Du 27 novembre au 6 décembre 2017, les forces armées dans la zone sud de l’océan Indien (FAZSOI) et la South African National Defence Force (SANDF) étaient en manœuvre à La Réunion dans le cadre de l’exercice bilatéral Oxide, avec, pour la première fois cette année, un dispositif interarmées et la mise en œuvre d’un PC interarmées dédié à la conduite des opérations.

A l’origine exercice maritime bilatéral et bisannuel mobilisant les forces armées françaises et sud-africaines dans l’océan Indien, Oxide, 10e du nom, a évolué cette année vers une version interarmées et s’est déroulé à La Réunion pour la première fois depuis 2008 (la précédente édition avait eu lieu à Richards Bay, en Afrique du Sud, en 2015). Acteur majeur dans la zone sud de l’océan Indien, l’Afrique du Sud est un partenaire essentiel pour la France dans le maintien de la paix et de la stabilité de la région. Le pays dispose d’un spectre de capacités militaires que n’ont pas la plupart des autres Etats d’Afrique australe, et la France, par le biais des FAZSOI à La Réunion, est un des rares pays avec lesquels la SANDF réalise des exercices interarmées.

Au programme cette année, un scénario mis au point en phase préparatoire deux mois auparavant, autour de la lutte contre le narcotrafic ; scénario réaliste au regard des routes maritimes et des plates-formes de transit du trafic de stupéfiants dans la zone. « Le but de cet exercice est de renforcer notre coopération et de développer notre interopérabilité afin de faire face plus efficacement aux enjeux régionaux de sécurité », précisait le général de brigade Eric Vidaud, commandant supérieur des FAZSOI.

Pour la SANDF, la marine sud-africaine (SAN pour South African Navy) a donc déployé sa frégate furtive SAS Amatola (F145, classe Valour), tandis que l’armée de l’air sud-africaine (SAAF pour South African Air Force) mettait à sa disposition des moyens aériens avec un hélicoptère Super Lynx 300 embarqué et un Douglas C-47 « Dakota », le tout étant placé sous les ordres du brigadier général Gustav W Lategan, commandant la préparation des forces interarmées sud-africaines, avec un détachement état-major en déplacement. Un C-130 et une section parachutiste étaient initialement prévus, mais ils n’ont finalement pas pu se joindre à l’exercice.

Côté forces françaises, les FAZSOI mettaient en œuvre la base navale, le bâtiment multi-mission (B2M) Champlain (A623, dans le rôle de navire plastron alternativement ami/ennemi), le détachement Air 181 avec un Casa CN235-300 de l’escadron de transport 50 Réunion et un Panther du détachement 36F, ainsi que le 2e RPIMa, avec ses chuteurs et l’ensemble de ses compagnies. Et pour la première fois dans l’histoire d’Oxide, un PC interarmées et une cellule d’animation dédiée étaient armés à la caserne Lambert, base des états-majors bilatéraux pour l’occasion. 

Durant la première semaine, les différentes phases de training ont permis aux forces de mener des entraînements communs à la mer (Visitex, ravitaillement à la mer, largage de petits colis), dans les airs (repérages de zone, largages de moyens matériels et humains à différentes altitudes) et sur terre (sauts parachutistes et chuteurs OPS). Les trois premiers jours de la semaine suivante étaient consacrés au Livex, et à un exercice FTX (Field Tactical) du 2e RPIMa en parallèle. 

En interaction permanente, les forces maritimes, aériennes et terrestres des deux pays ont mené des missions H24 entre l’ouest et le sud de La Réunion sur la trace des « cibles de haute valeur » (HVT), puis elles ont procédé à l’extraction des « otages » et mis les « trafiquants » hors d’état de nuire. Une matinée VIP a permis aux autorités (notamment Christophe Faraud, ambassadeur de France en Afrique du Sud) d’assister à l’assaut final opéré par les « Requins » de la 1re compagnie du 2e RPIMa, et à des démonstrations de savoir-faire sur la base navale, par la section commando d’appui à l’engagement.

