Lors d’une cérémonie dont elle a l’habitude, les autorités iraniennes ont présenté à la presse un nouveau drone qui, théoriquement serait capable de frapper des cibles jusqu’en Israël.

Le ministère iranien de la Défense et de la Logistique des forces armées a dévoilé le 22 août le « Mohajer-10 » dans le cadre d’une exposition marquant la « Journée de l’industrie de défense ».

Le président Ebrahim Raïssi et de hauts commandants de l’armée et du Corps des Gardiens de la révolution islamique (IRGC) ont assisté à l’évènement.

Le drone qui ressemble étrangement au MQ-9 Reaper américain, au « Gaza » iranien présenté le 28 mai 2021 et au Wing loong II chinois opérationnel depuis 2017.

Il a également été montré dans des vidéos décollant d’une piste d’atterrissage non identifiée.

Ce nouveau drone serait capable de transporter diverses munitions et des équipements anti-radars et d’effectuer des opérations de surveillance.

Selon les médias officiels, c’est la dernière version de la lignée des drones Mohajer qui a été développée pour la première fois pendant la guerre de huit ans contre l’Irak dans les années 1980.

Il pourrait transporter une charge militaire de 300 kilos à une vitesse maximale de 210 kilomètres par heure.

Les médias ont indiqué que le drone peut évoluer à une altitude de 7.000 mètres et atteindre une distance maximale de 2.000 kilomètres ce qui signifie qu’il pourrait menacer Israël.

Les médias iraniens ont publié à cette occasion une photo-montage du Mohajer-10 le présentait volant au dessus des installations nucléaires de Dimona en Israël, avec cette phrase en hébreu et en farsi : « Soyez prêt à retourner à l’âge de pierre ».

Cette nouvelle « prouesse » technique iranienne est accueillie avec scepticisme par les spécialistes. Il est difficile de vérifier les capacités attribuées à l’engin, sachant que l’Iran a, par le passé, déjà mis en avant des armements de pointe qui étaient des leurres.

Toutefois dans le domaine des drones, l’Iran possède une grande expertise(1). On sait que, même si l’information a été officiellement démentie, Téhéran fournit des drones kamikazes Mahojer-6 et Shahed-136 à la Russie qui sont utilisés en Ukraine.

Debout devant un assortiment de missiles et flanqué de commandants des pasdarans, Raïssi a aussi annoncé que deux missiles balistiques à longue portée précédemment dévoilés étaient désormais prêts à être remis à la Force aérospatiale du Corps des Gardiens de la Révolution islamique.

Il s’agit notamment du Haj Qassem(2) du nom du général Qassem Soleimani, assassiné par les États-Unis en Irak en janvier 2020 et du Khorramshahr, du nom de la ville dont la reconquête en 1982 a marqué un tournant dans la guerre contre l’Irak.

Raïssi a aussi déclaré à la télévision d’État que les avancées militaires de l’Iran ont considérablement modifié la façon dont Téhéran était perçu dans les pays étrangers : « Hier, ils nous considéraient comme un consommateur et un pays dans le besoin. Aujourd’hui, ils nous voient comme un producteur qui peut avoir beaucoup à dire dans les secteurs de la défense et de l’armée […] Nous pouvons présenter au monde l’Iran comme une puissance technologique avancée ». Par ailleurs, il a affirmé que son pays était intéressé à avoir des relations pacifiques avec toutes les nations du monde sauf avec Israël et a ajouté dans la foulée que l’Iran « couperait toute main qui serait impliquée dans une action offensive contre lui ».

Il convient de rester très prudent sur les déclarations du très conservateur président iranien qui agite en permanence l’« ennemi sioniste ».

Si Téhéran a effectivement la capacité militaire de frapper Israël avec ses missiles ou des drones tirés depuis le Sud-Liban, de Syrie ou de Gaza par ses « mouvements associés » (Hezbollah, Hamas, Jihad Islamique palestinien), un Mohajer-10 décollant du territoire iranien a très peu de chances de parvenir jusqu’à une cible situé au sein de l’État hébreu car il serait détecté et abattu bien avant. Et de toute façon, un engagement direct de Téhéran contre Israël serait le casus belli qu’attendent les dirigeants israéliens pour déclencher ce qu’ils préparent depuis des années : une frappe massive des infrastructures militaires sensibles iraniennes.

 

1.     Voir : « Iran : présentation de drones » du 30 mai 2022.

2.     Voir : « À propos des drones iraniens employés par la Russie » du 21 octobre 2022.

3.     Voir : « Missiles au nom de ses ‘martyrs’» du 23 septembre 2020.

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Texte

Alain Rodier