Le 3 août, le Brigadier général Saddam Haftar a ordonné la fermeture partielle du champ pétrolifère de Sharara exploité dans le sud-ouest libyen par la société espagnole Repsol théoriquement placé sous le contrôle du Gouvernement d’Union Nationale (GUN) basé à Tripoli et reconnu par la communauté internationale.

Le champ de Sharara, est le plus grand champ pétrolier de Libye avec une capacité de production estimée de 350 à 360.000 barils/jour.

Saddam Haftar venait de rentrer d’Italie où il avait assisté à un match de football sous une fausse identité. À son retour, il a été informé qu’il l’avait échappé belle puisqu’un mandat d’arrêt international venait d’être lancé à son encontre par Madrid en raison de son implication dans une affaire de contrebande de systèmes anti-drones fabriqués en Espagne vers la Libye découverte par la police espagnole en début d’année.

La National Oil Corporation (NOC) et le ministère du Pétrole et du Gaz du gouvernement d’union nationale (GUN) n’avaient pas été prévenus de cette mesure coercitive.

Selon les déclarations de Bachir Al-Sheikh, le chef du « mouvement du Fezzan » qui contrôle en partie la région, suite à la fermeture partielle des installations par des groupes armés « indéterminés », la production est tombée à 260.000 barils/jour.

Il a confirmé que l’ordre d’opération avait été téléphoniquement par Saddam Haftar qui commande depuis mai 2024 les forces terrestres de l’Armée Nationale libyenne (ANL) emmenée par son père, le Maréchal Khalifa Haftar.

Il a ajouté : « je m’attends à ce que toute la production s’arrête si l’Espagne ne répond pas aux exigences de Saddam Haftar ».

Et cela pose la question de la succession du Maréchal Haftar…

Le 7 novembre, le Maréchal Khalifa Haftar fêtera ses 80 ans, et les rumeurs de sa santé chancelante posent la question de sa succession.

Il a pris soin de placer ses six  fils et sa fille à des postes lucratifs et aux plus hauts rangs de l’armée mais il y aurait concurrence entre ses enfants…

Selon Tarek Megerisi, chargé de mission auprès du Conseil européen pour les relations internationale, le processus sera difficile car « les Libyens de l’Est, les tribus et les chefs de communautés ont clairement fait savoir qu’ils n’avaient pas signé pour un nouveau monarque héréditaire. Ils n’acceptent pas l’idée que les fils Haftar prennent le pouvoir. Ces derniers ont beaucoup de mal à s’imposer dans l’armée, car ils n’ont pas reçu d’éducation ou de formation militaire et ils sont impliqués dans une corruption considérable ».

De nombreux Libyens n’aiment guère le Maréchal Haftar mais ils craignent la perspective de voir ses fils reprendre ses réseaux ne plonge le pays dans une nouvelle phase d’instabilité.

Les fils Haftar doivent tous leur position à leur père qui a eu des liens sous diverses formes avec les États-Unis, la Russie, la France, l’Italie, l’Union européenne, l’Égypte et les Émirats arabes unis… La loyauté envers le patriarche est primordiale parmi ses enfants qui n’ont pas sa formation et son expérience.

Saddam a été commandant du 106ème bataillon de l’ANL qui fait office de garde personnelle de Khalifa Haftar. Il a été remplacé à ce poste par son frère aîné, Khaled, qui possède un diplôme universitaire et est considéré comme plus brillant que son cadet.

Mais en mai, Saddam a été propulsé chef d’état-major de l’armée de terre de l’ANL…

Le 11 septembre 2023, lorsque les barrages de Derna ont cédé, le fils aîné, Elseddik Haftar, qui était de passage à Paris a déclaré qu’il serait ouvert à une future candidature à la présidence libyenne. À noter qu’il n’a pas de poste « militaire » mais il est « conseiller » de son père.

Le gouvernement parallèle de Benghazi est en permanence à la recherche de légitimité sur la scène internationale. Les dirigeants de l’Est libyen, qui s’opposent au GUN basé à Tripoli et reconnu par l’ONU ont renforcé leurs relations diplomatiques avec les régimes militaires sahéliens ces derniers mois. Et c’est Saddam qui a été missionné par son père pour dialoguer avec les nouveaux chefs d’États.

À n’en pas douter, il est en bonne position pour prétendre à succéder à son père en cas de …

Biographie de Saddam Haftar

Saddam Haftar est né 1991 un an après que son père, haut commandant de l’armée de Mouammar Kadhafi, se soit exilé aux États-Unis.

Le plus jeune des six fils Haftar grandit avec sa mère à Benghazi, dans l’est de la Libye, alors que son père vit aux États-Unis. The African Report précise : « on sait peu de choses sur sa jeunesse, si ce n’est qu’il n’a aucun diplôme d’études secondaires connu ».

Il a 20 ans lorsque le soulèvement anti-Kadhafi éclate en 2011, ce qui fait revenir son père d’exil. La situation du jeune homme commence à s’améliorer après 2014, lorsque son père attaque des groupes armés rivaux, déclenchant la deuxième guerre civile libyenne, au terme de laquelle l’ANL de Khalifa Haftar prend le contrôle de la région de la Cyrénaïque, dans l’Est du pays.

En 2016, Saddam Haftar est nommé à la tête de la brigade Tariq Ben Zeyad (TBZ), l’un des groupes armés les plus puissants opérant sous l’égide de l’ANL.

Il est accusé de crimes de guerre par des ONG dont Amnesty International.

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Texte

Alain RODIER