expansif, le « mijotage à feu doux peut se transformer en ébullition à tout moment ».

Le CGRI a menacé de représailles en réponse à la neutralisation du général Moussavi.

Le président iranien Ebrahim Raisi a exprimé ses condoléances pour la mort de Moussavi, déclarant qu’Israël « paiera certainement de ce crime ».

Mais selon Amwaj.media : « l’assassinat de Seyed Razi (Moussavi) ne modifiera pas les règles du jeu, d’autant plus que l’opération s’inscrit dans le contexte de l’escalade du rythme des opérations de sécurité dans la région de la mer Rouge et de l’océan Indien, dont Tel-Aviv cherche à tenir Téhéran pour responsable ».

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