Selon CNN, les sanctions occidentales décrétées contre la Russie suite à l’invasion de l’Ukraine portent en particulier sur le commerce des hydrocarbures. Tout commerce maritime de ce type est désormais interdit pour les pays participant à ces sanctions (il convient de rajouter le Japon et l’Australie aux pays occidentaux). Or, les observateurs s’étonnent du fait que la production d’hydrocarbures russes ne semble pas faiblir et même serait dans une phase ascendante.

Une des réponses à cette « curiosité » est que Moscou privilégie désormais des clients (souvent déjà anciens) mais qui sont ravis de pouvoir négocier des ristournes importantes sur de grosses quantités : Chine, Inde, Turquie, Afrique…
Entre 2021 et 2022, la Chine a augmenté ses achats de pétrole russe de 19 % atteignant 1,9 million de barils/jour. L’Inde a augmenté ses importations de 800 % atteignant les 900.000 barils/jour. 860.000 tonnes de brut russe ont été expédiées vers les ports turcs en février 2023 contre 620.000 tonnes en janvier et 370.000 tonnes en décembre 2022.

Par contre, un certain mystère demeure concernant les moyens de transports utilisés. Les analystes qui surveillent les mouvements des navires de commerce affirment qu’une « flotte fantôme » de 600 navires (ce qui représente quelques 10 % des super tankers mondiaux) se serait constituée et qu’elle continuerait à croître. Cette flotte vient compléter la puissance d’exportation russe car Moscou ne peut pas aligner assez de navires pour satisfaire les besoins de ses nouveaux clients qui se trouvent plus éloignés géographiquement que les pays européens (en dehors de la Turquie). Les délais de navigation sont considérablement accrus et, en conséquence, les possibilités de rotations moins nombreuses.

Si ces dernières années, de nombreuses compagnies maritimes occidentales ont dénoncé leurs contrats avec Moscou, de nouveaux discrets acteurs sont apparus avec des sièges installés à Dubaï ou à Hong Kong. Ces compagnies ont, soit acheté des navires à des sociétés occidentales, soit rénové de vieilles carcasses promises à la casse. Il ne fait aucun doute que le risque de catastrophe maritime été écologique se fait de plus en plus grands avec ces navires qui accusent plus de quinze ans d’âge (et parfois beaucoup plus).

Selon Richard Matthews, un important dirigeant du courtier maritime « EA Gibson shipbroker » : « il y a [maintenant] une flotte qui n’a rien à voir avec le commerce russe et une autre qui fait essentiellement ses affaires Moscou […] Il n’y a que quelques navire qui font un peu des deux ».
L’analyste Matthew Wright travaillant chez le transporteur « Kpler » affirme qu’il y deux sortes de navires : les « bateaux gris » et les « bateaux fantômes ».
Les « gris » ont été vendus depuis l’invasion du 24 février 2022 par des sociétés occidentales à des firmes du Moyen-Orient et asiatiques qui ne se livraient pas auparavant au commerce des hydrocarbures. Ces ventes se poursuivraient au rythme de 25 à 35 navires vendus par mois…
Les « fantômes » participaient déjà au contournement de sanctions émises contre l’Iran et le Venezuela. Ces navires qui ont l’habitude de couper régulièrement leurs transpondeurs transportent désormais également du pétrole russe.

Pour le moment, il n’existe pas de règles claires interdisant de livrer des hydrocarbures à des pays comme la Chine – ni pour faire pression sur les sociétés d’assurance qui couvrent les navires et leurs cargaisons -.

L’Union européenne tente bien de réagir. Elle vient d’imposer des sanctions à la société « Sun Ship Management » de Dubaï, un sous traitant de la plus importante compagnie maritime russe Sovcomflot. La Russie serait son seul et unique client…

À long terme, ces moyens de transport seront complétés par des pipelines qui relieront la Russie à la Chine et à l’Inde.

1. Voir « Comment la Russie échappe aux sanctions occidentales » du 28 décembre 2022.

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