Un régiment opérationnel (escadrille) de dix MiG-31K Foxhound armés de missiles hypersoniques a été constitué au sein de la 4è Armée de défense aérienne dans le district militaire sud dont le PC est à Rostov sur Don. Leur mission première est d’assurer la lutte contre les navires de surface adverses en mer Noire voire en Méditerranée (l’appareil peut être ravitaillé en vol).

Héritier de l’intercepteur MiG-25 Foxbat, le MiG-31 est entré en service en 1981. Il a été décliné en de nombreuses versions dont celle du MiG-31K. Ce dernier a perdu ses principales capacités de combat air-air au profit de l’appui air-sol. Deux exemplaires ont été déployés en Syrie à l’été 2021 à fins d’essais en conditions réelles.

Dix exemplaires du MiG-31BM ont ainsi été modifiés à partir de 2018 afin de pouvoir emporter le missile hypersonique Kh-47M2 Kinzhal ALBM (air-launched ballistic missile). Selon certaines sources, cette arme pourrait atteindre une vitesse de Mach 10 et atteindre une cible située à 2.000 kilomètres en menant des manœuvres évasive compliquant une éventuelle interception. Il peut être doté d’une tête classique de 500 kilos ou nucléaire (d’une puissance allant de 100 à 500 Kt).

La présence de ces appareils sur zone (la base où ils sont stationnée n’est pas connue pour l’instant par l’auteur) change la donne tactique en mer Noire. Cette capacité de frappe (classique) donne une supériorité maritime incontestable à la Russie par rapport aux navires de l’OTAN même si sa propre marine est littéralement coincée dans ce « lac intérieur ». Mais, heureusement, il n’est pas question pour l’instant – malgré la situation tumultueuse prévalant en Ukraine – de « guerre de haute intensité »(1) dans la région mais de politique d’influence ou l’espace maritime joue un rôle de premier rang. Pour l’instant, Moscou détient les pièces maîtresses tactiques dans cet immense jeu lancé avec l’OTAN.

Ce déploiement ajouté aux manœuvres de quelques milliers de militaires russes qui ont repris le long de la frontière ukrainienne ne vont pas calmer les choses. Après les rencontres de la mi-janvier Russie – États-Unis, Russie – OTAN puis Russie – OSCE (Organisation pour la sécurité et la Coopération en Europe), il semble que les résultats sont bien maigres.

Michael Carpenter, le représentant permanent des États-Unis auprès de l’OSCE qui regroupe 57 nations a déclaré : « nous rencontrons en ce moment une crise pour la sécurité européenne […] le roulements de tambours de guerre n’ont jamais été aussi forts ». De son côté, le ministre des Affaires étrangères polonais Zbigniew Rau a affirmé que l’« Europe n’avait jamais été aussi proche de la guerre depuis trente ans ».

Il semble que les intervenant n’ont pas bien lu la déclaration des membres du Conseil de sécurité de l’ONU publié en janvier 2022(2) : « la République populaire de Chine, les États-Unis d’Amérique, la République française, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord et la Fédération de Russie considèrent qu’il est de leur responsabilité première d’éviter une guerre entre États dotés d’armes nucléaires et de réduire les risques stratégiques […] Compte tenu des conséquences de grande ampleur qu’aurait l’emploi des armes nucléaires, nous affirmons également que celles-ci, tant qu’elles existent, doivent servir à des fins défensives, de dissuasion et de prévention de la guerre».

 

1. Il convient de rester lucide face à ce concept développé par la Défense (obligatoirement avec l’accord du chef de l’État) qui n’a pas été présenté à la représentation nationale pourtant concernée par ce changement de stratégie. Aujourd’hui, une guerre de haute intensité aurait forcément lieu contre la Russie car pour la Chine, cela viendra plus tard. Au niveau classique, l’OTAN serait aujourd’hui complètement dépassé tactiquement amenant les autorités politiques américaine et française à l’éventuel choix dramatique d’engagement du feu nucléaire. S’il était décidé, il entraînerait automatiquement une riposte similaire de la part de Moscou.

2. Voir : « Montée des tensions géopolitiques : la situation se calme » du 4 janvier 2022.

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Texte

Alain Rodier

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