Lors d’un bombardement mené le 10 octobre soir dans le camp de réfugiés palestiniens de Nour Shams à Tulkarem, Muhammad Abdullah, le commandant local du Jihad islamique palestinien (JIP). L’activiste Awad Jamil Saqr Omar aurait aussi été liquidé.

Ces derniers mois, Muhammad Abdullah était le responsable de l’organisation terroriste dans le camp et a été impliqué dans de nombreux attentats. Des fusils M-16 ont été trouvés en possession des terroristes.

 

Il avait pris ses fonctions après la mort de son prédécesseur, Muhammad Jaber alias « Abou Shujaa » qui avait été tué au cours d’un échange de tirs avec les Israéliens le 29 août.

 

Plus de 13.000 Palestiniens s’entassent sur un cinquième de kilomètre carré dans le camp de Nour Shams. Il a été ouvert en 1952 pour accueillir des Palestiniens ayant fui les villages des environs de Haïfa lors de la création d’Israël quatre ans plus tôt. Selon l’ONU qui le gère, il est l’un des 19 camps de Cisjordanie les plus miséreux et touché par les problèmes sanitaires.

 

L’armée israélienne avait déjà affirmé le 5 octobre avoir tué 12 « terroristes » membres du Hamas et du JIP lors d’une frappe ayant eu lieu le 3 octobre à Tulkarem : « l’armée de terre et l’armée de l’air ont mené une opération conjointe pour frapper des terroristes qui prévoyaient de mener une attaque terroriste contre des civils israéliens dans un avenir proche ». Selon les services de sécurité palestiniens, cette opération aurait été la plus meurtrière depuis 2000 en Cisjordanie.

Le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme avait condamné le 11 octobre « une frappe aérienne illégale » estimant qu’il s’agissait d’un « autre exemple clair du recours systématique à la force meurtrière par les forces de sécurité israéliennes en Cisjordanie, souvent inutile, disproportionné et donc illégal […] La destruction d’un bâtiment entier plein de monde par un bombardement aérien témoigne d’un mépris flagrant d’Israël pour ses obligations ».

Il faut admettre que les relations de l’État hébreu avec l’ONU sont actuellement difficiles. Ainsi, le 2 octobre, son secrétaire général Antonio Guterres, a été déclaré « persona non grata » en Israël. Le ministre des affaires étrangères israélien a reproché au secrétaire général de l’ONU, de ne pas avoir ouvertement condamné la salve de missiles iraniens lancé la veille sur l’État hébreu et lui a interdit tout séjour sur le territoire : « Quiconque ne peut condamner sans équivoque l’attaque haineuse de l’Iran sur Israël est considérée comme persona non grata en Israël », a déclaré Israël Katz, avant d’ajouter que le secrétaire général des Nations Unies « resterait dans l’histoire comme une tache honteuse pour l’ONU ».

Le Jihad islamique palestinien (JIP)

 

Le Jihad islamique palestinien est moins connu que le Hamas et pourtant il est très bien implanté dans les camps de réfugiés du nord de la Cisjordanie. Il est aussi présent à Gaza et au Liban.

Cette « organisation nationaliste islamique et mouvement de libération » considère le jihad comme « un combat contre l’injustice ». Sa branche armée est constituée par les Brigades Al-Qods.

Formé en Égypte puis dans la bande de Gaza en 1981, le JIP entretient les liens étroits avec le Hamas et le Hezbollah. Faisant partie de l’« Axe de résistance », il est soutenu par Téhéran.

Avec quelques milliers d’activistes, il est moins important en nombre que le Hamas (10.000 combattants) auquel il est allié mais pas inféodé. Il prend lui-même ses décisions et avait, par exemple participé au pogrom du 7 octobre 2023 en prenant ses propres otages. Par contre, il ne dispose pas d’un réseau social comme le Hamas.

Son secrétaire général Ziad Nakhalé

À la fin juillet 2024, son secrétaire général actuel (depuis 2018) Ziad Nakhalé avait accompagné son homologue du Hamas, Ismaël Haniyeh, lors d’une visite rendue au guide suprême iranien, Ali Khamenei à Téhéran à l’occasion de l’intronisation du nouveau président élu Massoud Pezechkian (qu’il a aussi rencontré individuellement).

Il était hébergé dans la même maison d’hôtes de la banlieue de Téhéran où Haniyeh a été tué par une explosion survenue dans la chambre qu’il occupait au 5ème étage le 31 juillet 2024 vers 02 h 00 du matin. Logeant à un étage différent, Ziad Nakhalé  n’a pas été touché. Bien qu’ayant été désigné comme un « mort qui marche » (walking man) par Israël après les massacres du 7 octobre 2023, il semble qu’il n’ait pas été visé à ce moment là, Haniyeh semblant être une cible à traiter en priorité.

Le mystère de l’explosion n’a pas été dévoilé mais l’hypothèse la plus probable reste un drone ou à un missile anti-char qui a pénétré dans la chambre par une fenêtre.

La version avancée d’une placée à l’intérieur même de la pièce est sujette à caution car il n’y avait pas d’endroit sûr pour la dissimuler durant une longue période. De plus, il n’est pas certain qu’Haniyeh descendait toujours dans la même chambre.

Téhéran n’a pas communiqué sur cette opération alors que les autorités ont certainement recueilli les éléments matériels qui leur permettent de comprendre ce qui s’est passé. Il est gênant d’avouer que des opérateurs ennemis clandestins évoluent librement en Iran avec les moyens de transformer des cibles parfaitement localisées en chaleur et lumière…

L’État d’Israël est en guerre pour sa survie depuis sa création avec le soutien plus ou moins appuyé des pays occidentaux dont la conduite est animée par de nombreuses raisons différentes.

Ses adversaires étatiques ont varié avec le temps : Jordanie, Égypte, Syrie, Irak … puis aujourd’hui l’Iran.

Par contre, les responsables palestiniens sont (presque) toujours restés les ennemis de l’État hébreu qu’ils accusent de les avoir spoliés de leurs terres. Abandonnés par les pays sunnites, ils font désormais partie de « l’axe de résistance » dirigé par Téhéran.

Malheureusement, cette guerre va perdurer sur des générations.

 

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Texte

Alain Rodier