Ahmad Omar alias Abu Ubaidah et Ahmed Direye (né en 1972), l’émir du groupe salafiste-jihadiste Shebab depuis le 6 septembre 2014 suite à la mort de Moktar Ali Zubeyr tué par une frappe américaine a appelé dans une vidéo diffusée le 27 mars à frapper « les intérêts américains et français » à Djibouti.

Cette déclaration survient avant l’élection présidentielle du 9 avril qui devrait voir la réélection d’Ismaël Omar Guelleh pour un cinquième mandat (il est au pouvoir depuis 1999). Selon Ahmad Omar, le président djiboutien a « transformé Djibouti en une base militaire d’où chaque guerre contre les musulmans en Afrique de l’Est est planifiée et exécutée ». Il appelle les musulmans du pays à « faire des intérêts américains et français à Djibouti la priorité absolue de [leurs] cibles ».

Du fait de sa position stratégique face au détroit de Bab el-Mandeb à la jonction de la mer Rouge et du golfe d’Aden, Djibouti abrite de nombreuses bases militaires étrangères dont les principales sont celles des Français (1.500 militaires), des Américains (4.000 militaires) mais il y a aussi des installations allemande, japonaise, italienne et chinoise (qui n’ont pas été désignées dans la vidéo).

À noter également que Djibouti participe directement à la lutte anti-terroriste en Somalie au sein de la mission de l’Union africaine en Somalie (Amisom).
Les Américains l’utilisent comme base de départ pour mener – principalement – des frappes de drones contre les branches d’Al-Qaida et de Daech au Yémen et en Somalie.

Djibouti a servi de base arrière pour les navires et les aéronefs qui ont lutté contre la piraterie au large des côtes somaliennes, phénomène qui a considérablement décru dans cette région depuis le début des années 2010 (1).

La menace n’est pas nouvelle. Un commando-suicide avait attaqué en mai 2014 un restaurant fréquenté par les étrangers à Djibouti causant la mort d’un citoyen turc et faisant une vingtaine de blessés dont sept Français, quatre Allemands, trois Espagnols et six Néerlandais. Les Shebab avaient ensuite revendiqué l’attaque d’un « restaurant fréquenté surtout par des croisés français et leurs alliés de l’OTAN ».

Si l’on s’en tient aux termes du communiqué, Ahmad Omar appelle les musulmans du pays à passer à l’action mais il n’évoque pas l’envoi d’un commando jihadiste depuis la Somalie. Cela serait tactiquement difficile à réaliser car les frontières sont sous surveillance depuis des années et que cette dernière s’est encore renforcée en raison de la crise sanitaire provoquée par la Covid-19. Cela dit, l’alerte est sérieuse et elle est prise en compte par les autorités concernées. L’hypothèse la plus probable est encre celle de l’attentat suicide commis en solitaire ou par un groupe de fanatiques. Heureusement, pour le moment il n’a pas été constaté que les shebabs pouvaient mettre en œuvre des drones mais il faut se souvenir que les salafistes jihadistes en ont employé par centaines sur le théâtre syro-irakien.

1. La piraterie est désormais florissante dans le Golfe de Guinée.

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Texte

Alain Rodier

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