Le Hamas a lancé une offensive surprise de grande envergure contre l’État d’Israël. Selon ses propres déclarations, il aurait tiré plus de 5.000 roquettes (dont une partie a pu être interceptée par le système de défense « dôme de fer », mais en plus, des commandos ont pénétré à plusieurs endroits sur le territoire israélien (par la terre, la mer et un peu par les airs avec des ULM) causant des pertes civiles et militaires et ramenant une cinquantaine de prisonniers qui pourront servir de « monnaie d’échange » comme otages. Une fois l’effet de sidération passé, l’État hébreu a commencé à répliquer en bombardant des cibles repérées dans la bande de Gaza.

À l’évidence, cette offensive avait été murement préparée à l’avance et, ce qui est surprenant, c’est que les services de renseignement israéliens – qui sont réputés pour être les meilleurs du monde – ne semblent pas l’avoir anticipé. Cela rappelle étrangement la guerre du Kippour qui a débuté le 6 octobre 1973. La leçon sera certainement tirée, mais après.

Globalement, le groupe armé palestinien Hamas a lancé « l’opération déluge Al-Aqsa » contre Israël, ce qui constitue l’escalade la plus grave depuis qu’Israël et le Hamas se sont livrés une guerre de onze jours en 2021. La première salve de roquettes a été tirée à 06h30 heure locale (03h30 GMT) le 7 octobre. Les roquettes ont été tirées jusqu’à Tel Aviv au nord.
L’armée israélienne a déclaré ensuite avoir lancé « l’opération Glaives de fer » contre le Hamas dans la bande de Gaza.
Les roquettes ont été tirées jusqu’à Tel Aviv au nord. Le Hamas a également envoyé des combattants dans le sud d’Israël. Selon le « Times of Israel », dans l’après-midi de samedi, des affrontements armés avaient lieu dans et autour des villes de Kfar Aza, Sderot, Sufa, Nahal Oz, Magen, Beeri et la base militaire de Re’im.
Les services d’urgence israéliens comptaient samedi au moins 100 tués et plus de 700 blessés. Les pertes palestiniennes exactes ne sont pas encore connues. Mais les bilans devraient s’alourdir dans les heures qui viennent

Pourquoi le Hamas a-t-il attaqué Israël ?
Le porte-parole du Hamas, Khaled Qadomi, a déclaré : « Nous voulons que la communauté internationale mette fin aux atrocités commises à Gaza, contre le peuple palestinien et contre nos lieux saints comme Al-Aqsa. Toutes ces choses sont la raison pour laquelle cette bataille a commencé ».
Mohammed Deif, le commandant des Brigades Izz al-Din al-Qassam, la branche armée du Hamas, a déclaré de pour sa part : « C’est le jour de la plus grande bataille pour mettre fin à la dernière occupation sur terre […] Quiconque possède une arme à feu devrait la prendre ; le moment est venu ».
Extrêmement inquiétant, le Hamas a appelé dans une déclaration publiée sur Telegram « les combattants de la résistance en Cisjordanie et les pays arabes » à rejoindre la lutte.

L’armée israélienne a demandé à ses ressortissants qui vivent près de Gaza de rester chez eux ou de se diriger vers des abris. Enfin, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a affirmé que son pays était engagé dans une guerre qu’il « gagnera ».

Les réactions internationales
Le gouvernement tchèque a condamné le Hamas pour avoir lancé des « attaques terroristes » contre Israël, l’allié traditionnel de Prague. Le chef des Affaires étrangères de l’Union européenne, Josep Borrell, a exprimé sa solidarité avec Israël. Le ministère français des Affaires étrangères a déclaré que la France condamnait les « attaques terroristes en cours contre Israël et sa population » et que la France exprimait sa pleine solidarité avec Israël. Le Royaume-Uni « condamne sans équivoque » l’attaque surprise perpétrée samedi par le groupe islamiste palestinien Hamas contre Israël. l’Ukraine « condamne fermement les attaques terroristes en cours contre Israël ». La Russie appelle « à la retenue » et se dit « en contact avec les Israéliens, les Palestiniens et les Arabes ». À l’heure où sont écrites ses lignes, Washington n’avait pas encore réagi.
L’Égypte a mis en garde contre les « graves conséquences » d’une escalade dans un communiqué du ministère des Affaires étrangères publié samedi par l’agence de presse officielle. Il appelle à « faire preuve d’un maximum de retenue et à éviter d’exposer les civils à un danger supplémentaire ».

