Avec le départ agité du président des États-Unis d’Amérique Donald Trump, les gouvernements de nombreux pays, mais aussi le Pentagone, se demandent si la politique militaire américaine va réellement changer avec l’arrivée de Joe Biden.

Ce dernier va-t-il continuer la stratégie – souvent imprévisible et versatile – de Trump, marquée par une hostilité forcenée contre l’Iran, une politique antichinoise, la volonté de faire payer les Européens à leur défense ou le désengagement total de l’Irak, de la Somalie et de l’Afghanistan ?

Selon les premières déclarations du nouveau Président, sa politique étrangère ne devrait pas être totalement différente de celle de son prédécesseur. Toutefois, pour marquer son début de présidence, Biden devrait mettre une pincée de multilatéralisme (bien qu’aucun président américain ne l’ait jamais été). Ensuite et rapidement, il se rapprochera des Européens, des Allemands spécialement, en annulant le départ d’Allemagne des 11 900 soldats, demandé par Donald Trump. Mais le partage des dépenses militaires en Europe restera entier, et les Européens devront payer plus pour assurer leur défense.

Il restera certainement sourd à la demande de pays européens de voir la Turquie sortir de l’OTAN. Au Moyen-Orient, en Irak d’abord, le retrait américain continuera. Les États-Unis sont bien conscients que l’État islamique est toujours présent et que le pays reste sous la coupe entière de l’Iran. D’ailleurs, pour l’Iran, Joe Biden a promis de réintégrer l’accord sur le nucléaire si les Iraniens le respectaient aussi. Or, étant donné l’avancement patent du programme nucléaire de Téhéran, cela est illusoire. D’autre part, il y a le poids d’Israël. Washington ne peut s’opposer à son allié majeur dans la région, d’autant que ce dernier a normalisé ses relations avec Abou Dhabi et Bahreïn et se rapproche de l’Arabie Saoudite – les Palestiniens étant abandonnés de tous. En Afghanistan, Joe Biden devrait poursuivre le désengagement militaire initié par Barak Obama et Donald Trump, au risque de livrer le pays aux talibans. Concernant l’Asie, le nouveau Président marche dans les pas des deux précédents présidents.

Il compte poursuivre la diplomatie en direction de l’Asie, peut-être moins pour lutter contre l’expansionnisme commercial chinois que contre son expansionnisme militaire. Ainsi, Biden a promis d’être extrêmement ferme face à Pékin ; reste à savoir jusqu’où il ira quand les Chinois interdiront tout bâtiment de combat en mer de Chine et qu’ils se feront plus menaçants pour récupérer Taïwan. D’autant qu’il devra tenir compte du non-interventionniste très important de la classe politique américaine. Pour la Corée du Nord, qui en profite pour continuer à développer ses capacités nucléaires, c’est plus simple : le président élu a qualifié Kim Jong-un de « voyou » ; donc, dans un futur proche, c’est l’impasse. Avec la Russie, Joe Biden devrait afficher une ligne politique plus dure, continuer les sanctions après l’agression russe contre l’Ukraine et décider de faire stationner plus de troupes américaines en Europe de l’Est au plus près de la Russie. Enfin, en Afrique, face à la menace du terrorisme islamiste, Joe Biden devrait continuer à déployer des unités spéciales, et à opérer de concert avec les pays les plus touchés et les rares forces européennes présentes, spécialement celles de la France. Les fondamentaux de la diplomatie et de la politique militaire ne vont donc pas changer pour le « gendarme du monde ».

Bonne lecture.
Eric Micheletti

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