Au total, plus de 450 militaires français et sud-africains ont manœuvré sur l’île durant dix jours, et les forces envisagent de relever encore le niveau d’ambition pour la prochaine édition en 2020.

Coopération active pour la sécurité dans la ZSOI

Réchauffement climatique, catastrophes naturelles, mauvaise gestion des zones côtières, pêche illégale, trafics illicites, instabilité intérieure de certains Etats riverains, ou encore routes maritimes marchandes convoitées (le transport maritime de marchandises est en croissance constante dans et autour du canal du Mozambique) : les menaces sécuritaires qui pèsent sur la zone sud de l’océan Indien (ZSOI) sont multiples. La France, par le biais des forces armées dans la zone sud de l’océan Indien (dont la zone de responsabilité permanente s’étend sur 14 pays et 26 millions de km2, avec 2,8 millions de km2 de zones économiques exclusives [ZEE]), est très présente sur les problématiques communes de sécurité maritime dans la région. Au-delà des exercices bilatéraux et/ou internationaux (Cutlass Express, Cateau noir, Oxide, etc.) permettant aux différentes forces armées de la ZSOI de travailler leur coordination et d’accorder leurs procédures, il s’agit de favoriser et d’encourager toutes les coopérations opérationnelles et concrètes avec les organisations régionales des Etats et territoires riverains de La Réunion (COI, SADC, COMESA…), notamment du point de vue de la concertation et des échanges d’informations entre les différents services de renseignement. Avec l’Afrique du Sud, la France affiche un même engagement sécuritaire, et les deux pays, par le biais de La Réunion, entretiennent une concertation étroite depuis plusieurs années afin d’optimiser leur lutte contre le pillage des ressources halieutiques (notamment, dans les mers du Grand Sud, le calamar pour l’AFS, la langouste et la légine, poisson à forte valeur ajoutée, pour la France, ou encore les holothuries, ces concombres de mer très prisés sur le marché asiatique, dans le canal du Mozambique), les trafics de drogue (de grandes quantités d’héroïne transitent clandestinement à travers l’océan Indien vers l’Afrique australe et à destination de l’Europe, comme les saisies en mer qui se multiplient tendent à l’indiquer) ou encore la piraterie.

L’Afrique du Sud exerce sa souveraineté sur 4,34 millions de km2

Avec un littoral d’environ 3 000 km qui s’étend de l’Atlantique Sud à l’océan Indien, en passant par les îles du Prince-Edouard (possession sud-africaine située à environ 540 NM au sud-est de Port Elizabeth) et les ZEE correspondantes, l’Afrique du Sud exerce sa souveraineté sur 4,34 millions de km2. La « nation arc-en-ciel » constitue une passerelle essentielle entre les routes du commerce maritime de l’Atlantique Sud et de l’océan Indien Sud, et outre ses prérogatives sécuritaires et économiques, elle est signataire de la convention SOLAS sur la sauvegarde des vies humaines en mer. 

Pour assurer ses missions de souveraineté, de protection et de surveillance dans sa zone de l’océan Indien, la South African Navy (SAN), composante mer des forces armées sud-africaines (SANDF), dispose de quatre frégates de la classe Valour, de trois sous-marins Type 209, de deux dragueurs de mines de type River, de deux patrouilleurs de type Warrior, d’un navire ravitailleur, de trois patrouilleurs côtiers, d’une vingtaine de vedettes rapides utilisées dans les zones portuaires, de trois remorqueurs et d’un navire hydrographique (la construction d’un nouveau bâtiment pour remplacer le SAS Protea a été actée en décembre et sera réalisée par le chantier naval VARD Marine). Elle compte également cinq Douglas C-47 (Dakota) reconvertis en avions de recherche et sauvetage en mer (SAR), quatre hélicoptères Super Lynx 300 MK64 et huit SA330 Oryx mis à disposition par la South African Air Force (SAAF).

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Valérie KOCH