Le Hezbollah libanais a publié samedi un communiqué affirmant qu’il suivait de près la situation à Gaza et était en « contact direct avec les dirigeants de la résistance palestinienne ».
C’est là que va se situer la suite du conflit. Le Hezbollah va-t’il intervenir depuis le Liban et la Syrie ?

Ce qui semble très probable, c’est que Téhéran est derrière cette offensive préparée à l’avance. Le professionnalisme évident des assaillants ne s’improvise pas. Ils ont vraisemblablement été formés par des membres de forces spéciales. Les renseignements nécessaires au déclenchement de l’opération n’ont pu être obtenus qu’auprès d’un service spécial compétent. Tout désigne la branche Al-Qods des pasdarans. Pour mémoire, l’Iran chiite a toujours soutenu le Hamas et le Jihad islamique palestinien composé d’activistes sunnites. Mais le combat des Palestiniens n’est à la base pas religieux mais nationaliste. C’est pour cette raison que les salafistes-jihadistes d’Al-Qaida et de Daech ont toujours été tenus (relativement) à l’écart. Il n’est pas dit que cette situation ne change pas dans l’avenir.
Quant à la raison qui anime Téhéran, elle est simple : tenter de faire capoter les rapprochements qui ont lieu entre l’État d’Israël et les pays arabes en général et avec l’Arabie saoudite en particulier. En effet, les pays qui ont déjà signé les accords d’Abraham (Bahreïn et Émirats arabes unis) et ceux qui s’apprêtent à les rejoindre se retrouvent devant un choix cornélien : ne pas soutenir les Palestiniens – donc par ricochet, soutenir l’« État juif » -, ce qui reste toujours très impopulaire dans la « rue arabe ».
Pour être bien clair, selon Le site d’informations semi-officiel ISNA, Rahim Safavi conseiller du guide suprême Ali Hosseini Khamenei a déclaré que l’Iran soutenait l’attaque palestinienne en ces termes : « Nous félicitons les combattants palestiniens […] Nous serons aux côtés des combattants palestiniens jusqu’à la libération de la Palestine et de Jérusalem ». De son côté, le ministère iranien des Affaires étrangères a déclaré que les attaques perpétrées par son allié le Hamas étaient la preuve de la confiance accrue des Palestiniens face à l’occupation israélienne: « dans cette opération, l’élément de surprise et d’autres méthodes combinées ont été utilisés, ce qui montre la confiance du peuple palestinien face aux occupants […] Les attaques « ont prouvé que le régime sioniste est plus vulnérable que jamais et que l’initiative est entre les mains de la jeunesse palestinienne ».

Les développements à venir sont imprévisibles car on sait comment commence une guerre mais on ne sait pas comment elle finit. Ce qui est clair, c’est que les cartes vont être redistribuées au Proche-Orient.
La supériorité militaire israélienne sur le Hamas (et le Jihad islamique palestinien qui semble l’avoir rejoint dans la guerre) est écrasante. Le problème des citoyens israéliens tombés aux mains des Palestiniens va compliquer considérablement la tâche de l’État hébreu qui va être obligé de tenter de négocier… jusqu’à un certain point.
Par ailleurs, Tsahal peut tout à fait faire face à une entrée dans le conflit du Hezbollah à son nord mais le pays se retrouvera alors en situation de guerre « globale ». L’Iran pourrait bien en payer le prix car plus rien ne retiendrait alors Israël.
Enfin, le conflit peut se propager à l’étranger par des actions terroristes et des soulèvements plus ou moins orchestrés en Occident. L’occasion de défendre la « cause palestinienne » est trop belle pour les « révolutionnaires de tous poils ».

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Texte

Alain Rodier

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